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Traçabilité : une mise en place à plusieurs vitesses

La vigne - n°181 - novembre 2006 - page 0

Les caves ne sont pas toutes aussi avancées en matière de traçabilité. Si certaines adhèrent totalement au concept, d'autres bloquent face à une rigidité réglementaire parfois inadaptée.

«Tout le monde ne met pas en place la traçabilité à la même vitesse », constate Laurence Hugou, de l'ICV (Institut coopératif du vin) de Brignoles (Var). Les caves qui étaient déjà en démarche de qualité ne rencontrent aucun problème. A l'opposé, certaines subissent la législation, et s'y mettent contraintes et forcées. « Les coopératives qui travaillent beaucoup en vrac, se sont bien adaptées , détaille Françoise Dijon, d'Inter-Rhône. Par contre, au niveau des caves particulières, c'est très variable. Cela dépend de leurs partenaires commerciaux. » Laurence Hugou relève même « quelques chais qui n'appliquent la traçabilité que sur une cuve ou deux, celles choisies par les acheteurs ».
Pour toute la filière, le principal moteur de la traçabilité reste la pression du marché. « Les acheteurs imposent les démarches de qualité pour se couvrir de tout risque, explique Françoise Dijon. En cas de problème, ils veulent en retrouver l'origine, retirer les produits défectueux et reporter la faute sur le responsable, si nécessaire. Les acheteurs ont des exigences de plus en plus poussées en la matière. » Elles sont si fortes que l'absence de traçabilité peut faire perdre des marchés. Le temps est révolu où sa mise en place garantissait des débouchés. Désormais, il s'agit au mieux d'un argument commercial supplémentaire.
Les caves les plus avancées sont satisfaites d'avoir franchi le pas. Avec le recul, elles considèrent la traçabilité comme un outil d'amélioration, permettant de remonter au point litigieux du process de culture ou de vinification, et ainsi essayer de régler un éventuel problème l'année suivante. « Ce n'est pas qu'un outil d'inspection pour les fraudes », rappelle Laurence Hugou.
Les difficultés rencontrées lors de la mise en place de la traçabilité sont toujours les mêmes. « Elles sont liées au métier même de vigneron », précise Françoise Dijon.

Il faut pouvoir suivre, avec une rigueur extrême, les volumes, les assemblages, les appellations, les millésimes, les couleurs, « et même différentes qualités, complète Laurence Hugou. C'est la segmentation de l'offre, très importante dans la filière qui multiplie les difficultés ». Cette multiplicité des produits entraîne une hausse proportionnelle des informations à consigner.
Par ailleurs, « cette segmentation n'est pas vraiment prévue dans la réglementation trop rigide », précise Laurence Hugou. Des problèmes apparaissent, par exemple, lorsqu'en hiver, le vin se rétracte sous l'action du froid. Il faut faire les pleins des cuves. En traçabilité où il faut une transparence totale, l'opération doit être enregistrée. Que faire lorsqu'on ouille la cuve avec un vin d'une qualité différente, ce qui est monnaie courante dans les chais ? « Il y a un décalage entre les besoins qualitatifs du vin et la législation », explique Laurence Hugou. De même, il reste souvent quelques litres de dépôt au fond des cuves. Là encore, ce cas n'est pas prévu par la législation. L'opérateur peut ainsi cumuler des pertes de volumes sans pouvoir fournir d'explications au moyen de sa traçabilité.
On trouve également des problèmes au niveau des ressources humaines. « Trop souvent, le dispositif ne repose que sur une seule personne , note Laurence Hugou. Le système de traçabilité est alors fortement compromis si celle-ci quitte l'entreprise. » C'est fréquent lors de l'utilisation d'un logiciel, où les personnes maîtrisant réellement cet outil sont peu nombreuses.
Par ailleurs, des difficultés liées à l'origine des raisins existent. « Dans certaines grosses caves, on se retrouve vite avec une parcelle ne représentant que 1 ou 2 % de la cuve finale , remarque Françoise Dijon. Il faut raisonner la pertinence des informations que l'on retient. La traçabilité pour la traçabilité ne rime à rien. »
A chacun de voir si sa démarche doit, en priorité, être orientée vers l'administration, l'acheteur ou une utilisation personnelle.

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