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Un nouveau critère d'achat des vins

La vigne - n°158 - octobre 2004 - page 0

Les Anglo-Saxons ont ouvert la chasse à l'oxygène dissous dans les vins, pour préserver les arômes. Les opérateurs se soumettent à leurs exigences. Ils les répercutent sur les caves et les viticulteurs.

'Le vin se fait, se mûrit. En d'autres termes, il passe de l'état de vin jeune à l'état de vin vieux presque exclusivement par l'influence de l'oxygène de l'air ', affirmait Louis Pasteur en 1864. Mais les vins aux arômes d'oxydation, ou d'élevage, sont passés de mode. Aujourd'hui, les acheteurs recherchent des vins frais, fruités, qui séduisent les consommateurs.
Ils font donc la chasse à l'oxygène, et fixent des normes de plus en plus drastiques à leurs fournisseurs. Les Anglais, les premiers, ont formulé des exigences, ' dans un premier temps sans parvenir à les imposer, car aucun fournisseur n'était équipé pour contrôler l'oxygène dissous dans les vins ', explique Stéphane Yerle, de la société OEnodev. Très vite, les Australiens ont relevé le gant. Ils ont réalisé les investissements nécessaires pour répondre à leurs clients. Ils se sont placés sur les marchés. La pression commerciale s'est alors accentuée. Les Français doivent s'y mettre.
La cave coopérative de Limoux, dans l'Aude, fait partie des premiers opérateurs français à s'être lancés. ' Selon nos clients, la limite qu'on nous impose oscille entre 0,8 et 1,5 mg/l maximum en sortie de boucheuse, pour les rouges comme pour les blancs ', explique Guilhem Marty, directeur technique. Il applique ces consignes sans trop savoir pourquoi elles diffèrent d'un opérateur à l'autre. ' Je suppose que les Anglo-Saxons ont plus de recul que nous sur le sujet ', poursuit-il. Comme la mesure de l'oxygène dissous lors d'une intervention sur le vin doit être faite dès qu'elle est terminée, les clients doivent faire confiance aux caves. Mais ils gardent un oeil sur elles et n'hésitent pas à les auditer régulièrement.

Petit à petit, les opérateurs reportent ces exigences vers l'amont. Le 16 juin dernier, les Grands Chais de France ont réuni leurs fournisseurs à Florensac, dans l'Hérault, pour leur annoncer cette intention. Dans un premier temps, ils leur ont demandé de mettre en place un bilan de dissolution de l'oxygène durant leur travail du vin. Après une année transitoire, ils subordonneront leurs achats au respect de critères très stricts : pas plus de 0,8 mg/l d'oxygène dissous dans les vins blancs, juste après le chargement des citernes, jusqu'à 1 mg/l dans les rouges. ' Quand j'achète un vin, c'est que je pense qu'il plaira à mes clients , justifie Bruno Kessler, responsable des achats vins aux Grands Chais de France. Ma priorité, c'est qu'il reste tel quel jusque dans la bouteille. ' L'oxygène dissous au moment du chargement de la citerne de vrac devient un véritable critère d'achat, comme le degré, ou l'acidité volatile.
Pour répondre à ces obligations, les viticulteurs ont encore peu de soutien technique. Ils peuvent s'appuyer sur des travaux menés par l'Inra. Un conseiller, la société OEnodev, leur propose un service d'audit des process. La démarche étant complexe et les matériels de mesure coûteux, toutes les caves ne peuvent pas s'équiper. C'est aux laboratoires d'oenologie de prendre le relais. D'autant qu'il ne faudrait pas tomber dans l'excès inverse du tout réducteur : les vins ont besoin d'oxygène à des moments précis.
' Nous manquons encore d'évaluation de la valeur ajoutée de ces techniques protectrices par rapport à leur coût , regrette Stéphane Yerle. Le véritable gain est peut-être d'avoir une qualité homogène sur toute la production ', et d'éviter ainsi l'une des principales sources de réclamation et de déception du client.


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