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S'il utilise les bonnes méthodes, l'oenologue doit donner les bons résultats

La vigne - n°108 - mars 2000 - page 0

Un laboratoire a-t-il l'obligation de délivrer des bulletins d'analyse exacts? Beaucoup pense que oui, surtout en ce qui concerne les analyses usuelles. La décision d'une cour d'appel laisse croire que non.

Christian Moutous était vigneron à Bollène dans le Vaucluse. Aujourd'hui, il attaque le laboratoire d'oenologie avec lequel il travaillait lorsque sa cave a été polluée par des chloroanisoles, parce qu'il considère que ce dernier a failli à son devoir de conseil. Il a perdu en appel, mais en dehors de sa propre histoire, une phrase dans la décision de la cour surprend: 'Le fait que pendant plusieurs années, le centre ait effectué pour le compte de ladite société, dans le cadre de l'objet pour lequel il avait été constitué, de nombreuses analyses sur des échantillons fournis par la SCEA, ne peut avoir pour effet de faire peser sur lui une obligation de résultat non seulement sur chaque analyse rendue, mais encore sur le fonctionnement général de la cave.' La non-obligation de résultat sur les analyses rendues l'a fait bondir. L'un de ses avocats, maître Monroux, est lui aussi étonné. Il considère que l'oenologue a, pour les analyses qu'il délivre, une obligation de résultat, en fonction de l'état des connaissances. Pour l'avocat de la partie adverse, la cour s'est sur ce point mal exprimée, et ne voulait pas dire cela.La question reste néanmoins posée. Un laboratoire d'oenologie a-t-il une obligation de résultat sur les analyses qu'il réalise? Daniel Péraldi est président de la fédération des laboratoires d'oenologie indépendants, mais également vice-président de l'Union française des oenologues. Avec l'avocat Gilles Desplats, il a beaucoup travaillé sur la notion de responsabilité de l'oenologue. Pour lui, lorsqu'un oenologue utilise une méthode référentielle, ou validée par rapport à une telle méthode, et qu'il se cale sur des échantillons de référence, il a la compétence et doit donner des résultats exacts, eu égard aux incertitudes de mesures. 'Quand un laboratoire est accrédité, il a d'emblée cette obligation, indique-t-il. Il y a cependant des mesures pour lesquelles nous ne disposons pas encore d'échantillon de référence. Par exemple, il n'est pas possible aujourd'hui d'obtenir des concentrations stables de SO2 libre pour que les laboratoires puissent avoir le même référentiel. Sans cela, il n'y a pas de corrélation certaine possible.'Les laboratoires non accrédités ont-ils également cette obligation de résultat? 'Le problème est plus complexe, juge Daniel Péraldi. Il n'est pas toujours nécessaire d'avoir une analyse très précise, pour certaines analyses de routine notamment. En outre, chaque analyse est réalisée avec une méthode à laquelle s'attache une précision spécifique. C'est cette précision que le laboratoire doit respecter.' Pour Gilles Desplats, 'l'oenologue a une obligation de résultat sur les analyses qu'il donne. A lui d'avoir les outils nécessaires pour réaliser correctement les analyses habituelles'.L'accréditation est donnée pour une liste d'analyses relativement classiques. Les laboratoires agréés par les pouvoirs publics pour procéder aux analyses officielles doivent être accrédités. Le Journal officiel indique que 'les laboratoires agréés doivent pouvoir effectuer les analyses ci-après selon les méthodes officielles usuelles et avec les précisions énoncées dans le règlement...'. Là, l'obligation de résultat transparaît. Mais pour des analyses plus pointues, inhabituelles, le laboratoire n'a pas forcément le matériel adéquat pour y faire face. 'Dans ce cas-là, je ne pense pas qu'on puisse lui demander une véritable obligation de résultat, mais il doit signaler qu'il s'agit d'une simple valeur de diagnostic.'Daniel Péraldi ajoute: 'Les résultats analytiques émis ne le sont qu'aux regards de la représentativité de l'échantillon fourni au laboratoire'. Si l'oenologue n'a pas pris lui-même l'échantillon, il ne peut pas être tenu pour responsable si ce dernier s'avère peu représentatif de la cuve où il a été prélevé. 'Les problèmes analytiques sont rares, conclut Daniel Péraldi. Il ne me vient en mémoire qu'un cas. Le résultat d'analyse était juste, mais il y avait eu une erreur de transcription sur le bulletin.'Référence: cour d'appel de Grenoble, première chambre civile, arrêt du 7 décembre 1999.

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