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VIGNE

Les pièces en carbure ont la vie dure

MARTIN CAILLON - La vigne - n°254 - juin 2013 - page 44

De plus en plus de viticulteurs équipent leurs outils de travail du sol de pièces d'usure en carbure de tungstène. Ils passent ainsi moins de temps à entretenir leur matériel.
AMEL PERCHER a équipé son cadre Actisol de pièces en carbure pour renforcer toutes les dents. Il était déjà converti au carbure depuis dix ans pour ses grandes cultures. © GAEC PERCHER

AMEL PERCHER a équipé son cadre Actisol de pièces en carbure pour renforcer toutes les dents. Il était déjà converti au carbure depuis dix ans pour ses grandes cultures. © GAEC PERCHER

Les pièces d'usure au carbure de tungstène, largement répandues en grandes cultures, sont encore assez peu utilisées en viticulture. « On découvre le marché viticole », déclare Thierry David, gérant de la société A.DI. Carbures, spécialiste du secteur, basé dans la Vienne.

« Nous disposons d'une dizaine de produit s adaptés à des outils vignerons, mais nous n'avons pas de catalogue spécifique pour la vigne », commente de son côté Yannick Monvoisin, responsable marketing chez Agricarb. Cette entreprise, installée dans le Rhône, est pionnière pour la fabrication de pièces agricoles au carbure de tungstène en France. « Le secteur viticole, disparate, se prête moins à la production de pièces en grande série que l'agriculture », explique-t-il.

Toutefois, le marché décolle. « Nous sommes passés de 5 à 40 % de pièces au carbure en cinq ans, affirme Bernard Cambon, responsable de magasin chez Lavail, concessionnaire Agricarb à Montredon-des-Corbières (Aude). Lors de nos trois journées de foire aux pièces en avril, 110 des 130 socs au carbure que nous avions commandés ont trouvé preneur. »

Autre signe d'un marché émergeant, A.DI. Carbures et Agricarb seront au Sitevi cette année. « Nous aurons une offre spécifique de pièces pour la vigne », annonce-t-on chez A.DI. Carbures.

Cette évolution s'explique par le retour du travail du sol. « Nous employons des pièces au carbure depuis que nous sommes en bio », témoigne Claude Mesnard, de la SCEA Huez-Mesnard. L'exploitation cultive 17 ha de vignes dans des sols abrasifs à Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire). Claude Mesnard a d'abord monté des pattes d'oie en carbure sur ses interceps, devant la lame. L'an dernier, il a fait de même en équipant son outil de travail du sol à trois dents de socs en carbure. Les pièces proviennent de Carbures technologies, un fabricant du Maine-et-Loire.

« Il y a trois ans, nous avons acheté un cadre Actisol pour travailler une dizaine d'hectares de cabernet, raconte pour sa part Armel Percher, en Gaec à Nueil-sur-Layon, toujours dans le Maine-et-Loire. À l'origine, seules les pointes étaient en carbure. Depuis l'an dernier, nous avons ajouté des ailerons et des nez de protection en carbure. Ainsi, toute la dent est renforcée. » Le Gaec Percher exploite 45 ha de vignes et 180 ha de céréales. Il travaille depuis dix ans déjà avec des pièces en carbure pour la préparation des sols en grandes cultures. « Ce sont d'abord les grosses exploitations qui sont intéressées », note Bernard Cambon.

Les utilisateurs de pièces d'usure en carbure sont unanimes. Ces éléments durent beaucoup plus longtemps que leurs équivalents en acier. « Nous griffons depuis vingt jours avec des nouveaux socs A.DI. Carbures sans les avoir changés, relève Cyril Lagunegrand, responsable des chauffeurs au château Léoville Las Cases, à Saint-Julien-Beychevelle (Gironde). Avant, nous devions retourner les socs le midi et les changer quasiment tous les jours. L'opération prenait près d'une demi-heure à chaque fois. »

Selon les utilisateurs interrogés par « La Vigne », les pièces en carbure s'usent en moyenne entre quatre et huit fois moins vite. Cela signifierait-il que certaines pièces, de meilleure qualité, dureraient deux fois plus que d'autres ? Difficile à affirmer tant l'usure varie selon le type de sol, la date d'intervention ou la vitesse de passage. « Il existe autant de sorte de carbures que de pneus sur le marché automobile, prévient Thierry David. Il faut se méfier des prix trop bas. »

