L'ITV de Nîmes a étudié le lessivage de l'Héliocuivre et de la bouillie bordelaise RSR Disperss. Il confirme le seuil de renouvellement à 25 mm de pluies cumulées, à pleine dose. A 600 g/ha de cuivre, l'Héliocuivre résiste jusqu'à 15-20 mm.
Le cuivre est indispensable pour les vignerons bio. En conduite classique, il est incontournable en fin de saison. ' Il a une longue persistance d'action, ce qui permet de contrôler le mildiou mosaïque. Il est efficace sur les cléistothèces de l'oïdium, sur la pourriture grise par le durcissement des baies, et sur la pourriture acide ', explique Bernard Molot, de l'ITV de Nîmes. Mais il s'accumule dans les sols, et détruit les microbes et les vers de terre. Du coup, depuis 2002, les vignerons bio doivent limiter leurs apports à 8 kg/ha/an. A la demande de l'Itab (Institut technique de l'agriculture biologique), l'ITV de Nîmes a cherché une alternative. Sans succès. ' Nous n'avons rien trouvé, mis à part les purins d'orties et de prêles, dont l'efficacité ne dépasse pas 20 % . ' La seule solution pour limiter les apports, c'est de diminuer les doses. L'ITV y travaille depuis 2001. Son objectif est de trouver un compromis entre la baisse des doses et l'efficacité.
Lors de ses essais, Bernard Molot a constaté que 400 g/ha de cuivre permettent de protéger correctement la vigne, à condition de renouveler les applications tous les 5 à 10 mm de pluie.
' Ce n'est pas raisonnable en pratique. Nous avons donc ciblé une dose de 600 à 800 g/ha avec comme question : jusqu'à quelle hauteur de pluie résiste-t-elle ? ' Pour y répondre, Bernard Molot, avec l'aide de Cyrille Gaimon, élève ingénieur à l'Ensam, a mis en place des essais de lessivage du cuivre sous un simulateur de pluie. Cet appareil permet de s'affranchir du caractère aléatoire des précipitations naturelles. Il génère des gouttes similaires à celles d'une pluie méditerranéenne, à différentes hauteurs et intensités. Les expérimentateurs ont testé deux produits : Héliocuivre (1 200 g/ha de cuivre à pleine dose), de Samabiol, et bouillie bordelaise RSR Disperss (1 500 g/ha de cuivre à pleine dose), de Cerexagri. Ils les ont pulvérisés sur des échantillons de 10 feuilles. Celles-ci ont été placées sous le simulateur de pluie, puis les expérimentateurs ont extrait et dosé le cuivre restant après le lessivage. Premier constat : quelle que soit la dose de cuivre, le lessivage le plus important s'est fait lors des cinq premiers millimètres de pluie. Ainsi dès 2 mm, 25 à 40 % du cuivre sont perdus. Après 5 mm, le taux de lessivage se réduit nettement, et après 50 mm, il reste environ 40 % de la dose initiale. Ces résultats mettent en évidence une solubilisation trop rapide du cuivre. ' Il y a un gaspillage de cuivre dès les premiers millimètres de pluies. L'idéal serait d'avoir une libération du cuivre progressive et non hyperbolique. Aux industriels de voir comment ils peuvent améliorer les formulations ', considère Bernard Molot.
Autre observation : c'est le cumul des pluies qui a expliqué, à lui seul, le lessivage d'Héliocuivre et de la bouillie bordelaise RSR Disperss. En effet, les expérimentateurs n'ont pas vu de différence de lessivage pour une pluie de 5 mm aux intensités de 15, 35, 60 et 90 mm/h, quelle que soit la dose de cuivre. De même, une pluie continue de 30 mm et trois pluies successives de 10 mm chacune sont équivalentes.
L'intervalle de temps entre le traitement et le lessivage n'a pas eu non plus d'influence, selon que la pluie est intervenue deux heures ou sept jours après l'application. ' Un délai de sept jours n'a pas d'impact mais, au-delà, on ne sait pas. Dans la nature, quand un cuivre est appliqué début véraison, il a une persistance d'action jusqu'en octobre ', pense Bernard Molot.
Autre résultat intéressant, à dose de cuivre équivalente, Héliocuivre a eu une résistance au lessivage légèrement meilleure que la bouillie bordelaise RSR Disperss.
Toutes ces données ont permis d'établir un modèle théorique du lessivage. Les expérimentateurs ont effectué des simulations, afin de définir des seuils théoriques de renouvellement des traitements, selon la dose de cuivre appliquée. A pleine dose, le seuil de renouvellement d'Héliocuivre et de la bouillie bordelaise RSR Disperss se situe autour de 25 mm, ce qui est cohérent avec les préconisations de terrain. A 600 g/ha, le seuil d'Héliocuivre passe à 15-20 mm. Toutefois, ces valeurs sont à moduler en fonction de la vitesse de croissance de la vigne, et ne sont pas transposables aux autres formulations de cuivre. De plus, ces résultats méritent d'être validés sur le terrain.