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Dom Pérignon : vigneron et gestionnaire hors pair

La vigne - n°171 - décembre 2005 - page 0

Dom Pérignon accordait un soin tout particulier aux vendanges et à l'assemblage. Sous sa direction, les vins de l'abbaye d'Hautvillers étaient les plus réputés de Champagne. Mais rien ne prouve qu'il a inventé le champagne.

On l'appelle le père spirituel du champagne. Dom Pérignon était à coup sûr ' un vigneron avant-gardiste ', un négociant habile et un gestionnaire hors pair. Mais a-t-il vraiment ' inventé ' le champagne ? A-t-il découvert le secret permettant de faire, au choix, du vin blanc mousseux ou non ? Nul ne le sait. ' C'est un sujet sur lequel on a tout dit, sans jamais rien prouver ', écrit René Gandilhon dans son livre sur le moine bénédictin. La légende dépasse la réalité.
Né en 1638, dans une famille aisée (son père est conseiller royal) de Sainte-Menehould (Marne), Pierre Pérignon entre à l'âge de 13 ans au collège des Jésuites de Châlons. A 18 ans, il embrasse l'ordre bénédictin à Verdun, puis rejoint l'abbaye de Saint-Pierre d'Hautvillers dans la vallée de la Marne. Pendant quarante-sept ans, il y exerce la fonction de cellérier (intendant), puis celle de procureur, c'est-à-dire de fondé de pouvoir. Il dirige le travail des vignes et assure la gestion du domaine, depuis la production jusqu'à la commercialisation. Au fil des ans, il regroupe le vignoble.

Sous sa houlette, la superficie exploitée par les religieux passe de 21 arpents (10,72 ha) en 1663, à 48 arpents en 1712. Ses contemporains louent les vins de l'abbaye d'Hautvillers. Ils comptent parmi les plus réputés de Champagne avec ceux de Aï et Silleri. Selon Le Grand dictionnaire universel du XIX e siècle, de Pierre Larousse, Dom Pérignon ' avait une extrême finesse de goût, il s'appliquait à combiner divers crus de la Champagne de façon à obtenir des vins plein de délicatesse '. Son secret réside dans une extrême exigence quant à la qualité du vin. ' Il faut mépriser la quantité qui ne fait que du vin très commun, et viser toujours la qualité qui fait bien plus d'honneur et de profit ', aurait-il déclaré. Il préconise ' une taille tardive et courte, le provignage, la rognure et l'ébrouage immédiatement suivi de la liure '.
' Ses recherches ont d'abord porté sur le choix des meilleurs cépages, puis sur l'obtention d'un excellent vin gris, c'est-à-dire un vin blanc très pur donné par pressurage de raisins noirs et sur la maîtrise de la mousse ', écrit René Gandilhon à son sujet.
Dom Pérignon apporte un soin tout particulier aux vendanges. Il exige qu'elles s'opèrent en trois fois, afin d'obtenir une meilleure maturité des grains. Les cueillettes successives, rapides et réalisées à la fraîche, sont destinées à des vins différents : gris, paillé ou rouge. Il goûte les raisins quelques jours avant la récolte et organise les vendanges. ' Le père Pérignon ne goûtait pas les raisins aux vignes, mais il se faisait apporter les raisins (...), précise son successeur. Il n'en faisait la dégustation que le lendemain matin à jeun, après leur avoir fait passer la nuit à l'air sur sa fenêtre, jugeant du goût selon les années. ' Il compose ensuite ses cuvées selon ce ' goût '. En cave, il aurait trouvé ' la manière de faire le vin blanc mousseux et le moyen de l'éclaircir sans être obligé de dépoter les bouteilles '.
Dom Pérignon est élu doyen de l'abbaye en 1708. Il disparaît en 1715, à l'âge de 77 ans. Il est enterré dans le choeur de l'église abbatiale, ce qui confirme le rôle essentiel joué de son vivant. On lui attribua ' quantité d'innovations ', du bouchage au liège, en passant par la modification des formes des bouteilles, ou l'invention des flûtes à champagne. Sans doute à tord.

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