ImprimerA chaque édition, ils sont un peu plus nombreux à s'investir dans cette opération. Pourtant, l'ampleur nationale de la fête n'est toujours pas acquise. Qu'est-ce qui motive les participants actuels à croire en cette journée?
La Fête de la vigne et du vin (FVV) connaît un essor national difficile. De mauvaises langues estiment que cette manifestation n'en finit plus de démarrer, depuis cinq ans. Il est vrai que ce rendez-vous annuel, organisé le premier samedi qui suit l'Ascension, n'a pas encore l'impact national et médiatique désiré, deux grandes régions viticoles comme la Champagne et le Bordelais étant toujours très réservées. Pourtant, chaque année, il mobilise des milliers de bénévoles (quinze mille personnes pour 1999, selon les organisateurs) qui croient dur comme fer en cette communication grand public.Pour Paul Buisse, négociant et producteur en Touraine, la Fête de la vigne et du vin ' s'inscrit dans une politique de commercialisation à long terme. Il s'agit de faire connaître notre savoir-faire. La traditionnelle foire aux vins est dépassée : on y est tous alignés, les uns à côté des autres, pour faire déguster nos produits. Cela manque de convivialité. Il faut rendre au vin son aspect festif '. C'est la deuxième année que ce professionnel, âgé d'une cinquantaine d'années, consacre du temps et de l'énergie à la FVV. Avec la trentaine de vignerons de son canton, il a organisé un concours de rouleurs de barriques à travers les rues de Montrichard (Loir-et-Cher).Convaincu depuis l'origine de la manifestation en 1995, Alain Ignace, cinquante ans, président de la cave des Vignerons des Beaumes-de-Venise (Vaucluse), considère que la FVV ' s'assimile à un service rendu au consommateur. C'est une journée d'accueil où les vignerons expliquent leur métier plus qu'ils ne cherchent à vendre leurs produits. Toutefois, à terme, ce type de manifestation facilite la commercialisation car on aura su faire partager une passion. Sans compter qu'un consommateur convaincu représente un porte-parole idéal pour le secteur '.Cette analyse est partagée par Alain Bremond, trente-six ans, vigneron coopérateur du Vaucluse, qui estime que la FVV est un bon outil de communication pour la jeune appellation que constituent les côtes du Lubéron. ' Nous avons la chance d'avoir une région très touristique mais peu de gens connaissent notre vignoble. En organisant des fêtes viticoles pendant le pont de l'Ascension, on fait d'une pierre deux coups : on anime les villages et on fait goûter nos vins '. Afin de répondre au mieux aux attentes de cette cible que constitue la famille en villégiature, de nombreuses activités sont axées sur les enfants (concours de dessin, éveil sensoriel...).Comme de nombreux membres de la filière, Cécile Bernhard, vigneronne alsacienne, présidente du syndicat viticole de Châtenois (Bas-Rhin), est convaincue que la FVV est ' d'autant plus importante que le vin fait l'objet de nombreuses attaques en tant que boisson alcoolisée '. L'an passé, la vingtaine de vignerons de son syndicat a créé une oenothèque dans les sous-sols de la mairie. Chaque année, ' cette mémoire viticole du village ' est alimentée par de nouveaux dépôts à l'occasion de la FVV, une façon de ' résister au développement de la culture Coca-Cola '.Antoine Duperray, quarante-cinq ans, vigneron en cave particulière et maire du village d'Oingt (Beaujolais), estime que la FVV ' vient en complément des autres fêtes viticoles qui, trop souvent, sont synonymes de beuveries collectives. Là, il y a vraiment un impact pédagogique et culturel. Boire du vin ne signifie pas que l'on sache comment il est fait. Or, je suis convaincu qu'on l'apprécie davantage quand on sait le travail qu'il y a derrière un bon verre '. L'an passé, la fête s'était limitée à la cour de la mairie. Cette année, les douze ateliers ' de la vigne au verre ' se sont répartis sur l'ensemble du village.La coexistence de fêtes locales vigneronnes et d'une Fête nationale de la vigne et du vin ne gêne pas non plus Philippe Benezet, trente-six ans, viticulteur en cave particulière dans le Var, qui insiste sur l'aspect fédérateur de la FVV. ' Parce qu'elle est à vocation unitaire et nationale, cette manifestation gomme les clivages entre caves particulières et coopératives. Vu la concurrence à laquelle il faut faire face, c'est important d'être unis pour défendre le vin français. 'Tout aussi convaincu, Roque Pertusa, trente-six ans, président des Jeunes vignerons coopérateurs du Var, espère bien qu'un jour, l'actuelle fête nationale des vignerons prendra une ampleur européenne. ' La communication des vignerons français est limitée depuis la loi Evin. Elle risque de devenir de plus en plus difficile avec le projet des pouvoirs publics, d'assimiler le vin aux drogues dures. La Fête de la vigne et du vin constitue un bon moyen de garder le contact avec le grand public et de donner une image positive de nos produits. Il faut absolument occuper le terrain. Sinon, d'autres le feront à notre place. Il suffit de voir l'usage que nos concurrents d'outre-Atlantique font de l'argument ' french paradox ', tandis qu'en France, nous sommes tenus à plus de réserve. ' En tant que vice-président du comité d'organisation départemental de la FVV, il souhaite voir développer des actions de communication directement dans les métropoles régionales : ' A défaut de faire venir les citadins dans nos vignes, il faut encourager les vignerons à faire la fête dans les centres-villes '.Une idée à travailler pour l'édition de l'an 2000...