Après avoir constaté un déficit de plus de 45 000 , Jean Amouroux a décidé d'arracher 30 ha. A présent, il vend toute sa production au négoce.
Jean Amouroux, du domaine Amouroux, à Tresserre (Pyrénées-Orientales), exploitait 72 ha de vignes jusqu'en 2005. Il y produisait trois types d'AOC : Côtes du Roussillon, Rivesaltes et Muscat-de-Rivesaltes. Il vendait une partie de sa production au négoce, l'autre étant écoulée en bouteilles. ' Mais sur le marché des bouteilles, je me heurtais à de grosses structures, du genre cave coopérative, qui vendaient moins cher que moi, expose-t-il. La grande distribution m'a étouffé. J'ai commencé à ne plus avoir aucune visibilité . ' Après avoir fait ses comptes, il a décidé d'arracher 30 ha en avril 2005. ' Le Rivesaltes connaît une crise économique depuis sept à huit ans. Les Côtes du Roussillon, qui se portaient assez bien jusqu'à peu, se sont effondrées. Enfin, le Muscat-de-Rivesaltes qui marchait bien jusqu'à l'année dernière s'est lui aussi écroulé . ' Par conséquent, en 2004, son revenu est passé dans le rouge. ' J'ai perdu 45 700 euros. Mes coûts de production sont de 3 500 à 4 000 euros/ha. Or, mon revenu brut est de 2 500 à 3 000 euros/ha. C'était la première fois en trente ans de carrière que j'étais déficitaire. J'ai donc décidé de m'alléger et de me recentrer . '
Il a sélectionné les parcelles selon deux critères : cépages et organisation de travail. Il a gardé les cépages à fort potentiel aromatique, plus porteurs sur le plan commercial : grenache noir, syrah, mourvèdre, muscat, marsanne, vermentino. Il a éliminé le carignan et le grenache blanc. De même, il a privilégié les parcelles où les coûts de production sont les plus faibles : terrains proches du siège de l'exploitation, d'un seul tenant, où les vendanges mécaniques sont possibles.
Au niveau commercial, il a arrêté les ventes en bouteilles. Il va écouler toute sa production en vrac au négoce, grâce à ses partenariats. ' Comme j'ai des relations privilégiées avec certains négociants, si je vinifie comme ils le souhaitent, ils m'achèteront tout mon vin , confie-t-il. Par contre, la grande inconnue est le prix. ' Mais Jean Amouroux prévient que si cette année encore, il est déficitaire, il arrachera à nouveau.
Sur ses 72 ha, il travaillait avec trois salariés. Depuis qu'il a arraché, il n'en emploie plus qu'un à temps plein et des saisonniers. ' L'un d'eux est parti, car il voulait s'installer seul. Le second m'a également quitté. Je n'ai donc pas eu de frais de licenciement . ' Le but de Jean-Pierre Lagauzère est d'être suffisamment mécanisé pour faire tous les travaux lui et son salarié.
Lorsqu'il a arraché, ses voisins ont été surpris. ' Tout le monde considérait mon domaine comme une exploitation modèle, confie-t-il. Je suis bien mécanisé, j'ai sept tracteurs, un superbe chai... Personne ne s'y attendait. Mais tous les gens du village ont compris que si j'arrachais, c'est que je n'avais pas d'autre solution . '
Aujourd'hui, Jean Amouroux ne regrette pas sa décision : ' Mon exploitation est beaucoup plus adaptée, plus cohérente. L'organisation est plus simple, les tâches moins longues. Je finis par exemple mes vendanges beaucoup plus tôt, et je n'ai presque pas de personnel à gérer, puisque la machine à vendanger passe sur 90 % de ma superficie. Ça change tout ! '