À l'achat, les pièces en carbure coûtent entre trois et quatre fois plus cher qu'une pièce en acier. « C'est un investissement, admet Thierry David. Mais ensuite, il est possible de réduire par trois le coût des pièces d'usure à l'hectare sur une année. »

Fabrice Dulor, directeur commercial chez Boisselet, est plus mesuré. « Le carbure est sans doute justifié dans des sols abrasifs. Mais c'est loin d'être utile partout, relativise-t-il. Nous avons, certes, quelques demandes, mais notre gamme de lames plates en acier haute résistance convient pour la plupart des sols. Ce sont les premières opérations aratoires qui sollicitent les outils. Mais après une ou deux campagnes, il y a beaucoup moins d'usure. »

Exemples d'outils renforcés

LAME INTERCEP Gard

LAME INTERCEP Gard

POINTE, AILETTES ET NEZ DE PROTECTION sur une dent Actisol

POINTE, AILETTES ET NEZ DE PROTECTION sur une dent Actisol

POINTE sur dent de Cultibio. © M. CAILLON

POINTE sur dent de Cultibio. © M. CAILLON

Une offre croissante pour les équipements viticoles

Quelques constructeurs de matériels viticoles proposent des pièces en carbure. Mais l'essentiel est produit par des fabricants spécialisés, parmi lesquels Agricarb, A.DI. Carbures et Carbures technologies. Ces derniers proposent des pièces toutes faites qui peuvent être montées sur la plupart des cadres de travail du sol existants.

« Notre soc 60 remplace une côte de melon sur les outils Cultibio, Gard ou Ferrand, détaille Yannick Monvoisin chez Agricarb. Nous réalisons des pointes, des ailettes et des nez de protection à monter sur les cadres Actisol. » Carbures technologies et A.DI. Carbures proposent également ce type de socs.

Mais pas seulement. « Nous développons des carrelets et des socs pour des charrues vigneronnes, des décavaillonneuses, des butteurs et des décompacteurs. Nous aurons aussi bientôt des pièces conçues pour des interceps rotatifs ou à lames », énumère Thierry David. Ces entreprises proposent également des plaquettes à souder sur des pièces existantes. Ces plaquettes, appelées mises à souder, permettent de réparer au cas par cas une pièce en acier usagée, des lames interceps ou une vrille de tarière par exemple. Soudées sur une pièce neuve, elles peuvent aussi prévenir une usure prématurée. Le viticulteur peut les faire souder par le fabricant, son concessionnaire ou s'en charger lui-même.

Le Point de vue de

JÉRÔME LEFÈVRE, DU DOMAINE DE TAILLESANG, À OUVEILLAN (AUDE)

« J'ai été convaincu dès le premier passage »

JÉRÔME LEFÈVRE, DU DOMAINE DE TAILLESANG, À OUVEILLAN (AUDE)

JÉRÔME LEFÈVRE, DU DOMAINE DE TAILLESANG, À OUVEILLAN (AUDE)

« J'entretiens mes 40 ha de vignes avec des pointes en carbure depuis cinq ans.

Auparavant, je travaillais avec des socs en acier. Mais ces derniers s'usaient constitués de galets roulés.

Alors, j'ai équipé mon Cultibio de socs en carbure Agricarb. J'ai commencé avec les deux socs situés dans le passage des roues du tracteur. J'ai été convaincu dès le premier passage. J'ai rapidement monté les mêmes pointes sur les cinq autres dents. J'ai aussi soudé des petites plaques en carbure en bout de museau sur les trois dents de mon décompacteur. Depuis, je change toujours un peu plus souvent les deux pointes qui griffent derrière les roues. Mais les cinq autres me font au minimum deux saisons. Je les passe quatre ou cinq fois par an. Un jeu de pointes en carbure vaut quatre fois plus cher qu'une pointe en acier. Mais il dure autant que huit jeux ordinaires. Je consacre aussi beaucoup moins de temps à la remise en état du matériel. »

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