Retour

imprimer l'article Imprimer

ACTUS - RÉGIONS

BORDEAUX Retour sur un drame

Propos recueillis par A. A. - La vigne - n°241 - avril 2012 - page 12

Le 2 mars, Michel Maës, viticulteur à Langoiran (Gironde), a été condamné pour homicide involontaire par imprudence suite au décès d'un adolescent tombé dans l'une de ses cuves enterrées en octobre 2008.
Michel Maës

Michel Maës

LA VIGNE : Comment avez-vous accueilli le jugement ?

Michel Maës : C'est dur d'être condamné à une peine de prison de 18 mois, même si c'est avec sursis. Je pense que les juges ont préféré forcer sur cette peine, quitte à nous infliger une amende moins élevée (5 000 euros, NDLR), vu notre situation économique. Et puis, vis-à-vis de la famille de la victime, il fallait une peine qui ait du sens…

Pensez-vous que ce type de drame peut arriver dans la plupart des chais ?

M. M. : Je pense que quand on a passé toute sa vie sur une exploitation familiale agricole, on a du mal à voir le danger. C'est peut-être parce que notre lieu de travail se confond avec notre lieu de vie. Or, il faut distinguer les deux. Dans un chai industriel, c'est évident de fermer le local quand la journée de travail est finie… Sur une exploitation familiale, il faut y penser. Il faut mettre en place des procédures de sécurité. Par exemple, d'habitude je protège l'ouverture de la cuve enterrée où le drame s'est produit avec un couvercle. Seulement, ce jour-là, je ne l'ai pas mis. Probablement la fatigue… C'était la fin des vendanges… En cas de surmenage, il faut savoir s'arrêter et prévoir des contrôles sur les points essentiels. Il faut vraiment changer son état d'esprit. Avec ce drame, j'ai appris des règles que je ne connaissais pas. Par exemple, une cuve doit être clôturée, comme une piscine. Nous l'avons fait. Même chose avec l'installation de bloc secours lumineux pour montrer les sorties (1). On applique le code du travail au pied de la lettre.

Après le drame, le contenu de la cuve dans laquelle est tombé le garçon n'a pas été jeté. Cela vous a été reproché…

M. M. : Ne pas avoir jeté ces 30 hl de moût en fermentation a été interprété comme si nous ne voulions pas perdre de l'argent. Les gens n'ont pas compris qu'on était en état de choc ! Si quelqu'un m'avait fait penser à jeter cette cuve, bien sûr que je l'aurais fait ! Seulement, dans les jours qui ont suivi, j'étais perdu. Je courrais partout. J'essayais de faire le point avec les assureurs, de prendre conseils pour savoir ce qui allait se passer. Il fallait aussi être présent auprès de nos enfants… Je ne me suis pas du tout occupé du chai et le maître de cave a procédé aux remontages puis aux assemblages comme à son habitude…

En quoi ce qu'il s'est passé le 25 octobre 2008 a changé votre vie ?

M. M. : Aujourd'hui, je pense plus souvent aux risques d'accident. Je n'hésite pas à rappeler les consignes plusieurs fois. Actuellement, j'ai une jeune stagiaire sur l'exploitation qui se forme à la conduite de tracteur. Je lui répète qu'il faut privilégier de s'arrêter sur un terrain plat, penser à abaisser l'outil, tourner à plus de deux mètres d'un fossé… Je reste vigilant même dans la routine.

(1) On parle aussi de BAES (blocs autonomes d'éclairage de sécurité) qui montrent les sorties de secours.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :