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Deux échappatoires à l'ISF

La vigne - n°145 - juillet 2003 - page 0

Un propriétaire qui n'exploite pas ses vignes a deux solutions pour qu'elles n'entrent pas dans le calcul de l'impôt de solidarité sur la fortune : les donner en métayage ou en fermage à long terme. Dans ce dernier cas, il ne peut louer qu'à des proches.

L'article 885 A du code général des impôts (CGI) exclut les biens professionnels de l'assiette de l'ISF (impôt de solidarité sur la fortune) . Selon l'article 885 N du CGI, les biens professionnels sont ceux qui sont ' nécessaires à l'exercice, à titre principal, tant par le propriétaire que par le conjoint de celui-ci, d'une profession c...s agricole '. Concrètement, le propriétaire cultivant ses vignes à titre de profession principale ne les intègre pas dans le calcul de l'ISF. Par un arrêt du 24 novembre 1992, la Cour de cassation a considéré que le propriétaire d'un vignoble, habitant Paris, était bien ' exploitant ' vu qu'il se consacrait à la commercialisation de son produit...
Si le vignoble appartient à une société, ce sont les parts détenues par les sociétaires, personnes physiques, qui sont prises en compte.
Le cas des propriétaires qui n'assurent pas l'exploitation de leur vignoble et le louent est plus complexe. Il convient de distinguer le bail à ferme et le bail à métayage (ou colonat partiaire).
Quand des vignes sont louées en fermage selon un bail de neuf ans, ou tout au moins inférieur à dix-huit ans, le bien n'est pas considéré comme professionnel. Il entre donc dans l'assiette de l'ISF. En revanche, les vignes louées à bail à long terme (en principe, pour plus de dix-huit ans), dans le cadre des articles L 416-1 à 416-9 du code rural, échappent à cet impôt, mais à la double condition, fixée par l'article 885 P du CGI : le bail doit être consenti par le bailleur à son conjoint, à leurs ascendants ou descendants ; le bien doit être utilisé par le preneur dans l'exercice de sa profession principale.

Ici va naître une difficulté, conséquence d'un arrêt de la Cour de cassation du 14 décembre 1999. Un propriétaire avait conclu un bail à long terme avec une société civile composée de son conjoint, de descendants et ascendants. Les juges ont décidé que le propriétaire devait intégrer la valeur de ses terres dans le calcul de son ISF. Pour éviter cette réintégration, la pratique voulait que le locataire, famillier proche titulaire du bail, mette celui-ci à la disposition d'une société, en application de l'article L 411-37 du CR. En présence de ce stratagème, le ministre a répondu, le 7 janvier 2002, que les conditions de l'article 885 P n'étaient pas remplies.
Depuis, sa position s'est modifiée. L'instruction ministérielle du 3 janvier 2003 admet que le fait que le locataire, visé par l'article 885 P du code général des impôts, ait mis le bien à disposition d'une EARL, n'empêche pas que le bien soit considéré comme professionnel, mais à une double condition : la mise à disposition doit être conforme aux impératifs de l'article L 411-37 et le capital de la société doit être détenu à plus de 50 % par les personnes visées à l'article 885 P. De plus, l'exonération n'est accordée qu'à concurrence du pourcentage de participation détenu par les personnes visées à l'article 885 P du CGI, exerçant leur activité principale dans la société. Si le bail à long terme n'est pas consenti à l'une des personnes visées par l'article 885 P, le bien n'est plus reconnu comme professionnel. Toutefois, selon l'article 885 H du CGI, les biens sont exonérés de l'ISF à concurrence des trois quarts de leur valeur, si elle n'excède pas 76 000 euros, et pour moitié au-delà de cette limite. Il faut s'assurer que le bail de dix-huit ans ne prévoit pas la renonciation du preneur à la possibilité de demander l'autorisation de cession à descendant.

Les problèmes liés au bail à métayage sont tout autre. Quelle que soit la durée du contrat, le bien loué est considéré comme bien professionnel (Cour de cassation du 15 juillet 1987). Le bailleur à métayage est coexploitant, et doit donc cotiser à la Mutualité sociale agricole. Il est soumis aux bénéfices agricoles en proportion des recettes tirées de la location. Toutefois, les propriétaires de vignobles aspirant à échapper à l'ISF, en donnant à bail à métayage, ne doivent pas perdre de vue que l'exonération risque de ne pas durer plus de huit ans. Au bout de ce temps d'exploitation, le métayer pourra, en application de l'article L 417-11 du code rural et à sa guise, obtenir la conversion en fermage et, du même coup, faire perdre au propriétaire son avantage fiscal.

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