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Nouveau Monde : ' On n'a pas baissé les bras '

La vigne - n°170 - novembre 2005 - page 0

La maison Pascal Bouchard est partie à la conquête du marché anglais au moment où l'offensive du Nouveau Monde s'accélérait. Malgré cela, elle a réussi.

En 1995, Pascal Bouchard, propriétaire et négociant à Chablis (Yonne), décide de se développer en Grande-Bretagne, où il est absent. Il embauche Marc-Emmanuel Cyrot, fraîchement diplômé de l'Ecole supérieure de commerce de Dijon. Le jeune homme a déjà fait ses armes sur le marché britannique. Il s'y est rendu à plusieurs reprises pour présenter les vins du domaine Cyrot-Buthiau, dont il est copropriétaire. Il sait que personne ne l'attend, et que ' les Français ressentent durement l'arrivée du Nouveau Monde '. Aussi prépare-t-il avec soin chacun de ses déplacements. ' Je ne suis jamais parti à l'aventure ', confie-t-il, mais avec un carnet de rendez-vous complet et des échantillons plein le coffre de sa voiture.

Quinze jours après avoir rencontré les Britanniques, il relance systématiquement ses prospects. Peu à peu, la Grande-Bretagne devient le premier marché d'exportation de Pascal Bouchard, maison qui exploite 32 ha et en vinifie 160 à 180 ha.
Marc-Emmanuel Cyrot reconnaît qu'il avait un atout : Chablis, ' une appellation qui est une marque fantastique. Cela nous a permis de conserver des positions fortes '. Il précise que ses premiers concurrents sont de Chablis ou de Sancerre. ' Nos acheteurs affrontent le Nouveau Monde plus directement que nous. '
Pour s'implanter, ' il a fallu trouver les personnes qui croient dans les vins de France et dans le chablis. Il a fallu être auprès d'eux, leur montrer qu'on ne les abandonnait pas face aux initiatives du Nouveau Monde, qu'on ne baissait pas les bras et qu'on n'avait aucun complexe. ' Il explique à ces opérateurs qu'ils ne peuvent pas se passer de chablis. ' Ce vin sec et minéral est le plus populaire de France. Il correspond au goût des Anglais ', répète-t-il. Ses contacts reprochent aux Français leur manque de présence sur le terrain. Lui y passe quinze jours par mois. Irréprochable. Ils critiquent les variations de prix des chablis, face aux sages hausses pratiquées par les Australiens ou les Américains. Il en tient compte et lisse ses changements de tarifs. On lui vante le dynamisme commercial du Nouveau Monde. Il monte des opérations promotionnelles, offrant des remises ou des bouteilles gratuites aux consommateurs, ou encore des cadeaux aux forces de vente.

Dernièrement, son entreprise a réagi au reproche de complexité qu'on lui adressait, comme à tous les Français. ' Les acheteurs nous disaient qu'il fallait proposer quelque chose de différent ', indique Marc-Emmanuel Cyrot. Dès 1996, Pascal Bouchard dépose le nom ' Bouquet chardon ' pour désigner un vin plus simple d'accès que ses chablis de terroir. Mais d'autres priorités l'éloignent de ce projet. La maison lance le nouveau vin en 2004.
Pour comprendre leur demande, Marc-Emmanuel Cyrot se rend dans des supermarchés. Il voit des consommateurs perdus face aux vins de France. Le voilà convaincu : il faut une bouteille ' qui attire l'oeil et qui apporte l'information capitale '. Pour satisfaire ces exigences, le verre est blanc, la capsule de surbouchage en aluminium, l'étiquette indique en grand : ' Bouquet Chardon ', surmontant la mention ' chardonnay pur et non boisé '. Toutes les autres informations sont au second plan. Il faut tourner la bouteille pour remarquer qu'il s'agit d'une appellation Bourgogne. Elle est vendue au public entre 5,49 et 7,49 £/col, alors que les chablis affichent de 7 à 10 £/col. L'affaire fonctionne et les ventes décollent.
En 1998, Marc-Emmanuel Cyrot devient directeur commercial de Pascal Bouchard. Il voit qu'à ' force de se focaliser sur le Nouveau Monde, on a oublié qu'en Allemagne et aux Etats-Unis, c'est l'Italie et l'Espagne qui progressent '. Plus que jamais : ' Le boulot de commercial, c'est d'être à l'écoute des marchés ' !

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