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La solidarité après les inondatio ns dans l'Aude

La vigne - n°115 - novembre 2000 - page 0

Pour aider les producteurs de l'Aude à remettre leurs vignes en état après les inondations, des bénévoles sont venus de toute la France.

Dans l'Aude cette année, les vendanges se sont déroulées dans des conditions climatiques favorables. Les vignerons touchés par les inondations ont savouré ce moment avec une joie particulière, après les épreuves traversées depuis le 12 novembre 1999. Celles-ci laisseront des traces dans les mémoires et dans le paysage, mais aujourd'hui, la vie a repris le dessus. ' Au moment du drame, notre premier réflexe a été de nous rendre dans les villages touchés pour aider ceux qui en avaient besoin. Nous avons d'abord pensé aux sinistrés avant de nous soucier des vignes ', raconte Joël Castany, président de la fédération des caves coopératives de l'Aude. Lorsque tout le monde a retrouvé un toit et que tout danger de nouvelles inondations fut écarté, les vignerons ont pu faire le tour de leurs parcelles et mesurer les dégâts.De nombreux ceps étaient couchés ou arrachés et dans certaines vignes en bord de rivière, les eaux avaient carrément emporté le sol. Dans les caves, les bâtiments et le matériel avaient également souffert. Les pertes sont estimées à 400 millions de francs, dont 150 MF pour les bâtiments, le matériel d'exploitation et de vinification, 250 MF pour les vignes et les chemins. Aujourd'hui, si tous les bâtiments ne sont pas reconstruits, tout le monde a pu vinifier. Dans le vignoble, il reste du terrassement à faire, mais les machines à vendanger ont circulé sans problème. Grâce aux bénévoles, des vignes semblant vouées à l'arrachage ont pu être remises en état et taillées avant le printemps. Cet automne, elles ont donné une petite récolte. Comme le souligne un conseiller, ' tout ce qu'il était humainement possible de faire dans les vignes a été fait '. Il ne devrait finalement y avoir que 500 ha à replanter. Pour les parcelles qui ne pourront pas l'être sur place, le sol ayant disparu, du foncier a été trouvé sur d'autres sites. L'Onivins a dégagé une enveloppe spéciale pour accompagner ces replantations. Les pertes seront couvertes pour partie par les indemnisations du fonds de calamités, les remboursements des assurances, les aides exceptionnelles de l'Etat et des collectivités locales. Des fonds ont également été collectés par le syndicalisme et les organismes agricoles. Dans un premier temps, ils ont été utilisés pour financer l'hébergement des bénévoles. L'argent restant sera réparti entre les vignerons qui en auront le plus besoin. ' Financièrement, le plus difficile est devant nous. Beaucoup d'exploitations étaient déjà fragilisées par le gel de 1998. Dans les deux ou trois ans à venir, ceux qui vont replanter devront supporter le manque à gagner lié à la diminution de leur surface en production. Et si la tendance à la baisse des cours du vin se confirme, cela ne va rien arranger ', souligne Philippe Vergnes, président de l'association des sinistrés. De décembre 1999 à mars 2000, les bénévoles ont réalisé ensemble 18 000 journées de travail. ' Nous avons été impressionnés par la venue de toutes ces personnes. Cela nous a fait chaud au coeur et nous a aidé à reprendre espoir ', affirme Philippe Vergnes. Les agriculteurs de l'Aude qui n'avaient pas été touchés furent les premiers à apporter leur aide. Des vignerons sont venus du Languedoc-Roussillon et des autres vignobles français, voire même au-delà des frontières, d'Espagne et d'Italie. Le réseau syndical a fonctionné à plein. Les partenaires de l'agriculture ont répondu présent : le Groupama, la MSA, le Crédit agricole, de même que les services de l'état. Les particuliers se sont mobilisés aussi. ' Des personnes qui s'étaient engagées avant la tempête et qui ont ensuite été sinistrées elle-mêmes ont tenu à venir malgré tout nous aider ', raconte Jean Héritier, le directeur de la chambre d'agriculture. Au-delà des journées de travail, la solidarité s'est exprimée par de nombreux gestes : des lettres, des dons en nature et en argent, des moments de convivialité, à table après le travail en équipe, ou encore le dimanche pour un match de rugby amical. Elle a largement débordé le cadre local ou agricole, et a même traversé le temps. Les Champenois ont mis un point d'honneur à répondre présent car après la Première Guerre mondiale, les syndicats de vignerons de l'Aude s'étaient mobilisés pour les aider à rebatir leur vignoble dévasté par les combats. A l'heure où l'individualisme s'affiche de plus en plus comme une valeur au sein de la société, la solidarité, collective par essence, n'a pas disparu, bien au contraire. Les vignerons de l'Aude peuvent en témoigner, car ils l'ont vue à l'oeuvre dans la durée, avec une ampleur qu'ils n'imaginaient pas, et qui a répondu à l'ampleur de la catastrophe. ' Nous ne souhaitons à personne de vivre ce que nous avons vécu, mais si cela devait se reproduire ailleurs, nous serions là ', affirment-ils avec force.

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