Pour obtenir un PLC, des appellations ont dû fixer des procédures d'agrément plus contraignantes. Celles qui voulaient utiliser le PLC pour réguler les marchés se sont fait refouler, dès lors que leur rendement maximum dépassait le rendement de base.
Sous la pression du ministère de l'Agriculture, les appellations ont dû ' prendre leurs responsabilités '. Elles ont réduit les rendements, après le succès modéré de la distillation de crise. Au Comité national de l'Inao du mois de septembre , le mot d'ordre était de se limiter au rendement de base figurant dans le décret. Finis les PLC (plafonds limite de classement) collectifs. Finis également les PLC individuels accordés sur de simples critères agronomiques.
Ces principes généraux ont connu des exceptions en Bourgogne, mais se sont appliqués à Bordeaux. ' C'est la première fois que l'obtention d'un PLC individuel est subordonnée à des critères qualitatifs, et non plus seulement agronomiques ', remarque Pierre Langlade, à l'Inao de Bordeaux.
Les producteurs souhaitant récolter 54 hl/ha de bordeaux ou 51 hl/ha de bordeaux supérieur devront faire agréer leur récolte cuve par cuve. S'ils se contentent du rendement annuel de base (51 et 49 hl/ha), ils pourront continuer à présenter des lots moyens à l'agrément.
Les modalités concrètes de mise en place de cet agrément cuve par cuve sont encore en réflexion. Par exemple : si toute la cave n'est pas agréée d'un coup, bloque-t-on l'ensemble des vins, en attendant que tous soient agréés ou seulement les cuves refusées ? ' Comment surtout financer cette mesure ? s'inquiète Pierre Langlade. Cela demande des moyens logistiques, humains et financiers considérables. ' Il estime que si le PLC individuel suscite l'enthousiasme des producteurs, le syndicat se retrouvera à gérer cinq fois plus d'échantillons qu'actuellement. Mais pour le Syndicat des bordeaux et bordeaux supérieur, seulement le quart des viticulteurs de l'AOC devrait y souscrire, notamment parce qu'il faudra payer 30 euros par cuve, en plus des frais habituels d'agrément.
Margaux, Pauillac, Saint-Julien et Saint-Estèphe ont également opté pour un renforcement de l'agrément. Ces appellations se sont calées sur la procédure expérimentée dans le Médoc et Haut-Médoc. Elles ont choisi de rapprocher l'agrément de la commercialisation. L'élément déclencheur de l'agrément serait l'expédition d'une cuve en vrac ou la mise en bouteilles. Le lot agréé serait celui expédié ou conditionné. Quant aux producteurs de Saint-Emilion, ils peuvent obtenir un PLC individuel sous réserve d'avoir un degré moyen de 11,5 % vol. et de se soumettre à un agrément renforcé, ' peut-être sur le modèle médocain ', indique le syndicat.
Le Syndicat de Cahors souhaitait également obtenir un PLC individuel, conditionné à des critères qualitatifs. Selon cette demande, un viticulteur devait récolter avec un degré moyen de 12 % vol. sur toute sa cave, et ne pratiquer aucun enrichissement, pour produire 60 hl/ha. Sinon, il ne pouvait récolter que 50 hl, le rendement de base du décret. Le syndicat s'est fait refouler. ' Le comité national a jugé excessif le rendement de 60 hl ', justifie Hervé Briand, directeur-adjoint de l'Inao. Le syndicat d'appellation devrait représenter cette demande au comité national de novembre, en révisant à la baisse le rendement maximal.
D'autres appellations voulaient subordonner l'obtention d'un PLC individuel à des critères purement économiques. C'est le cas notamment de Fronton et de Gaillac. Leur objectif : ne pas pénaliser les exploitations qui fonctionnent bien et qui n'ont plus rien à vendre, au prétexte que les voisins vont mal. Gaillac voulait que seuls les vignerons dont les ventes sont en progression sur les deux dernières années, puissent prétendre au PLC. Fronton souhaitait le même type de critère. Mais ces deux appellations ont demandé un rendement maximal supérieur au rendement de base du décret. Avant même le comité national, le Crinao a rejeté leurs demandes. ' Le rendement comme le PLC ont des vocations qualitatives, l'Inao ne peut statuer que sur ces critères ', insiste Hervé Briand. En clair, ces appellations qui souhaitent produire plus que le rendement de base du décret, auraient dû fixer des critères qualitatifs pour le PLC.
Seules les appellations dont le rendement annuel maximal ne dépasse pas le rendement de base du décret ont pu mettre en place un PLC conditionné à des critères économiques. Elles respectent ainsi les consignes du ministère, tout en instaurant une régulation interne des volumes. C'est le cas des Côtes du Ventoux, qui autorisent la production maximale de 50 hl/ha, dont 20 hl/ha de PLC, et des Côtes du Luberon qui admettent 55 hl/ha, dont 10 hl/ha de PLC. Ces deux appellations ont mis en place une réserve qualitative : les hectolitres produits au-delà du rendement de base de l'année seront mis en réserve.
Les deux syndicats ont envisagé plusieurs possibilités, au choix, pour débloquer ce vin. La première consiste à s'engager à réduire la surface revendiquée en appellation pour l'année, ce qui évite d'augmenter l'offre globale. Ainsi, une cave en Côtes du Ventoux pourra libérer son PLC, si elle ne revendique que 40 % de sa surface éligible en appellation. Sur ces 40 %, elle pourra produire 50 hl/ha. Elle pourra aussi libérer son PLC si elle vend 100 % en bouteilles ou si elle justifie de contrats de partenariats avec le négoce. La réserve pourrait également être débloquée fin 2006, si la récolte est faible.
A Madiran, le syndicat a opté pour un système similaire. Le rendement de base de l'année est ramené à 54 hl/ha (contre 55 hl dans le décret). L'Inao a accordé un PLC individuel de 5 hl/ha. En contrepartie, les viticulteurs doivent mettre en réserve tout ce qu'ils produisent au-delà de 50 hl. Ils pourront libérer les vins selon des critères économiques, qui sont encore en cours d'écriture. En attendant, ' l'interprofession va demander le blocage des certificats d'agrément au-delà de 50 hl/ha ', indique Cécile Neihouser, directrice du syndicat. Cette même mesure sera retenue par les Côtes du Ventoux et les Côtes du Luberon.