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Roussillon, les Côtes débordent

La vigne - n°139 - janvier 2003 - page 0

Le plan Rivesaltes, destiné à relancer les vins doux naturels, a eu un effet pervers. Il a entraîné une augmentation massive des volumes revendiqués en Côtes du roussillon. En 2002, les producteurs en ont subi les conséquences.

En 2002, l'appellation Côtes du Roussillon a souffert. La baisse des cours, amorcée en 2001, s'est accentuée. En trois ans, l'évolution de l'encépagement et les reconversions liées à la mise en oeuvre du plan Rivesaltes ont entraîné une augmentation des volumes déclarés de près de 100 000 hl. Les débouchés n'ont pas progressé au même rythme. Les stocks ont augmenté, atteignant quatorze à seize mois de vente. Le besoin de trésorerie a amené les vignerons à céder sur les prix. De 2001 à 2002 (années glissantes arrêtées à la fin novembre), les cours moyens du vrac sont passés de 89,26 euros/hl à 83,15 euros/hl, ce qui représente une baisse de 7 %.
' Les relations de confiance avec le négoce s'effritent. Les sorties de chai progressent légèrement, mais les engagements sur de nouveaux contrats sont en recul , constate Bernard de Roquette-Buisson, président du syndicat des Côtes du Roussillon. Cet été, nous avons réalisé un inventaire qualitatif des stocks chez les vignerons volontaires qui ont déclassé, en vins de table, 25 000 hl de vins présentant des défauts de conservation. Pour la récolte 2002, nous avons demandé aux producteurs d'être sélectifs et de ne déclarer que les meilleures parcelles. Le millésime est hétérogène, il est important de trier pour conserver un bon niveau qualitatif. '

En 2001, la récolte en Côtes du Roussillon s'élevait à 260 000 hl. Les premières évaluations laissent penser que les volumes déclarés en 2002 vont baisser de 75 000 hl, ce qui devrait rééquilibrer l'offre et la demande, et stabiliser les cours. Mais, à moyen terme, l'enjeu reste de continuer à progresser en qualité, en améliorant les prix et en gagnant des parts de marché, le potentiel de production de l'AOC n'étant pas atteint. ' Les ventes en GMS ne représentent que 10 % des débouchés actuels. Tout reste à faire pour développer les Côtes du Roussillon dans ce secteur ', souligne-t-on au CIVR (Conseil interprofessionnel des vins du Roussillon).
Les Côtes du Roussillon villages résistent mieux et maintiennent leurs cours, qui s'étagent entre 102 et 152 euros/hl (prix moyens au cours des douze derniers mois, arrêtés en novembre 2002), suivant les dénominations communales. Le collioure poursuit son développement, avec un prix moyen de 213 euros/hl. ' Notre richesse, c'est la diversité de nos terroirs. Le fossé se creuse entre ceux qui savent les identifier et les mettre en avant, et ceux qui continuent à raisonner avant tout en termes de volume et d'écoulement ', constate un responsable professionnel.
Les cours des vins doux naturels se sont stabilisés à 140 euros/hl pour l'AOC Rivesaltes et 105 euros pour l'AOC Grand Roussillon, mais rien n'est gagné pour autant. Les ventes en rivesaltes ont reculé et les stocks ont progressé. Le nombre d'acheteurs reste réduit et les débouchés concentrés sur les GMS, avec un positionnement en entrée de gamme.
L'arrivée du négociant bourguignon Boisset, qui a racheté les marques de Martini, pourrait contribuer à faire sortir les vins doux naturels de l'univers des apéritifs pour rejoindre celui des vins tranquilles. ' Il y a quelques réussites individuelles, avec des rivesaltes haut de gamme très bien valorisés, qui ouvrent la voie ', souligne Jean-Luc Pujol, nouveau président de l'Association de promotion des vins du Roussillon.
Le banyuls et le muscat-de-rivesaltes restent des valeurs sûres, avec des cours à 252 et 214 euros/hl. ' Sur le marché du muscat, nous sommes dans une phase de consolidation après trois ans de progression. Nous avons déjà absorbé les deux tiers des volumes supplémentaires liés à la reconversion, mais nous devons rester prudents. Cette année, pour préserver la qualité, il fallait trier la vendange. Beaucoup l'ont fait, mais nous serons vigilants au niveau des agréments ', affirme Alain Touzaa, président du syndicat.
Estimée à 1,35 Mhl, tous vins confondus, la récolte 2002 devrait être équivalente à celle de 2001, qui était inférieure de 17 % à la moyenne. ' La pression phytosanitaire est restée vive pendant toute la campagne, et les pluies ont perturbé les vendanges. La tramontane a ensuite assaini la situation ', commente Alain Halma, de la chambre d'agriculture. Avec cette deuxième petite récolte et des cours stables ou en baisse, la situation financière d'une bonne partie des exploitations reste délicate. Pour accompagner ceux qui sont en difficulté ou ceux qui veulent arrêter, les responsables professionnels cherchent des solutions. En 2002, une procédure d'arrachage définitif ciblé a été demandée, mais sans succès.

Dans le même temps, d'autres vignerons s'installent ou poursuivent leur développement. ' Au premier semestre 2002, nous avons connu un fort tassement des cours. En même temps, il s'est vendu des cuvées à 100 euros/col, un prix élevé qui ne s'était jamais vu dans notre région. Ceux qui réussissent révèlent le potentiel de nos terroirs. Avec le vignoble existant, il est possible de faire de grands vins. Mais pour les vendre à un prix rémunérateur, il faut investir dans le commercial, et aller à la rencontre des clients ', affirme Jean-Luc Pujol. Dans ce domaine, les solutions ne peuvent pas être uniquement collectives. ' L'interprofession plante le décor, mais elle ne fait pas vendre les vins. Il faut des acteurs sur scène. A nous de nous prendre en main et de monter des projets commerciaux ', ajoute Alain Touzaa.

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