Septième génération d'une famille de vignerons, Daniel et Frédéric Coulon ont pris la suite de leur père Paul. Ils ont modernisé l'outil de production en s'appuyant sur les acquis du passé, consignés dans des 'livres mémoire'.
Chez les Coulon, la vigne est une véritable affaire de famille. Elle traverse les générations et leur survit même puisque les plus anciennes parcelles du domaine de Beaurenard ont 90 ans!Sur ce domaine, on cultive donc la vigne en gardant en mémoire ce que faisaient les anciens et en pensant aux générations à venir. Pour entretenir cette mémoire, Daniel et Frédéric Coulon disposent de deux outils : une collection de bouteilles commencée en 1929 et un grand livre par an depuis 1967. Dans chaque livre sont regroupées toutes les informations disponibles sur le millésime, les données météorologiques, les stades phénologiques, le suivi de maturité, des photographies, les analyses, les commentaires de dégustation...'Il ne s'agit pas d'une mémoire morte, précise Daniel Coulon. Nous utilisons les livres pour comparer les millésimes ou nous replonger dans ce que nous avions fait il y a dix ou quinze ans. Cela nous permet de progresser.'Evidemment, au cours des années, le livre annuel, qui reste sous la responsabilité de Paul Coulon, s'est enrichi de nouvelles données. Depuis 1981, on y reporte, par exemple, les résultats des analyses de sols et de pétioles réalisées chaque année.'Lorsque je me suis installé, se souvient Daniel Coulon, les vignes étaient déjà en bon état mais les fumures se faisaient de façon assez systématique. Les analyses régulières ont permis d'apporter des corrections, de trouver le meilleur équilibre, d'améliorer encore la qualité du raisin et donc du vin produit.'Une autre réflexion a ensuite été menée au sujet de l'érosion et de la perte de patrimoine qu'elle engendre. Des essais d'enherbement ont été mis en place, au début un rang sur deux, puis sur tous les rangs. Les résultats étant satisfaisants, l'enherbement naturel ou par semis, selon les parcelles, a été généralisé et aujourd'hui, seuls 10 ha restent en labour. 'En nous permettant d'accéder aux parcelles dans les 24 heures suivant une pluie, l'enherbement nous a également aidé à mettre en place la lutte raisonnée', ajoute Daniel Coulon. C'est d'ailleurs dans cette optique de mieux cibler la protection que Daniel et Frédéric Coulon ont investi en 1992 dans un système de pulvérisation face par face pour les traitements contre les vers de la grappe. Là encore, ils ont pu constater des améliorations rapides.En 1988, lorsque Frédéric Coulon s'est installé, la nouvelle cave a été construite pour remplacer différents locaux plus éparpillés. 'Nous voulions un outil de travail fonctionnel mais avec un certain cachet', expliquent les deux frères qui ont visité de nombreux sites avant d'arrêter leur choix. La cave a été légèrement surdimensionnée pour prévoir d'éventuels agrandissements et conçue pour faire du 'sur-mesure' en fonction des cépages, des parcelles et de la durée de cuvaison souhaitée. 'Ce n'est pas le manque de place qui décide de la date du décuvage, mais les résultats d'analyse et de dégustation.'Au cours de la vinification, de l'élevage et lors des assemblages, des dégustations sont régulièrement organisées entre les deux frères, leur père et l'oenologue. Et c'est en dégustant que Frédéric et Daniel Coulon ont imaginé de mettre en valeur le potentiel de leurs plus vieilles vignes (entre 60 et 90 ans) au travers d'une cuvée d'exception et d'un élevage un peu différent. Ils ont réalisé différents essais et c'est sur le millésime 90 qu'ils ont jugé que la cuvée était digne d'être commercialisée séparément. Depuis, ils ne sortent cette cuvée haut de gamme que sur des millésimes qui en valent la peine.Paul Coulon commercialisait déjà toute sa production en bouteilles avant que ses fils n'arrivent. Aujourd'hui, les clients particuliers représentent environ 50% des ventes, l'autre moitié partant à l'exportation. 'Nous avons pour principe de donner la priorité aux particuliers. Quand un nouveau millésime est mis en vente, ils sont servis en premier et le reste va à l'exportation. Nos clients sont fidèles et ils savent que même si le millésime est mal noté par les critiques, ils peuvent nous faire confiance. Cela suppose que, de notre côté, nous mettions tout en oeuvre pour ne pas les décevoir, par exemple en triant plus sévèrement quand les années sont difficiles ou pourries', expliquent Frédéric et Daniel Coulon.Deux lettres annuelles sont envoyées à l'ensemble des clients. 'Ce serait bien de faire davantage mais compte tenu du coût des envois postaux, ce n'est pas envisageable. C'est pourquoi sur le dernier envoi, nous avons demandé à nos clients de nous donner leur adresse internet. Nous pourrons ainsi leur envoyer des informations et des photos sur les travaux en cours de façon beaucoup plus régulière', prévoit Frédéric Coulon.Sous l'impulsion de Paul et de Frédéric Coulon, le domaine de Beaurenard a d'ailleurs son site internet depuis trois ans. Il a récemment été refait, permettant une plus grande interactivité entre les visiteurs du site et le domaine. Pour le moment, il n'est pas prévu de vendre en ligne mais cela viendra peut-être.