Dans l'affaire citée ici, la justice a donné tort à des héritiers, attirés par le gain, qui voulaient mettre en zone constructible les parcelles léguées de leur père alors que cela n'était pas prévu dans le Pos.
Aux approches de la zone urbanisée d'une commune, une belle pièce de 6 ha est reconnue par l'Inao comme pouvant porter des vignes d'appellation. Le conseil municipal élaborant son plan d'occupation des sols (Pos) l'inclut dans la zone NC réservée à l'agriculture, où aucune construction n'est envisagée, sauf pour les besoins du chef d'exploitation. Au moment de la mise en place du règlement d'urbanisme, le propriétaire, vigneron de son état, n'avait élevé aucune protestation contre ce classement. Le vigneron est décédé. Dans la déclaration de succession, ses enfants, tous étrangers à l'agriculture, déclarent les 6 ha comme terre viticole sur la base de 10 F/m². Le fisc ne soulève aucune objection.Postérieurement, les héritiers se renseignent : s'ils décidaient de vendre ce bien comme terrain à bâtir, ils le négocieraient trois fois plus cher mais, bien entendu, à condition qu'il soit constructible, et il ne l'est pas. Pour qu'il le soit, il faudrait changer le Pos. Or, un tel document ne s'abroge pas. Cependant, on peut solliciter du maire la révision du document d'urbanisme. L'argumentation des héritiers est simple. Dans l'année qui a suivi le décès du père, ils ont sollicité et obtenu la prime d'arrachage définitif. La terre est dorénavant en friche. De plus, elle borde une autoroute et, chose remarquable, le secteur environnant est mité par des constructions et des lotissements et, du même coup, pourvu de voies et de réseaux divers. Il n'y a donc aucune raison de la maintenir en zone agricole. Cependant, il ne s'agit pas d'aller jusqu'à l'inclure en zone urbaine, mais en zone NA où les lotissements sont autorisés sur 1,5 ha. Développant cette argumentation, ils ont demandé au maire de modifier le Pos en incluant leur terre en zone NA. Celui-ci n'a pas attendu quatre mois pour leur répondre : il a rejeté leur requête. Derechef, ils ont saisi le tribunal administratif en annulation de la décision du maire, demandant, comme la loi le permet maintenant, d'enjoindre au maire de procéder à la révision du Pos dans le sens requis. Le tribunal administratif n'ayant pas fait droit à la procédure instaurée, ils se sont pourvus devant la cour administrative d'appel. C'est là que le débat va prendre toute sa dimension. Dans certains cas, les contestations ont trait à des décisions communales classant en zone constructible des terrains aptes à porter des AOC. Ici, ce sont les propriétaires qui sollicitent que leur terrain agricole soit placé en zone constructible. Devant la cour administrative d'appel, la commune soutenait d'abord l'irrecevabilité de la demande en se fondant sur l'article L 123-4-1 du code de l'urbanisme qui proscrit l'abrogation d'un Pos dûment approuvé. La cour d'appel mettra à néant ce moyen car cet article ne fait pas obstacle à ce qu'un administré y ayant intérêt demande la modification ou la révision du plan, selon les prescriptions de l'article L 123-4 du code de l'urbanisme. Ayant déclaré la procédure initiée recevable, la cour administrative a précisé qu'il appartenait aux auteurs du Pos de déterminer la partie d'aménagement à retenir par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir. Elle ajoute que leur appréciation ne peut pas être censurée par le juge, excepté si elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ou fondée sur des faits matériellement inexacts. Or, aux termes de l'article L 123-18 du code de l'urbanisme, les documents graphiques (soutien du Pos) doivent faire apparaître... ' les zones de richesse naturelle (NC) à protéger, à raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol '. Ce préalable posé, pour la cour, le fait que les terres des demandeurs situées en zone d'AOC aient vu la culture de la vigne interrompue, que le terrain proche de lotissements soit desservi par les voies et des réseaux divers, à proximité d'une grande voie de circulation, n'est pas de nature à établir que le classement des terrains en zone NC soit entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. En conséquence, en l'absence d'illégalité du Pos, le maire n'est pas tenu de procéder à une révision de ce document d'urbanisme.Voilà une décision qui donnera satisfaction à ceux qui se soucient de protéger l'espace viticole contre les empiètements de l'urbanisation. Mais de leur côté, les propriétaires étrangers à la culture de la vigne ne seront pas en mesure de profiter de la plus-value escomptée. Il ne leur reste qu'à vendre les terres à un vigneron ou, pourquoi pas, à les louer. Référence : cour administrative d'appel de Marseille, le 6 mai 1999, affaire : indivision Libeccio.