Cette année, pour la première fois, la plupart des régions fêtaient la vigne et le vin le même jour, le 23 mai. Pour que l'événement prenne réellement une dimension nationale, il faudra redoubler de cohérence et d'imagination.
Dans les côtes du Rhône, les vignerons ' essuient les plâtres ' de la fête de la vigne et du vin pour la quatrième année consécutive. Ce sont en effet les jeunes coopérateurs du Vaucluse qui, en 1995, ont eu l'idée de consacrer le samedi de l'Ascension à sa célébration. Ce 23 mai, au pied des dentelles de Montmirail, le soleil illumine les coteaux bercés par une légère brise.' Le temps est avec nous ', sourit un vigneron. Pourtant, rien n'indique à l'automobiliste de passage qu'aujourd'hui, c'est la fête de la vigne et du vin. Pas une affiche, pas une banderole n'y font référence. Il faut se rendre dans les caves. A celle de Sablet, un premier bataillon de cyclistes pose le pied sur les graviers de la cour. Le rallye qui avait débuté le matin s'achève. L'heure est à l'apéritif vigneron. Le caveau de vente se remplit. ' Depuis 11 h 15, c'est l'affluence, commente le caviste. Cette année, nous avons mieux disposé nos stands afin d'attirer le public. Les gens dégustent et achètent des bouteilles. 'On rencontre là des habitués des lieux, des touristes heureux de se mêler à cette fête impromptue et ce groupe de neuf personnes, originaires de la Haute-Loire et inconditionnelles de l'événement. ' C'est la troisième année que nous venons. Nous en profitons pour constituer notre cave, visiter la région et participer aux animations ', explique l'une d'entre elles. Un peu plus loin, dans la cave de Rasteau, les visiteurs s'attroupent dans les chais autour d'une kyrielle de petits fours. Un peu surpris de cet accueil particulier, ils écoutent les explications du président de la cave sur la gamme des vins qu'elle commercialise. Auparavant, cinq personnes avaient parcouru le sentier viticole du vignoble, accompagnées d'un guide. ' C'est la première année que nous avons des candidats à cette expédition, souligne le président de la cave. Preuve que la fête de la vigne et du vin commence à trouver un écho auprès du grand public. ' Il faudra encore du temps, et certainement beaucoup de bouche à oreille, avant qu'elle ne devienne un rendez-vous annuel.En Gironde, seule la cave coopérative de Rauzan participait à la fête. Depuis le mois de décembre, une quinzaine de coopérateurs ont préparé bénévolement son organisation. Ils ont réussi un événement culturel et convivial : salon du livre regroupant douze auteurs, dont Claude Villers, une expo-photo avec six professionnels de la région, sur le thème ' Vin, tradition et modernité ', et des ateliers sur les métiers du vin. Côté spectacle, une banda animait le déjeuner champêtre. Intronisations, rouleurs de barriques, promenade en calèche, manège pour les enfants, tombola, dîner dansant avec orchestre étaient également au programme. Le tout pour un budget global de l'ordre de 200 000 F.Les partenaires (Crédit agricole, Groupama, chambre d'agriculture), l'union Saint-Vincent et la cave de Rauzan en ont financé une grande partie. Gilles Grenier, le président de la cave, et Denis Baro, responsable de l'organisation, se félicitent de la couverture par les médias régionaux, de l'impact d'une telle manifestation auprès du public et de leurs clients. Les ventes ont augmenté ce jour-là de 50 %. Mais pour eux, le plus important reste la formidable dynamique créée entre les adhérents et la coopérative.Leurs regrets? Que Rauzan, aidé par l'union Saint-Vincent, soit la seule unité en Gironde à s'être associée à cet événement national. Bordeaux a consacré ses efforts à sa fête du vin que la ville prépare pour juin.Les Alsaciens organisent de longue date des fêtes du vin estivales. Comme les producteurs de Rauzan, cette année, pour la première fois, ils se sont associés à l'événement initié dans le Vaucluse.La trentaine de syndicats locaux qui se sont lancés dans l'aventure se répartissaient en trois catégories : les premiers ont assuré un service minimum avec des portes ouvertes; les seconds ont oeuvré dans un souci pédagogique; les troisièmes ont voulu créer l'événement. Le syndicat de Bergheim se classe dans la deuxième catégorie. Cinq maisons de cette commune du Haut-Rhin ont organisé une présentation commentée de grands crus des millésimes 1995, 1996 et 1997. ' Il s'agit de permettre au public de comparer le résultat des anciennes et des nouvelles disciplines de production de grand crus. Le syndicat n'en attend aucune retombée spéciale. C'est une mise en route de l'opération ', explique André Freyburger, le président.Parmi les syndicats qui ont cherché à créer l'événement, Wolxheim (qui fête traditionnellement le riesling en septembre) a misé sur le retour aux sources en célébrant, à l'église et en cortège, saint Urbain, patron des vignerons alsaciens. ' C'est la redécouverte d'une richesse historique, d'une tradition viticole et culturelle ', résume Robert Muhlberger, président du syndicat. Dans l'esprit des organisateurs, la date doit devenir un rendez-vous régulier. En 1999, la fête doit se diversifier et comporter des animations. Mais en 1998, à l'instar de l'ensemble des initiatives prises en Alsace, elle avait encore tout d'un galop d'essai que la profession espère être un prélude à une véritable dynamique.