« Nous avons inauguré notre aire de lavage l'an dernier dans les pires conditions», se souvient Sébastien Caillat, président du syndicat de Chassagne-Montrachet (Côte-d'Or). Cette aire compte 31 adhérents. Elle dispose de deux postes de lavage et d'une cuve tampon de 9,5 m3 qui stocke les effluents avant de les envoyer dans un Phytobac.
« C'est un système simple et qui fonctionne bien, analyse Sébastien Caillat. Mais l'an dernier, pendant une dizaine de jours, les traitements et les lavages se sont bousculés. Faute d'ensoleillement, l'évaporation des effluents par le Phytobac était très faible. Afin d'éviter de saturer la cuve tampon, nous avons dû boucher le drain qui y renvoie le surplus des effluents du Phytobac. Si c'était à refaire, nous mettrions une cuve de stockage de 12 m3. »
Carte magnétique. Le syndicat de Chassagne-Montrachet a construit son aire selon un modèle très abouti et courant en Bourgogne. Elle est entièrement fermée. Les viticulteurs y accèdent grâce à une carte magnétique qui leur donne également accès à l'eau de lavage. L'entretien a été confié à un paysagiste qui débroussaille les alentours, bêche le lit biologique en début de saison et le tond si besoin.
Malgré ces débuts difficiles, les utilisateurs sont satisfaits. « L'aire apporte un vrai confort. On n'irait plus laver son tracteur et son pulvé ailleurs », indique Sébastien Caillat. Cette année, la gestion du temps de lavage va évoluer. Les cartes, initialement prévues pour dix lavages de dix-sept minutes par an, seront dotées de cinquante crédits de cinq minutes. « Ce sera plus souple. Et avec des crédits plus courts, chacun sera incité à moins consommer. L'idéal serait un dispositif qui affiche la durée de lavage en temps réel. Mais il coûte 4 000 euros.»
Aire couverte. À Meursault (Côted'Or), l'aire qui fonctionne depuis 2007 a dû fermer en 2012. « Les vannes qui séparent les eaux de pluie des eaux chargées de produits phytosanitaires connaissaient des dysfonctionnements fréquents. Il a fallu les changer deux fois en quatre ans », déplore Guillaume Lavollée, l'un des 79 utilisateurs de l'aire.
Construite dans le périmètre d'un site classé, les Bâtiments de France ont refusé que le syndicat de Meursault la couvre. Pour éviter que les eaux de pluie se mélangent aux eaux de lavage, ce système de vannes de séparation a dû être installé. « Cette solution paraissait fonctionner sur le papier, mais elle s'est avérée défaillante. Elle a entraîné de nombreuses pannes », regrette Guillaume Lavollée.
Courant 2012, sous la pression des viticulteurs, les Bâtiments de France ont accordé l'autorisation de couvrir l'aire. À cette occasion, le syndicat a construit une seconde piste de lavage. Il n'a pas pu augmenter la capacité initiale de stockage, de 60 m3, faute d'espace disponible.
À Meursault, chaque viticulteur dispose d'une carte magnétique dotée de quarante crédits valables pour deux saisons. Un lavage complet nécessite deux crédits permettant d'utiliser l'eau pendant deux minutes à basse pression et quatre minutes à haute pression. L'utilisateur peut à tout moment appuyer sur « Pause » pour interrompre le lavage sans consommer de crédit. À Volnay, toujours en Côte-d'Or, « le temps de lavage n'est pas limité afin que chacun puisse repartir avec un tracteur propre, argumente Thiébault Huber, président de l'ODG de Volnay. Mais on doit réenclencher la pression toutes les deux minutes afin de limiter la consommation d'eau. Les adhérents sont satisfaits de ce système. La saison 2012 s'est bien déroulée, malgré des conditions humides et la boue sur les tracteurs. La traçabilité permet de retrouver les gens qui ont laissé l'aire sale ». 147 m3, d'effluents y ont été traités, contre 90 en 2011.
Fonctionnement simple. En dehors de la Bourgogne, les aires de lavage sont souvent plus petites et moins sophistiquées. Celles de la vallée du Riou-Long, à Peujard et Saint-Fiacre, en Gironde, ou de Turquant, dans le Maineet-Loire, comptent ainsi une quinzaine d'adhérents en Cuma. Les deux premières disposent d'une piste de lavage et traitent elles-mêmes leurs effluents à l'aide d'un Phytobac.
