Les candidats à l'installation en dehors d'un cadre familial peuvent faire un stage rémunéré chez un vigneron à la recherche d'un repreneur. Ainsi, ils bénéficient de son expérience et de sa connaissance de l'exploitation. Quant au vigneron, il forme son futur locataire.
Lorsque l'installation se fait dans le cadre familial, le jeune vigneron connaît déjà l'exploitation. Il bénéficie souvent d'un soutien pour débuter. La situation est tout autre pour ceux qui s'installent en dehors du cadre familial. C'est le cas de près d'un quart des jeunes, toutes filières agricoles confondues. Pour les aider à partir du bon pied, les Jeunes agriculteurs de Bourgogne avaient mis en place, avec la chambre régionale d'agriculture, une formule de parrainage. Celle-ci permettait au candidat à l'installation de travailler comme salarié durant six à douze mois chez un agriculteur à la recherche d'un repreneur. Il pouvait ainsi découvrir l'exploitation et affiner son projet avant de prendre une décision.
Cette mesure destinée à faciliter la transmission et l'installation a bénéficié, jusqu'en 2002, du soutien financier du Conseil régional de Bourgogne. Le cédant recevait 950 euros/mois pour l'aider à rémunérer le jeune. En 2003, elle a été reprise au niveau national sous la forme d'un contrat de préinstallation (CPI). Le principe reste le même, mais le jeune a désormais un statut de stagiaire. Il perçoit 650 euros/mois du Cnasea. L'exploitant n'a pas de salaire à payer. S'il le souhaite, il peut compléter l'indemnité de stage ou fournir un logement. Ces compléments seront bienvenus. Les jeunes qui s'installent en dehors du cadre familial ont souvent déjà effectué un parcours professionnel. Ils peuvent avoir une famille. La rémunération de stagiaire est faible par rapport à leurs besoins. Cela, ajouté à la difficulté de se loger, les pousse à s'installer au plus vite plutôt qu'à s'engager dans un contrat de préinstallation.
Les jeunes candidats qui ont choisi cette formule de parrainage ne le regrettent pas. Leur installation a été différée, mais ils ont eu le temps de se préparer. ' J'ai d'abord fait une formation vitivinicole d'un an, au cours de laquelle j'ai rencontré un vigneron qui cherchait un repreneur. Depuis le 1 er janvier 2006, je travaille chez lui. J'ai obtenu une équivalence entre ce stage de parrainage et le stage de six mois nécessaire à la demande de la dotation jeunes agriculteurs (DJA). Si tout va bien, je pourrai m'installer à l'automne ', explique Emmanuelle Cretté.
Cette candidate à l'installation envisage de reprendre en fermage les 13 ha de vignes de son parrain, en coopérative à Montagnac (Hérault). ' Je vais travailler seule. Je n'aurais pas pu prendre en main directement l'exploitation. Je n'ai fait que des stages courts durant ma formation. J'ai besoin d'acquérir de la pratique. ' Son stage de parrainage devrait s'achever en octobre. En dix mois, elle aura vu un cycle complet de la vigne, utilisé tous les outils, abordé l'entretien du matériel, et acquis des connaissances sur les parcelles.
' Je travaille tous les jours avec le vigneron. C'est quelqu'un qui a à coeur de transmettre son expérience. J'apprends beaucoup à son contact, en l'observant et en discutant. Il m'a présenté à la coopérative, aux fournisseurs, au comptable. Je suis bien accueillie. Mais il me faudra quand même faire mes preuves ', souligne Emmanuelle Cretté.
Chaque expérience est différente, car en matière de relations humaines, il n'y a pas de règles définies. Certains stagiaires n'ont pas accès aux comptes ou à la partie commerciale de l'entreprise, d'autres ne trouvent pas l'accompagnement espéré. Mais quand ils s'installent, ils ont tous acquis une expérience et recalé leur projet sur des bases concrètes.
Le stage débouche parfois sur une remise en cause du choix de départ, surtout lorsqu'il s'agit d'une installation en société. Des vignerons en cave particulière sont prêts à s'associer avec des jeunes pour faire face à la diversité des tâches sur l'exploitation. Mais le choix d'un associé n'est pas évident. Le stage peut offrir aux deux personnes l'occasion de se connaître, en travaillant ensemble au quotidien. ' C'est une bonne formule, qui permet de s'engager en connaissance de cause ', estime Francis Gazonnaud, de l'Adasea de l'Hérault.
L'accord de reprise précède parfois le stage. ' J'ai rencontré François Chaillou, le propriétaire, en août 2003, par l'intermédiaire du Cnasea. Il cherchait un fermier, je voulais m'installer. Son domaine m'a séduit. J'ai pris le temps d'évaluer le terroir, les vignes et les vins. Nous nous sommes rencontrés plusieurs fois pour discuter avant de signer, en février 2004, un accord qui fixait les grandes lignes de reprise du bail, du matériel et des stocks. J'ai ensuite fait le stage en sachant vraiment où j'allais ', explique Jean-Marc Renaud.
Durant neuf mois, il a pris progressivement en main le domaine de 7,5 ha, à la Possonnière (Maine-et-Loire). ' Les vignes étaient gérées par le cousin du propriétaire. Il s'est mis en recul. Il m'a laissé faire le travail, en me donnant des conseils lorsque j'en avais besoin. Il m'a guidé pour la première vinification. J'ai également travaillé avec le frère du propriétaire, qui s'occupait du commercial. Il m'a introduit peu à peu auprès des clients. Ils ont accepté, pour la plupart, de me suivre, dans la mesure où le nom et le style des vins ne changeaient pas. ' Grâce à cette période de transition, la transmission s'est faite sans rupture. Dès 2005, Jean-Marc Renaud a pu piloter seul le domaine.