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Les exigences de la directive Natura 2000

La vigne - n°130 - mars 2002 - page 0

En référé, le président du Conseil d'Etat a empêché la plantation d'une vigne dans un site à priori protégé par la directive Natura 2000.

Dans l'article 1 de la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, et dans la réglementation des contrats territoriaux d'exploitation, deux alternatives existent entre lesquelles le président du Conseil d'Etat, statuant comme juge des référés, a dû faire un choix dans l'affaire analysée ci-dessous : l'installation des jeunes en agriculture et l'amélioration des conditions de production d'une part, les fonctions environnementales avec la protection des ressources naturelles et de la biodiversité d'autre part. En effet, qu'on le veuille ou non, ces objectifs peuvent diverger...
Un jeune vigneron alsacien possède une parcelle susceptible d'être plantée en AOC. Un arrêté ministériel du 6 février 2001 définit le contingent pour les plantations et limite la liste des bénéficiaires. Or, ce jeune Alsacien en fait parti. Son projet se réalise, il obtient une DJA et va planter... Mais non, car une association pour la protection de la nature s'y oppose : elle soumet l'arrêté au Conseil d'Etat et, mieux, introduit devant le président un référé en suspension.
Le magistrat qui rendra la décision est l'un des plus grands juristes de droit public français. C'est dire l'intérêt du débat et de l'ordonnance prononcée. A l'appui de sa requête en annulation, l'association fait état de la directive communautaire 9 243 du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels, dénommée Natura 2000. Le but de cette directive est de protéger l'habitat naturel de la flore et de la faune sauvages, de favoriser le maintien de la biodiversité en tenant compte des exigences économiques.

Natura 2000 oblige les Etats membres à proposer des sites choisis sur leur territoire, où la conservation de l'habitat devra être protégée au bénéfice des espèces sauvages. Et ces sites font échec à l'exploitation agricole. La population de base n'ayant pas manifesté un enthousiasme évident pour Natura 2000, le gouvernement français a tardé à transmettre à Bruxelles la liste des sites retenus : il l'a fait le 15 juillet 1999, mais le texte transmis comportait un vice de forme, entraînant son annulation par le Conseil d'Etat le 22 juin 2001.
Dans sa requête contre l'arrêté attaqué du 6 février 2001, l'association invoquait l'erreur manifeste d'appréciation : pour elle, l'arrêté était en contradiction avec la liste des sites fournie à Bruxelles. Il était développé que les travaux inhérents à une plantation de vignes, précisément les terrassements, porteraient atteinte à l'habitat naturel de la flore et de la faune sauvages. Pour l'association, il y avait urgence, d'où le référé, les conséquences des travaux étant irréversibles.
Au ministre qui faisait valoir que les lieux ne pouvaient être considérés comme site Natura 2000, puisque la communication des sites avait été annulée, le président répondra qu'au moment où l'arrêté a été pris, la liste n'était pas encore annulée et qu'elle n'avait été mise à néant que pour un problème de forme. Le magistrat retiendra donc l'erreur manifeste d'appréciation dans l'arrêté puisqu'il autorise à planter dans un site Natura 2000. Il suspendra les travaux et tout porte à croire que, lors des débats, l'arrêté sera annulé. On est amené à conclure, au vu de la décision rendue, que ' le maintien de la faune et de la flore de type méditerranéen, caractéristique de ces pelouses calcaires et correspondant à des habitats naturels prioritaires au sens de la directive ' est de nature à empêcher les plantations et, semble-t-il, toute activité agricole....

Que reste-t-il du droit de propriété sur ce terrain, un droit pourtant fondamental ? Qu'en est-il du droit de propriété et de son exercice sur des parcelles qui ont été classées comme aptes à porter des raisins d'AOC ? Il y a un décret dans chaque aire d'appellation reconnaissant la qualité fondamentale des parcelles. Pourtant, Natura 2000 peut y faire obstacle. Il faut dire que déjà, il a été jugé qu'une commune, lors de la révision d'un POS, pouvait transférer en zone de protection de la forêt des parcelles reconnues aptes à produire du châteauneuf-du-pape (TA Marseille 28 juin 2001, syndicat d'appellation Châteauneuf). Jugement frappé d'appel...

Conseil d'Etat, ordonnance du 9 juillet 2001, n° 234 555.

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