Premier département producteur de vi n blanc sous IGP, le Gers exporte une grosse partie de ses volumes, en vrac comme en bouteilles. « Nous estimons que nous vendons 60 à 70 % de notre production à l'étranger, indique Alain Desprats, directeur du Syndicat des producteurs de vins Côtes de Gascogne. Le Royaume-Uni est sans doute le premier client, suivi de l'Allemagne, des Pays-Bas et de la Belgique. Les ventes sont également significatives en Scandinavie. »
Alain Desprats avance avec prudence, car le côtes-degascogne ne bénéficie pas d'un code douanier. « Selon nos opérateurs, les marchés de l'Union européenne et de l'Asie se développent. Et le marché canadien (Québec et Ontario) nous reste très fidèle. »
Depuis 2011, les côtes de Gascogne communiquent à l'étranger sous la bannière de l'interprofession des vins du Sud-Ouest (IVSO). En 2012, celle-ci a mené deux campagnes, l'une au Royaume-Uni et l'autre en Allemagne. La même année, elle a ouvert une Maison des vins du Sud-Ouest à Londres, où des dégustations et des master class sont organisées. En 2013, l'IVSO devrait consacrer 450 000 euros en communication en Angleterre et en Allemagne et 400 000 euros au Canada et aux États-Unis. Des projets se mettent aussi en place pour l'Asie et une Maison des vins pourrait ouvrir en Chine.
Producteurs Plaimont, l'un des deux gros opérateurs de Gascogne, n'a pas attendu ces opérations pour s'attaquer à l'export. 55 % des 38 millions de bouteilles qu'il produit tous les ans partent à l'étranger. « Mais cela ne représente que 45 % de notre chiffre d'affaires, car nous exportons essentiellement de l'IGP Côtes de Gascogne, moins cher que les AOC Madiran ou Saint-Mont que nous vendons en France », confie Étienne de Resseguier, responsable export sur la zone Europe.
Le blanc sec, bon ambassadeur
« L'IGP Côtes de Gascogne séduit les jeunes, reprend-il. Il nous a permis de nous implanter en Grande-Bretagne, notre marché vitrine, mais aussi en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas. Une fois que nous sommes connus avec nos blancs secs, nous pouvons présenter des rouges plus complexes. » La Société des alcools du Québec fait également partie des plus anciens clients de l'entreprise. Aujourd'hui, Plaimont se tourne vers les pays de l'est de l'Europe comme l'Ukraine, la Lettonie et la république Tchèque. Pour la Russie, l'entreprise verra plus tard. Elle préfère conquérir des satellites de cet immense pays.
Depuis plus de quinze ans, Plaimont est aussi présent en Chine. C'est aujourd'hui son quatrième marché à l'export. Le groupe s'attaque désormais aux pays voisins de l'Asie du Sud-Est et s'intéresse à l'Amérique du Sud et à l'Afrique. Quant aux États-Unis, il s'agira d'un « prochain enjeu ».
L'autre poids lourd de l'IGP Côtes de Gascogne, la société Caves et vignobles du Gers (CVG), est spécialisé dans la vente de vrac. 70 % des 500 000 hl qu'elle commercialise partent à l'étranger. « Nous touchons les grands marchés d'Europe du Nord, explique Franck Clavier, directeur général du groupe coopératif Vivadour, dont CVG est une filiale. Nous y sommes en concurrence avec l'Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande, l'Australie et l'Argentine. Depuis deux ans, nous présentons notre offre au salon du vrac d'Amsterdam (World Bulk Wine). Cela nous permet de nous ouvrir sur d'autres pays : Russie, Chine, Inde… »
CVG offre à ses clients la possibilité de bâtir leurs propres assemblages à partir de cinq cépages. Chacun se décline en cinq à sept qualités différentes , si bien que les clients disposent d'une trentaine de composants pour faire leur choix. « Nous leur demandons de s'engager sur un volume pendant trois ans et nous leur garantissons un goût identique durant cette période, poursuit Franck Clavier. La grande distribution est très satisfaite de notre proposition, mais les négociants sont plus frileux à cause du contrat à long terme. » CVG vise une valorisation du col à 0,75 euro en moyenne, contre 0,60 euro généralement. Une réévaluation « tout à fait raisonnable », selon le directeur général.
Nombre de vignerons indépendants travaillent également à l'export. Parmi les plus importants, Alain Brumont produit 2 millions de cols de côtes-de-gascogne et 1,3 million de madiran. Il réalise 60 % de ses ventes à l'export. Il compte se développer au Brésil et aux États-Unis. Il s'attaquera ensuite à l'Asie.
Tahiti aussi
Nadège Fontan exploite le domaine de Maubet avec son frère Sylvain (900 000 cols par an). Elle se souvient de l'époque où ses parents vendaient toute leur production à l'export. « Aujourd'hui, nous sommes redescendus à 55 % car nous avons développé la France. Nous sommes bien implantés en Europe du Nord ainsi qu'au Canada et aux États-Unis. Nous nous y rendons tous les ans dans le cadre d'opérations collectives pour garder le contact avec nos acheteurs. »
Nouveau venu, le domaine Villa Dria n'exporte que depuis deux ans. L'entreprise a commercialisé 100 000 bouteilles en 2012, dont un tiers environ à l'export en Europe, Amérique du Nord et, depuis peu, à Tahiti. Magali Buffomène, l'attachée commerciale, revient de deux salons en Chine où elle a rencontré des acheteurs. Comme ses confrères, elle a bon espoir de s'y développer.
Le Point de vue de
Emmanuel Lagrave, vigneron à Aurions-Idernes (Gers), adhérent de Producteurs Plaimont, produisant 38 millions de cols exportés à 55 %.
« Comme vigneron, j'ai été bien reçu »
« J'ai passé une semaine à Montréal fi n octobre. J'ai accompagné une personne de l'agence AOC et compagnie à qui la Société des alcools du Québec (SAQ) achète les vins de la cave de Crouseilles (Pyrénées-Atlantiques), affiliée à Producteurs Plaimont. Nous avons visité une dizaine de magasins par jour. Je me déplaçais avec une petite sacoche, remplie de bouteilles, de documents de communication et de photos de mes vignes et du château de Crouseilles. Il s'agissait pour nous de faire déguster nos vins aux responsables des boutiques pour leur rappeler que nous existons.
Chaque magasin possède désormais un rayon Sud-Ouest de trois à quinze références, mais la SAQ commercialise 7 000 crus. Difficile de se faire une place si on ne communique pas. Les responsables des boutiques nous ont très bien accueillis.
Ils ont pris le temps de nous recevoir, de goûter les vins et de me poser des questions sur ma façon de travailler. Nous étions mieux reçus que d'autres commerciaux venus sans être accompagnés d'un vigneron. J'ai aussi passé une journée sur un salon à Montréal organisé par l'interprofession des vins du Sud-Ouest où nous avions un stand. Nos clients, comme les consommateurs, aiment rencontrer les producteurs. Et pour nous, sortir le nez des vignes permet aussi de réaliser l'ampleur de la concurrence dans le monde entier. »