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Noël Bougrier : 'J'ai ouvert des vendangeoirs'

La vigne - n°148 - novembre 2003 - page 0

Créer un nom, c'est le rêve de tout négociant. Avant de franchir ce pas, Noël Bougrier, en Touraine, a voulu s'assurer d'un approvisionnement suffisant et d'une qualité constante. Il a ouvert des vendangeoirs.

'Si je n'avais pas suivi la stratégie des vendangeoirs, je ne serais plus là pour parler de ma maison de négoce. ' Pour Noël Bougrier, PDG des établissements du même nom, le constat est simple : les Caves de la Tourangelle, créées en 1995, à Saint-Georges-sur-Cher (Loir-et-Cher), marquent le point de départ d'un renouveau. Avant, ce négociant du Val de Loire travaillait de façon traditionnelle : achats de vin, puis revente. Comme tous ses homologues, il était confronté aux aléas de l'approvisionnement. ' Les bonnes années, nous avions du mal à acheter du vin, beaucoup de nos fournisseurs préférant vendre en direct. En revanche, lors des millésimes médiocres, nous avions l'embarras du choix... mais avec des produits difficiles à vendre ! ' Noël Bougrier se souvient des années 90 comme d'un véritable casse-tête. En 1991, le gel provoque une baisse drastique du chiffre d'affaires faute de vin. ' A l'époque, nous réalisions 75 % de notre CA à l'export. Nous sommes tombés à 25 % en 1992. ' Trois ans plus tard, le millésime 1994 arrive en quantité, mais la qualité n'est pas au rendez-vous. Seul bon souvenir de cette période, plusieurs voyages d'affaires dans l'hémisphère Sud. Notre négociant tourangeau découvre d'autres façons d'appréhender le marché du vin. Au même moment, son collègue de Vinival, basé dans le Muscadet, inaugure le premier vendangeoir du Val de Loire. Une petite révolution dans cette région ! La conjonction de tous ces éléments fait réfléchir Noël Bougrier. Rapidement, il est convaincu : il faut miser sur cette stratégie nouvelle.
' La piste marketing me plaisait. Mais lancer un nom ne suffit pas. Il faut le bon produit à mettre derrière , explique-t-il. Le vendangeoir de la Tourangelle a été l'outil qui m'a permis d'avoir le bon produit. '

En 1995, le négociant investit 1 million d'euros pour lancer les Caves. ' Notre objectif était d'atteindre 12 000 hl. Ce qui a été fait en trois ans ', note-t-il avec satisfaction. Vu le montant des capitaux immobilisés, il n'avait pas le droit à l'erreur. ' Nous avions deux inquiétudes. Avoir suffisamment d'apporteurs et des débouchés bien valorisés. ' Pour parer au premier risque, les Caves de la Tourangelle proposent aux vignerons trois durées d'engagement : trois, six ou neuf ans. ' Nous avons eu deux profils d'intéressés. Ceux qui voulaient juste essayer. Ils ont signé, en apport partiel, sur la durée la plus courte. A l'opposé, des producteurs ont vu dans le vendangeoir, l'opportunité de travailler autrement. Ces derniers ont signé pour neuf ans et en apport total. ' Les vins sont payés en fonction de la moyenne des mercuriales publiées par l'interprofession en fin de campagne. Le négociant verse des acomptes trimestriels et solde le tout au terme de l'année viticole.
L'originalité de la démarche, initiée par Noël Bougrier, réside dans les contrats à la parcelle. ' Les vignerons contractent pour une vigne bien spécifique, définie au niveau cadastral et du point de vue de ses critères techniques : âge des plantations, type de plants... Ils s'engagent à respecter les préconisations de notre oenologue sur cette parcelle ', explique-t-il.

Cette maîtrise sur l'amont offre la possibilité d'assurer une traçabilité au raisin. Cela permet aussi de travailler un type de qualité, par exemple en viticulture raisonnée. Autant d'atouts pour convaincre de nouveaux clients. La nouvelle façon d'élaborer les vins permet à la maison Bougrier de mieux valoriser son image. L'opérateur participe à des concours. ' Notre première médaille a été obtenue au Salon des vins de Loire en 1997. Pour l'équipe, c'était une vraie reconnaissance. ' Le dernier millésime issu des Caves de la Tourangelle a reçu deux médailles d'or au dernier concours général agricole.
Satisfait du résultat de Saint-Georges, Noël Bougrier renouvelle la démarche en Maine-et-Loire avec l'inauguration des Caves de l'Angevine en 2001. Aujourd'hui, les transactions en négoce traditionnel ne représentent plus que 50 % des 72 000 hl de vins commercialisés, en moyenne par an. Le reste provient des deux vendangeoirs. A ses clients, la maison propose toute la gamme des vins du Val de Loire. Les appellations de Touraine représentent, à elles seules, 50 % des volumes vendus. L'Anjou-Saumur totalise 20 % et le Sancerrois, 5 %. Les 20 % restants sont des vins du Muscadet. Prévoyant, Noël Bougrier a déjà déposé le nom des ' Caves de la Nantaise '...



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