La production viticole a demandé le soutien des syndicats agricoles généralistes pour plaider sa cause auprès des pouvoirs publics. Une première qui s'explique par le caractère exceptionnel de la crise.
C'est bien la première fois que les syndicats viticoles en appellent au soutien des organisations agricoles généralistes. Le 8 novembre, l'AGPV(1)a envoyé une lettre ouverte à l'ensemble des organisations agricoles. Objectif : demander leur soutien dans les revendications adressées aux pouvoirs publics. Deux jours plus tard, la FNSEA et les JA (Jeunes agriculteurs) se joignaient à l'AGPV pour lancer un appel à manifester. Ils ont aussi répondu présent lors de la conférence de presse organisée à Paris, à la veille des manifestations. Cette réunion exceptionnelle est une réponse à la situation d'exception. La crise viticole devrait même s'aggraver selon Pierre Aguilas, président de l'AGPV : l'offre, française comme communautaire, est en hausse et la demande en baisse. Mise à part la Champagne qui surfe sur le marché des bulles, tous les vignobles sont plus ou moins touchés par la mévente. ' A Bordeaux, il y a entre 500 et 1 000 exploitations en grande difficulté , a rappelé Christian Paly, président de la Cnaoc. Nos entreprises sont familiales. Ce sont des micro-PME. Si elles ne sont pas aidées, elles disparaîtront. '
A court terme, les syndicats demandent des aides à la trésorerie (10 000 euros pour les exploitations en difficulté), un complément national d'aide à la distillation et un réexamen des modalités d'allégement des charges sur les emprunts, les cotisations sociales et foncières. Les JA souhaitent le maintien de l'enveloppe pour les aides à la reconversion (8 000 euros/ha).
En plus de ce volet ' d'urgence ', la profession demande l'arrachage temporaire et l'amplification de la restructuration. A cela s'ajoute la nécessaire réforme de l'OCM (Organisation commune du marché) du vin. ' Il faut changer le régime de gestion de crise. L'article 29 sur la distillation est peu utilisé par la France. En revanche, l'Espagne en profite du fait de ses prix de revient plus bas ', a expliqué Xavier de Volontat, président des Vif. La profession souhaite aussi une meilleure utilisation des fonds européens pour la promotion.
Comme l'a rappelé Jean-Michel Lemétayer, président de la FNSEA, ' la crise actuelle est économique, mais aussi morale '. Si le premier aspect touche le portefeuille, le second blesse l'honneur d'une profession. ' Les vignerons vivent très mal la mise à l'index de l'Inpes. Cette communication laisse entendre que toute consommation, même modérée, est dangereuse pour la santé. c...s L'application stricte de la loi Evin a fait interdire la publicité de Bordeaux dont le slogan était : ' Boire moins, mais meilleur ', a rappelé Christian Paly. ' Il n'y a qu'en France où l'on voit de telles attaques contre le vin , a renchéri Pierre Aguilas. Il faut arrêter la vente du vin s'il donne le cancer . ' Une expertise juridique est en cours pour analyser les recours en justice possibles contre la campagne de l'Inpes .
La mise à l'index ressentie par la profession est d'autant plus incompréhensible que le Livre Blanc sur la place du vin dans la société avait été bien accueilli par le Premier ministre. ' Nous demandons toujours la mise en place d'un Conseil de la modération. Cela permettra à la profession, en collaboration avec les pouvoirs publics et les associations antialcooliques, de travailler sur la prévention. Nous demandons aussi l'amendement technique de la loi Evin pour communiquer dans le cadre de nos interprofessions. Nous pensions avoir avancé sur ces sujets au début de l'été. Aujourd'hui, nous sommes confrontés au silence assourdissant des pouvoirs publics. ' Un silence auquel des milliers de vignerons ont répondu en clamant leur colère dans les rues.