La Champagne, la vallée de la Loire, la Bourgogne, le Beaujolais ont subi un gel important. Les dégâts sont hétérogènes.
En Champagne, région incontestablement la plus touchée, il faut remonter aux années 1957, 1951, 1936 ou 1930 pour trouver la trace de dégâts d'une telle ampleur. De ce fait, les nuits du 7 au 11 avril se sont avérées cauchemardesques pour les vignerons de cette région. Ils ont vu une bonne part de leur récolte amputée par des températures souvent inférieures à - 6°C, voire - 11° C. Le 7 avril, l'atmosphère et le sol étaient secs quand sont survenues les premières gelées. Elles ont provoqué une première série de dégâts limités au chardonnay, cépage le plus hâtif, dont moins de 20 % des bourgeons primaires ont grillé.
C'était sans compter sur la pluie et la neige qui, en humidifiant l'atmosphère, ont aggravé la situation dans la nuit du 10 au 11 avril. Bien que les températures soient descendues moins bas que les nuits précédentes, elles ont provoqué d'importantes pertes sur l'ensemble du vignoble. Le chardonnay a payé un lourd tribut, perdant 80 %, voire plus, de ses bourgeons dans la Côte des blancs, le Sézannais et le Perthois. Le pinot noir a été lui aussi sévèrement touché dans la Marne et une partie de la Côte des Bar, notamment dans les secteurs précoces où les pertes peuvent aller jusqu'à 50 %. Sur le pinot meunier, bien que moins atteint, on déplore quand même des destructions de 30 à 40 %.
Bilan des courses : la moitié du vignoble a perdu la totalité des bourgeons débourrés au moment des gelées. Actuellement, les contre-bourgeons repartent, mais leurs stades sont hétérogènes. De plus, ils sont beaucoup moins fructifères.
Pas d'euphorie non plus dans le Beaujolais. Même si l'état des lieux reste difficile à dresser du fait de l'hétérogénéité des dégâts, le bilan s'avère plus lourd que prévu. Aucun secteur n'a été épargné par la gelée noire de la nuit du 7 au 8 avril, le thermomètre étant descendu entre - 3 et - 5°C. Les pertes vont de 30 à 80 % selon les parcelles. Mais le plus embêtant est que même les contre-bourgeons ont gelé, d'où une moindre compensation.
Autre région touchée : la Bourgogne. Comme en Champagne, c'est la nuit du 10 au 11 avril qui fut fatale au vignoble de Côte-d'Or. Elle s'est terminée par une gelée blanche qui a particulièrement affecté le chardonnay, mais à des degrés divers selon les parcelles. Dans les cas extrêmes, près de 80 % des bourgeons ont grillé. A Chablis, c'est une gelée noire qui a frappé le vignoble de manière hétérogène. Plusieurs nuits consécutives de gel se sont succédées entre le 4 et le 11 avril, se soldant par la perte de 20 % des yeux en moyenne. A souligner qu'en certains endroits, l'aspersion n'a servi à rien du fait de la force du vent.
Dans la vallée de la Loire, que ce soit en Anjou, dans le Saumurois ou en Touraine, aucune zone n'a été épargnée. Là aussi, les dégâts sont variables. Sur certaines exploitations, les destructions ont atteint jusqu'à 50 %. Les dégâts sont estimés entre 15 et 20 % en Anjou, 20 et 25 % dans le Saumurois et dans le Loir-et-Cher.
' Des bourgeons qui avaient noirci sont repartis et, avec le beau temps, les contre-bourgeons se développent bien. Ces deux phénomènes minimisent les dégât s ', rapporte Stéphane Giry-Laterrière, de la chambre d'agriculture du Loir-et-Cher. L'aspersion a fait plus de mal que de bien, en humidifiant l'atmosphère alors que l'hygrométrie était basse.
Le vignoble du Centre, quant à lui, n'a pas trop souffert, sauf quelques parcelles fortement atteintes, notamment sur Reuilly, Quincy et les Coteaux du Giennois. Dans ce vignoble, les hélices ont été inefficaces du fait de l'absence de différentiel de température entre le niveau des pales et le sol.
Dans le Muscadet, les dégâts sont limités à environ 10 % sur le vignoble. Certaines exploitations ont été plus touchées que d'autres. Même chose dans le Jura, où les pertes seraient au plus de 15 %.
En Alsace, ' on est passé près de la catastrophe ', constate Frédéric Schwaerzler, de la chambre d'agriculture du Haut-Rhin. Dans cette région, ce sont surtout les gewurtztraminers qui ont été touchés. Les dégâts sont variables d'une parcelle à l'autre, mais ont atteint parfois 100 %. Certains bourgeons, partiellement gelés, sont repartis avec les contre-bourgeons. Dans les Côtes du Rhône septentrionales, les dégâts seraient de 12 à 17 %, avec des extrêmes de 0 à 50 %. Enfin, en Poitou-Charentes et en Savoie, les pousses grillées restaient marginales.