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Les régions diminuent l'offre...

La vigne - n°157 - septembre 2004 - page 0

La nature redevient généreuse, mais les marchés demeurent en panne... Pour éviter un trop grand déséquilibre entre l'offre et la demande, des syndicats d'appellation freinent leurs rendements et leur disponible à la vente.

Le mot d'ordre est général : ne pas produire plus que les ventes. Dans le Médoc, le message a été délivré dès mars, ' vu les statistiques de commercialisation... ', explique Vincent Fabre, président du syndicat de l'appellation. A l'approche de la date des vendanges, la volonté d'éviter la surproduction en 2004 a gagné toutes les régions, même celles où les marchés demeurent porteurs - comme en Alsace, ou en Provence grâce aux rosés - la maîtrise des rendements est au rendez-vous.

Dans les vignobles où il y a mévente, c'est parfois un sévère tour de vis qui est donné à la production. Par exemple, en Côtes du Rhône, le syndicat compte demander 45 hl/ha pour les régionaux et 40 hl pour les villages. ' Cette mesure d'exception ', comme le rappelle Francis Fabre, directeur du syndicat, correspond à une baisse de 10 hl/ha pour les Côtes du Rhône et de 5 hl pour les Côtes du Rhône Villages par rapport aux niveaux autorisés lors des vendanges 1999 !
Ces rendements font penser à ceux des vins doux naturels, si ce n'est qu'eux aussi sont à la baisse : le muscat-de-rivesaltes devrait passer de 27 à 25 hl/ha, et seuls 20 hl/ha sont autorisés à la vente... Ces rendements d'appellation très bas, joints à des cours peu rémunérateurs, risquent de pousser les producteurs vers d'autres vins que les AOC (voir Cahors). Le phénomène risque d'être d'autant plus important que, l'an passé, les marchés des vins de table et de pays ont été favorables.
Plus au nord, la situation est plus complexe, car la vendange s'annonce généreuse. En Touraine, le syndicat s'est voulu réaliste. Il souhaite un rendement autorisé pour les rouges de 65 hl/ha, soit 5 hl de plus que l'an dernier. ' Cela correspond à ce qu'il y a sur la vigne ', constate Alain Godeau, responsable du syndicat. Faute de pouvoir agir fortement sur les rendements, les professionnels de l'appellation ont décidé la mise en place d'une réserve : interdiction de mettre sur le marché plus de 58 hl/ha. Ainsi, la récolte comprise entre ce niveau commercialisable et le rendement effectué dans la limite de ce qui est autorisé doit rester en réserve jusqu'à ce qu'une décision collective permette son déblocage.
L'objectif d'un tel dispositif est de créer une rétention des volumes mis sur le marché, de façon à éviter un engorgement, et donc un effondrement du prix. La Touraine, le Roussillon, la Savoie et surtout le Bordelais jouent cette carte pour tenter de relancer les affaires. A Bordeaux, l'interprofession a décidé, pour les appellations rouges, la mise en réserve de tous les volumes produits en 2004 au-dessus de 50 hl/ha.

Ces volumes vont s'ajouter à ceux déjà en réserve au titre de 2003, puisqu'aucun déblocage n'a été décidé pour l'instant. Les chiffres officiels indiquent : 620 000 hl en Bordeaux, 220 000 hl en Côtes, et 160 000 hl en Médoc et Haut-Médoc. Il est difficile d'évaluer à combien s'élèvera la prochaine réserve, puisque cela va dépendre des niveaux de rendements autorisés par l'Institut national des appellations d'origine.
Reste que le syndicat des bordeaux et bordeaux supérieur compte demander 58 hl/ha pour les génériques rouges et 55 hl pour les bordeaux supérieurs. Si ces niveaux de production sont atteints, on peut estimer à 390 000 hl les volumes mis en réserve au titre de 2004. A cela s'ajoutent les vins déjà en réserve au titre de 2003, soit plus d'un million d'hectolitres rien que pour les appellations Bordeaux.
Outre les difficultés inhérentes au stockage des vins (en termes de place dans les chais, de coûts financiers...), l'idée d'un maximum commercialisable a également une incidence sur le budget du vigneron. ' Vu les coûts de production et les niveaux actuels de prix sur le marché du vrac, un producteur ne peut pas s'en sortir avec 50 hl/ha à Bordeaux, sauf s'il est engagé dans des contrats de partenariat. .. ', reconnaît un négociant.

Pour certains, les dispositifs de mise en réserve correspondent à une fuite en avant : un jour ou l'autre, les volumes bloqués finissent par ressurgir sur le marché... La seule possibilité de rééquilibrer à terme ce dernier passe alors par la distillation, à moins qu'une catastrophe climatique - comme le gel en 1991 - permette d'écouler le trop-plein en stock. De là à espérer un tel événement... ' Nous avons peu d'outils économiques pour rétablir l'équilibre d'un marché, explique un responsable interprofessionnel. La législation nous interdit formellement tout accord sur le prix.
Dès lors, on ne peut agir que sur les volumes mis en marché . ' Dans ces conditions, les réserves sont ' le pire des régimes, même s'il n'en n'existe pas de meilleur... '
Le problème est que les conditions de conservation des vins ne sont pas toujours optimales...
Là encore, il est important de verrouiller l'organisation du déblocage en soumettant, par exemple, les volumes finalement mis sur le marché à un agrément différé, comme c'est le souhait du Syndicat de Touraine. Gérer les volumes est une chose, s'assurer de leur qualité en est une autre.

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