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Le traitement à chaud de la vendange a le vent en poupe

La vigne - n°176 - mai 2006 - page 0

Dans les caves du Languedoc, de la vallée du Rhône et du Bordelais, le traitement à chaud de la vendange a le vent en poupe. Certaines choisissent la flash- détente, d'autres la thermodétente ou la thermovinification. Toutes veulent obtenir des rouges colorés, fruités et ronds.

'Le marché à l'exportation veut des vins de garde, à boire tout de suite, constate Bruno Maillard, directeur de la cave La Malepère, à Arzens (Aude). Or, avec nos terroirs, impossible d'obtenir des rouges très mûrs, ronds et gras par une vinification classique. ' En 2004, après différents essais, la cave acquiert une unité de flash-détente. Le but est de monter en gamme pour satisfaire des négociants détenteurs de marques internationales. Pour cela, la cave doit adapter la grille des objectifs de maturité des raisins. Elle augmente les degrés de 0,5 à 1 % vol. pour les cépages concernés, en particulier le merlot et le cabernet. Elle renforce les consignes d'hygiène des bennes à vendange.

Après le passage en flash-détente, les raisins macèrent deux à trois jours en cuve, puis sont pressés. Aujourd'hui, 30 000 hl subissent la flash-détente, sur les 200 000 hl produits chaque année. ' L a flash-détente a représenté un gros investissement, mais c'est aussi la solution qui laisse le plus de revenus à nos adhérents , explique Bruno Maillard. Ils peuvent faire le rendement maximal autorisé en vin de pays d'Oc (80 hl/ha). Avec la flash-détente, on extrait assez de matière pour avoir de beaux produits, concentrés et gras, sans tanins agressifs. Cela nous permet de rester dans le haut de la fourchette des prix de vente. '
Il y a deux ans, la cave de Corneilhan (Hérault) s'est également équipée d'une chaîne de prétraitement de la vendange. ' L'outil de vinification qui nous était utile il y a trente ans, était devenu inadapté aux vins et aux raisins d'aujourd'hui ', explique Etienne de Parzia, directeur. L'évolution des marchés l'a conduit à abandonner son vinificateur continu. Ce sont 30 000 hl de vin rouge pour lesquels Etienne de Parzia a dû trouver un nouveau schéma de vinification.
La cave a eu l'occasion de voir fonctionner le procédé de thermodétente de Brunet Ertia et de goûter les produits traités. Ce matériel l'a convaincue. Les raisins égrappés sont chauffés à 70°C environ, soumis à une pression (1 à 4 bars), puis à une détente et mis à macérer une quarantaine de minutes. Ce procédé permet d'extraire la matière colorante, les tanins et les arômes des raisins. Ensuite, on presse et on filtre à chaud, puis le jus est ramené à la température souhaitée pour le début de la fermentation.

' Il est possible de piloter de nombreux paramètres et d'obtenir des profils de vins différents, poursuit Etienne de Parzia. D'une part, nous améliorons nos produits basiques, à base de carignan et cinsault. Car l'extraction est plus poussée sans que les tanins soient plus agressifs. Nous avons pu les orienter vers des produits de type primeur, avec des notes amyliques. D'autre part, nous obtenons des vins de cépages très ronds, fruités et sans goût herbacé. Dans notre cas, les résultats sont meilleurs qu'en thermovinification ou encore qu'en vinification traditionnelle ', déclare Etienne de Parzia.
La fermentation en phase solide du même volume aurait nécessité de quadrupler le nombre de cuves. Or, les locaux ne le permettaient pas. L'investissement global, comptant l'appareil de thermodétente, le groupe de chaud et de froid, les deux filtres rotatifs et la cuverie s'élève à un million d'euros. Un montant inaccessible aux caves particulières.
Pour un traitement à chaud, beaucoup de caves font appel à des prestataires de service. ' On note un petit retour des macérations préfermentaires à chaud, ou du thermotraitement, chez les vignerons indépendants ', observe Estelle Dessup, oenologue au Centre oenologique de Grézillac (Entre-deux-Mers). Ils veulent plus de fruit, plus de gras et de couleur qui tiennent dans le temps. La vendange éraflée, parfois saignée, est chauffée à 75°C à coeur, puis refroidie en quelques heures. Ensuite, elle fermente entre 20 et 24°C pour développer un maximum de fruit. Le chauffage à 75°C élimine les goûts végétaux et détruit la laccase du botrytis.

Les vinificateurs apprécient ces avantages. Mais le chauffage et le refroidissement des raisins sont gourmands en énergie et donc chers. Si bien qu'on les réserve souvent aux meilleures vendanges. Les cuves ainsi obtenues servent en assemblage.
' Lorsqu'on sortira de cette passe économiquement difficile, on verra d'importants investissements en thermovinification ou flash-détente ', assure Pascal Henot, responsable du Centre oenologique de Coutras (Gironde).
Certaines caves ont déjà franchi le pas : celle de Ruch (Entre-deux-Mers) est sur le point de s'équiper en thermovinification, la cave des Hauts de Gironde a investi au cours de l'année 2005 et la coopérative de Bergerac-le-Fleix s'est décidée en 2004.
En vallée du Rhône, ' plutôt que d'investir dans un atelier de cuverie traditionnelle, les caves achètent de la flash-détente , note Christophe Reboul, chez Fabbri, ajoutant : 2002 est passé par là . ' Cette année-là fut marquée par un état sanitaire déplorable de la vendange. Mais dans cette région, l'objectif premier n'est pas d'effectuer des traitements curatifs, mais d'accéder aux marchés porteurs.
Inter-Rhône vient d'ailleurs de mener des essais comparatifs des différentes techniques de flash-détente, macération préfermentaire à chaud et à froid. ' La flash-détente coûte cher, mais les gains en couleur et en matière sont significatifs, et tous les producteurs ont le souci d'améliorer leur qualité moyenne ', assure Bernard Ganichot, oenologue conseil d'Inter-Rhône.

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