Viticulteur sur 27 ha à Monthelon, dans la Marne, Philippe Robert relève depuis deux ans deux rangs de vigne à la fois. « Nous avons d'abord relevé un rang avec une machine Ero à vis sans fin. Elle était montée sur un Fun Trac, un enjambeur monorang à chenilles de Mafroco, se souvient-il. Il y a cinq ans, nous l'avons remplacé par une releveuse DMP à bandes installée sur un tracteur enjambeur à trois roues, un GRV 3XT. Peu après, confrontés à la diffculté de trouver du personnel, nous avons décidé de construire un tracteur pouvant recevoir deux releveuses. Pour travailler en toutes conditions, nous avons opté pour un chenillard. »
Après un an d'étude, le prototype de l'engin, construit en interne, prend forme. C'est un tracteur à chenilles enjambant deux rangs à la fois. Deux poutres transversales carrées, soudées chacune à deux montants latéraux verticaux solidaires, constituent le châssis de l'enjambeur. Cette structure repose sur un train de chenilles de deux mètres de longueur et 20 cm de largeur. Le tout se déplace grâce à un moteur diesel Lombardini développant 50 ch installé en position basse entre les deux rangs enjambés. Deux pompes hydrauliques à débit variable, de 60 litres chacune, entraînent les barbotins.
Philippe Robert se consacre ensuite aux releveuses. Il démonte la DMP installée sur le GRV et achète un second modèle au constructeur alsacien. Puis il monte les deux sur un mât porte-outils spécifique qu'il fixe au châssis devant l'enjambeur. Deux pompes hydrauliques, de 15 et 60 litres, permettent de régler la hauteur du mât et le fonctionnement des releveuses.
Deux postes de travail protégés par un arceau de sécurité sont installés à droite et à gauche au niveau du palissage, derrière les chenilles. De là, deux ouvriers commandent les deux releveuses de manière indépendante.
L'opérateur assis à droite pilote la machine. Il contrôle la direction et l'avancement avec un joystick. À peine entré dans le rang, il marque une pause. Le temps pour son coéquipier et lui de nouer les ficelles de palissage sur les deux piquets de tête, à 20 cm au-dessus du cordon de liage. Le palissage étant à portée de main, ils n'ont qu'à se pencher légèrement depuis leur poste de travail. Pratique.
De là, ils disposent également d'une très bonne visibilité sur l'agrafeuse de la releveuse, située juste devant eux. Ils peuvent ainsi déclencher sa fermeture tous les deux mètres avec précision d'une simple impulsion sur un bouton avec le pouce gauche. Ils ont malheureusement à portée de tympan le moteur qui tourne à 2 200 tours/min. Le casque est hautement recommandé.
Cette fois, le chauffeur démarre pour de bon. Stockés dans un casier en haut des poutres, les douze rouleaux de ficelle se dévident sans problème via les guides prévus à cet effet. Les deux releveuses à bandes rugueuses remontent les rameaux de chardonnay et pinot meunier en douceur, sans provoquer de casse. Les deux agrafeuses, qui posent des agrafes biodégradables, fonctionnent bien.
En revanche, à 3 km/h, la vitesse de travail n'est pas très rapide. Mais avec deux releveuses plutôt qu'une, le débit de chantier a doublé. « Dans nos vignes plantées à un mètre de largeur, il faut quatre heures par hectare et par passage, donc huit heures seulement, pour poser deux paires de releveurs, souligne Philippe Robert. Pour les 12 ha que nous relevons encore à la main, il faut compter 35 h/ha pour le seul relevage des deux paires de fils. À cela, il faut ajouter près de 70 h/ha pour poser les agrafes et bien aligner les rameaux. »
Arrivé au bout du rang, tout en continuant d'avancer, le pilote freine le déroulement des ficelles pour les tendre un peu. Puis il s'arrête pour les attacher aux piquets de tête. En effectuant son demi-tour dans une allée humide et un peu escarpée, les chenilles de l'engin, qui pèse 1 400 kg, marquent peu le sol. largeur, associée à un centre de gravité bas, confère au tracteur une grande stabilité.
Philippe Robert est satisfait de son équipement. Toutefois, il remarque qu'avec deux postes de conduite, la machine requiert une bonne entente et un travail synchrone des deux opérateurs. Faute d'agrafage automatique en effet, le commandant de bord ne peut se passer d'un copilote.