Celle de Turquant a opté pour l'Osmofilm. Mais avec deux pistes et une cuve de stockage des effluents de 250 hl, elle paraît surdimensionnée. « Nous avions de l'espace, alors nous avons prévu large, convient Régis Vacher, président de la Cuma. Nous pourrons ainsi accueillir trois ou quatre nouveaux adhérents. »
Ces aires fonctionnent très simplement. « Chaque adhérent dispose d'une clé, vient laver son pulvé, indique la date et les produits utilisés, rapporte Alain Garrot, président de la Cuma de la vallée du Riou-Long. Je contrôle le niveau de la cuve tampon et remplis moi-même les Phytobacs. On aurait pu améliorer leur position pour automatiser leur alimentation et d'éviter ainsi d'y veiller constamment. Je demande aux adhérents d'utiliser le moins d'eau possible. Mais certains ne jouent pas le jeu, car le volume d'eau n'est pas contrôlé. »
Les huit sites de lavage gérés par le Sivom Corbières Méditerranée sont encore plus simples. Chaque site est doté d'une piste et d'une seule cuve d'effluents de 12 m3. Les 268 viticulteurs qui y remplissent et lavent leur pulvé ont un accès à l'eau gratuit et illimité. « Une participation financière et un relevé de la consommation d'eau par l'utilisateur permettraient de responsabiliser davantage les viticulteurs », estime Stéphane Santanac, technicien en charge du traitement des effluents.
Il passe dans chaque aire avec un camion équipé d'une unité Epumobil. « L'opération prend un jour et demi toutes les trois semaines. Pendant ce laps de temps, l'aire est fermée. Mais ça n'empêche pas les viticulteurs de traiter », observe-t-il. Les aires, ouvertes, ont subi quelques actes de vandalisme au début. Mais depuis quelque temps, ça se passe bien. » Plus embêtant, trois aires construites en zones vulnérables doivent être déplacées pour se mettre en conformité avec la législation.
Une facture variable et raisonnable
Le prix payé par un viticulteur pour laver un pulvé sur une aire collective est très variable.
Il reste toutefois raisonnable compte tenu du montant des aides accordées pour leur construction, qui frisent le plus souvent 80 % de l'investissement.
Ce prix s'élève à 150 euros HT par an et par adhérent à Meursault (Côte-d'Or), à 175 euros à Chaintré (Saône-et-Loire), à 344 euros, soit presque le double, à Turquant (Maine-et-Loire) et à 400 euros à Chassagne-Montrachet (Côted'Or). L'aire de Fleury et Sallesd'Aude (Aude) facture 50 euros HT pour un pulvé et 100 pour laver une machine à vendanger.
Le prix comporte souvent une part variable. Les viticulteurs de Vosne-Romanée et de Volnay (Côte-d'Or) paient une cotisation de base de 450 euros HT et déboursent ensuite 70 euros par mètre cube au-delà de deux mètres cubes d'effluent produits. La Cuma de la vallée du Riou-Long (Gironde) facture 85 euros HT, plus 3,40 euros par hectare.
Les 268 utilisateurs des huit aires de lavage du Sivom Corbières Méditerrannée sont privilégiés. Pour eux, l'utilisation de l'aire est gratuite.
Phytobac, le procédé le plus répandu
Treize méthodes de traitement des effluents sont à ce jour homologuées en France.
Phytobac, un bac contenant un lit biologique constitué d'un mélange de terre et de paille, est le plus répandu. C'est le choix opéré par six des douze aires consultées pour notre enquête. La plupart sont développées par des Cuma comptant une vingtaine d'adhérents. Les autres sites utilisent les procédés Sentinel, BF Bulles, Phytopur, Epumobil et Osmofilm qui agissent par concentration des effluents. Dans les quatre premiers cas, le traitement est assuré par un prestataire qui se déplace sur le site avec une unité de traitement mobile. Cette dernière sépare l'eau des substances actives par coagulation/floculation puis par filtration. Ces procédés sont adaptés à des aires accueillant plus de 50 adhérents et générant un volume d'effluents important. Le procédé Osmofilm, qui concentre les effluents par évaporation naturelle dans des saches translucides, équipe une aire. Les seize adhérents remplissent les saches eux-mêmes, par roulement.