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Des associations aident les vignerons en situation difficile

La vigne - n°160 - décembre 2004 - page 0

Des associations, créées par des agriculteurs, accueillent ceux dont les difficultés s'accumulent. Elles leur apportent un soutien moral. Elles les aident à monter un dossier Agridiff, pour obtenir des mesures d'allégement des dettes. Exemple dans le Roussillon, dans le Muscadet et en Beaujolais.

'Après avoir essuyé une succession de grêle et de gel, nous avons eu des difficultés de trésorerie. La banque nous a accordé un warrant qui s'est alourdi d'année en année. Nous n'arrivions plus à régler les factures, et nous ne savions pas où trouver de l'aide. C'est une agricultrice du canton, élue à la chambre, qui nous a parlé de l'association 4 A. Là, nous avons pu expliquer notre situation et monter un dossier Agridiff ', raconte Renée Raynaud, de Saint-Paul-de-Fenouillet (Pyrénées-Orientales). Roland, son mari, cultive 45 ha de vignes. Elle travaille à l'extérieur pour compléter les revenus de la famille.
Depuis son installation, Roland n'a cessé d'investir pour s'agrandir et restructurer. Mais, en 2000, son exploitation est au plus mal. Après diagnostic, elle est jugée redressable. ' Cela nous a redonné confiance. Nous avons reçu une aide de l'Etat de 5 300 euros en 2001 et de 5 500 euros en 2003. Ce n'était pas suffisant pour repartir tout de suite du bon pied. Mais nous avons obtenu un échéancier auprès de nos fournisseurs, et amélioré peu à peu notre trésorerie. En 2007, nous aurons remboursé nos emprunts, il nous restera à solder le warrant. J'espère que nous y arriverons, et que notre fils François, qui vient de s'installer sur 15 ha, ne traversera pas les mêmes difficultés ! '

L'association 4 A accompagne depuis 1993 les agriculteurs en difficulté. Paul Crabié y travaille à mi-temps, en plus de son activité de vigneron. Sa tâche principale est de monter les dossiers Agridiff : ' Je contacte le comptable, le technicien agricole, la banque et les créanciers. Nous examinons ensemble la situation . Je discute ensuite avec l'exploitant des points qui peuvent être améliorés. Nous établissons un plan d'actions, puis je défends son dossier devant la commission départementale. Si la situation est jugée redressable, une aide financière est accordée. Elle permet une prise en charge partielle des intérêts des prêts à moyen et long terme. '
Les vignerons qui viennent le voir ont surtout des dettes à court terme. ' Agridiff n'est pas très bien adapté à leur situation. Mais le passage en commission rassure et oblige les créanciers, ce qui facilite l'adoption de mesures de restructuration de l'ensemble des dettes. Si la situation est prise à temps, cela peut suffire pour redémarrer, à condition bien sûr que les cours du vin ne se dégradent pas. ' Pour aller plus loin, il faudrait pouvoir constituer une équipe qui accompagne les exploitants durant la phase de redémarrage. Mais les moyens manquent. En Loire-Atlantique, le Bureau commun d'accueil et d'orientation, une association, accompagne depuis 1991 des agriculteurs en difficulté. Il traite 600 à 700 dossiers par an.

Il a participé à la mise en place du nouveau plan professionnel, qui prévoit d'inciter à l'arrachage et d'offrir des diagnostics d'exploitation à celles qui le demandent. ' Nous avons réalisé une série de réunions dans les cantons pour informer les vignerons de tout ce qui est entrepris. Ceux qui se posent des questions sur leur avenir peuvent demander un diagnostic. En fonction des thèmes d'actions qui ressortiront, nous constituerons des groupes de progrès avec un accompagnement. Les viticulteurs qui en ont besoin pourront être orientés vers une procédure Agridiff, mais seront intégrés dans les groupes de progrès. C'est important de briser l'isolement ' , explique Serge Dupé, l'un des deux permanents de l'association. Il va coordonner les centres agréés qui réaliseront les diagnostics d'exploitations.
' Pouvoir parler de ce qu'on vit est indispensable. En 2002, une chape de silence s'est abattue sur le Beaujolais. De nombreux producteurs n'ont pas pu vendre leur vin, mais personne n'a rien dit ! Avec d'autres viticultrices, nous avons décidé de réagir ', raconte Martine Morion, de Blacé, dans le Rhône. Ces femmes ont diffusé une plaquette intitulée ' Osons en parler ', et organisé des réunions dans tout le vignoble. Pour continuer, Martine Morion a choisi de s'engager dans l'association Aid'Agri 69, créée en 1997 pour accompagner les agriculteurs en difficulté.
Avec un autre bénévole, elle accompagne des viticulteurs auxquels elle offre un temps d'écoute et de partage. ' J'ai aussi des difficultés sur mon exploitation, je comprends ce que les autres vivent. Pour tenir, certains ont dû vendre des parcelles. Les femmes, quand elles le peuvent, prennent provisoirement un emploi à l'extérieur, et les hommes se retrouvent seuls dans les vignes. C'est dur, mais pouvoir en parler, être écouté, cela aide à ne pas perdre pied. Cette année, les ventes se font à nouveau plus difficiles, mais nous le vivons différemment. Nous sommes dans l'action, nous avons retrouvé une solidarité, et cela change tout ! '


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