Le stage de six mois nécessaire à l'attribution des aides à l'installation peut se dérouler à l'étranger. C'est généralement l'ultime possibilité de découvrir d'autres méthodes de travail, un pays, et surtout de maîtriser une langue étrangère... avant de signer un bail de 18 ou 25 ans.
'Les jeunes reviennent grandis, analyse Josette Piqué, de la chambre d'agriculture de la Gironde. Ils ont vu une autre façon de vivre et, généralement, c'est leur dernière occasion de sortir du contexte familial. ' Le stage de six mois, étape indispensable au parcours de l'installation aidée des futurs exploitants nés depuis le 1 er janvier 1971, peut être une période particulièrement enrichissante, contrairement à ce que pensent un grand nombre de candidats à l'installation, qui préfèrent valider d'autres expériences pour diminuer la durée du stage de six mois. Avant de signer un long bail, ce stage représente, en effet, une belle opportunité pour apprendre une langue et voyager.C'est pour cette raison que les professionnels agricoles ont créé, en 1990, l'association Sésame. Sa vocation est de proposer des stages rémunérés à l'étranger, en exploitation agricole ou en entreprise, d'organiser l'accueil et le voyage, et d'assurer le suivi et la validation du stage. Le candidat peut également trouver un stage lui-même. ' Nos stagiaires sont bien appréciés pour leur technicité en viticulture-oenologie, estime Remi Martinière, responsable du suivi des stagiaires en Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud, Australie et Japon au Sésame. Le problème, c'est qu'ils s'y prennent trop tard et les places sont déjà pourvues. L'idéal est de commencer à chercher un stage à l'étranger six mois avant le départ. ' Le Sésame organise également l'accueil sur place avec deux à trois jours de formation sur les us et coutumes du pays... Parler une langue étrangère, outil indispensable pour exporter son vin, semble être la première motivation au voyage. ' Mon objectif, c'était de savoir parler anglais, puis de connaître d'autres pratiques de vinification, précise Vincent Lignac, futur vigneron à Saint-Emilion (Gironde). Je suis parti onze mois aux Etats-Unis dans une winery de l'Etat de Washington, où l'on m'a confié de plus en plus de responsabilités au fil des mois. A la fin, j'étais responsable du chai à barriques. Après, je suis parti quatre mois au Chili pour parler l'espagnol. C'est vrai que les premières semaines sont parfois difficiles. Au début, la barrière linguistique limite les responsabilités car on ne peut pas diriger une petite équipe sans parler correctement sa langue. On peut aussi ressentir un peu de solitude. Mais cela forme le caractère et ouvre l'esprit. ' Pour faciliter le départ à l'étranger, l'Etat majore le financement du stage de 930 F par mois par rapport à un stage réalisé en France. Dans la plupart des départements, le conseil régional ou général prend en charge une partie du billet d'avion. En Gironde, le conseil régional finance 70 à 80 % du billet d'avion, avec un plafond de 8 000 F, ainsi que le stage linguistique précédant le départ, à hauteur de 2 000 F. Dans le Beaujolais, c'est le conseil régional qui participe aux frais en finançant 60 % du billet d'avion. En Champagne, le Syndicat général des vignerons (SGV) a créé, il y a quatre ans, la convention Jivé (Jeunes installation viticulture étranger). ' Notre but était d'inciter les jeunes à modifier leur approche du stage de six mois, souvent perçu comme une formalité pesante, explique Pierre Cheval, vice-président du SGV. Pour que le frein financier ne soit pas un obstacle, le groupe des jeunes du SGV accorde 500 F/mois au stagiaire. ' Par ailleurs, le Crédit agricole du Nord-Est leur accorde un prêt à 0 % pour 15 000 à 20 000 F, remboursable sur vingt-quatre mois au retour du stage. Outre la peur de l'inconnu, ' le fait que ce stage de six mois ne corresponde pas toujours à la fin des études pose un problème, explique un conseiller Adasea. Les jeunes sont parfois engagés au quotidien dans l'exploitation. ' Actuellement, seulement 10 % des futurs vignerons partent à l'étranger. Mais ce chiffre devrait fortement s'accroître dans les années à venir. L'enthousiasme des anciens stagiaires est un argument de poids. D'autant qu'une bonne partie d'entre eux retournent à l'étranger pour six mois à un an. C'est le cas de Blandine Charpentier, de Vertus (Marne), qui repart bientôt aux Etats-Unis après avoir effectué son stage chez Mondavi, en Californie : ' Lors de mon premier voyage, j'avais envie de découvrir d'autres méthodes de travail, de voyager utile. Cela m'a tellement plu que j'y retourne pour voir une autre structure. ' Quant à savoir ce qui a été le plus dur lors du premier séjour ? ' Dire au revoir peut-être... '