ImprimerLa coopérative des Hauts de Gironde vend directement 2 millions de cols/an, soit 15% de sa production. C'est à l'assemblage de ces vins qu'elle accorde le plus de soins.
Pour les blancs, les choses sont simples. A l'exception du haut de gamme que la cave des Hauts de Gironde (Marcillac) s'apprête à lancer, il n'y a pas d'assemblage. C'est l'origine des raisins qui détermine leur affectation. Un exemple: seuls les sauvignons récoltés sur des sables ou des sables graveleux composent la première étiquette dénommée Quintet. Ils produisent régulièrement des vins frais et végétaux.
En 1997, Olivier Bourdet-Pees a voulu y introduire de la muscadelle. 'Elle était superbe', explique le responsable du chai. Mais elle a estompé la fraîcheur. 'On nous l'a reproché, reconnaît-il. On aurait pu l'éviter si l'on avait consulté nos clients.' Ce n'est pas dans les habitudes. La cave ne recherche pas d'avis extérieur pour composer ses cuvées, sauf celles de prestige pour lesquelles elle consulte son oenologue. 'C'est peut-être un tort, mais il faut savoir garder son âme.'
Olivier Bourdet-Pees et Jérôme Ossard, responsable du vignoble, déterminent l'essentiel des assemblages. L'oenologue prépare le travail en prélevant des échantillons dans les cuves de son choix. Tous deux les dégustent et les annotent. Partant de là, ils discutent des assemblages possibles, les réalisent à l'éprouvette et les jugent. 'Il est rare que l'on tombe d'accord en moins de deux heures. Rien qu'un petit pourcentage d'une cuve peut sensiblement améliorer ou desservir un vin. Cela est vrai surtout des presses avec lesquelles ça se joue au pour-cent près. Alors, il ne faut pas hésiter à recommencer. Il arrive aussi que des assemblages que l'on pressent bien se révèlent décevants.'
Si les deux techniciens tombent d'accord, Olivier Bourdet-Pees en confie la formule au maître de chai. Ce dernier assemble les vins au moins un mois avant leur mise en bouteilles. Il les prélève dans les cuves d'élevage contenant de 150 à 600 hl et les transfère, à l'hecto près, dans des cuves en fibre de verre épalées de 1 250 hl. Ensuite, il homogénéise l'ensemble en remontant environ 200 hl.
En cas de désaccord, le président de la cave est appelé à trancher entre les deux ou trois assemblages en compétition. Il est également convié aux dégustations devant aboutir à la définition des produits haut de gamme ou des nouvelles étiquettes. A coup sûr, il participera à celle qui définira le premier Hommage à Saint Vincent blanc car il sera, dans sa couleur, le fleuron de la cave.
Cette cuvée existe déjà en rouge depuis le millésime 1998. Aucun impératif de volume de production ne pèse sur elle. La cave s'autorise ainsi des tris sévères. Elle a sélectionné des parcelles de merlot et de cabernet sauvignon parmi ses adhérents. A condition qu'elles ne portent pas plus de 45 hl/ha d'un raisin titrant au moins 12,5% vol, elle assure un revenu de 80 000 F/ha. Malgré cet investissement, elle ne sortira que 20 000 bouteilles du millésime 1998 alors qu'elle disposait d'un potentiel de 35 000 bouteilles. Des cabernets sauvignons ont fait les frais de sa rigueur. Ce cépage ne compose que 11% de l'assemblage final. A ce niveau, il apporte de la fraîcheur. 'On avait les volumes pour monter à 30%, mais on aurait durci et amaigri l'assemblage car les vins logés dans les barriques d'un tonnelier n'ont pas évolué favorablement', explique Olivier Bourdet-Pees.
Une autre cuvée, La Chapelle de Tutiac, le meilleur des vins élevés en cuve, obéit elle aussi en priorité à des impératifs gustatifs. A ces exceptions près, l'essentiel des assemblages doit satisfaire des objectifs commerciaux. Intervient alors un troisième acteur: le responsable commercial de la cave. Il indique à ses homologues techniciens le nombre de bouteilles qu'il lui faut pour satisfaire ses marchés. A eux de les trouver. Tout leur art ne consiste alors plus à choisir et à marier ce qu'ils ont de mieux. Il leur faut tirer le meilleur parti de cuves plus communes. Et cette recherche dure des heures.