ISABELLE ET ROLAND LAGARDE, viticulteurs à Luc-sur-Orbieu, dans l'Aude, ont vendu 600 cols de leur millésime 2011 au profit d'une association soutenant deux enfants souffrants de graves handicaps. © F. EHRHARD
VENTE AUX ENCHÈRES DES VENDANGES DU CœUR. Monsieur Meyzen, commissaire priseur, partage l'enthousiasme de Yannick Noah lors de l'événement organisé en 2012. © PINGOUIN
DANS TOUTE LA FRANCE : Un formidable soutien à la lutte contre le cancer
La fondation de lutte contre le cancer Avec est aux anges. Sur son site internet, on peut lire : « Un formidable élan de générosité » à propos de la vente aux enchères de vins qui s'est déroulée le 7 octobre dernier chez Christie's, à Paris, et pour laquelle près de 130 vignerons ont offert des bouteilles.
Certains des plus grands noms ont participé à l'opération. Le domaine de La Romanée-Conti (Côte-d'Or) a offert un magnum de La Tâche 1999 adjugé pour 8 000 euros. Château Angélus (Gironde) a cédé un double magnum 2009 qui en a rapporté 4 000. La maison Selosse, en Champagne, a donné un coffret de sa collection Lieux-dits qui a atteint le prix record de 2 300 euros.
Guillaume Tari, propriétaire du domaine de La Bégude, à Bandol (Var), a envoyé six magnums d'une valeur totale de 520 euros. « La générosité fait partie de nos valeurs familiales. Dès que nous pouvons aider une cause ou nos voisins vignerons, nous le faisons », assure-t-il. Au total, les enchères ont rapporté 95 340 euros, une somme entièrement reversée à l'Avec. Les 130 vignerons et domaines ont offert en tout plus de 350 bouteilles, que des grands formats, dont la valeur a été estimée entre 47 530 et 67 130 euros. L'initiative de la vente est venue du professeur David Khayat, chef du service d'oncologie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, et président de la fondation Avec. En 2012, « La Revue du vin de France » (RVF) l'a élu homme de l'année pour sa contribution au rayonnement du vin. « Il est convaincu que le vin accompagne le développement humain. Il tord le cou aux provocations de l'INCa (Institut national du cancer), selon lequel le vin est cancérigène dès le premier verre », apprécie le rédacteur en chef, Denis Saverot.
Pour réunir les bouteilles, le professeur Khayat s'est tourné vers la RVF. La revue a lancé l'appel aux dons. « Il en est venu de tous les horizons. Nous étions surpris que les retours soient aussi massifs », confie Anne-Marine Gire, chargée de communication de la fondation Avec.
L'opération a également bénéficié du soutien de la maison Christie's qui a constitué les lots, conçu le catalogue et réalisé gracieusement cette vente aux enchères dont les parrains étaient François Berléand, Jean-Luc Petitrenaud et Jean-Robert Pitte.
AUDE : Un couple de vignerons collecte des fonds pour des enfants
Le 15 juin 2013, Roland et Isabelle Lagarde, vignerons à Luc-sur-Orbieu, dans l'Aude, ont remis un chèque de 2 400 euros à l'association Gabyn et Eulaly. Nés prématurés en 2004, ces jumeaux souffrent d'un grave handicap. Grâce à un traitement innovant, ils ont pu progresser. Aujourd'hui, Eulaly marche seule et Gabyn se déplace avec un déambulateur. Mais ce traitement ne se pratique qu'aux États-Unis, et chaque voyage coûte 12 000 euros. Pour soutenir la famille et l'aider à rassembler des fonds, ses proches ont créé l'association Gabyn et Eulaly.
« Ces enfants habitent à Ornaisons, à quatre kilomètres d'ici. Nous connaissons leur histoire. J'y suis d'autant plus sensible que j'ai eu un frère handicapé. L'an dernier, j'ai décidé de vendre à leur profit 600 cols qui me restaient du millésime 2011 », raconte Roland Lagarde.
« Boule de neige » Avec sa femme, ils ont informé leurs clients et fournisseurs de la vente et posé des affichettes dans les magasins du village. « Nous avons pris une initiative qui a fait boule de neige. Beaucoup de personnes nous ont acheté des bouteilles car elles ont été touchées par l'histoire de ces deux enfants et le courage de leur famille, qui se bat pour eux », relève Isabelle.
En un mois, presque toute la palette était vendue. Les quinze derniers cartons sont partis le 15 juin, lors de la soirée tapas organisée au domaine pour l'association. « Nous les avons accueillis et leur avons fourni des vins à prix coûtant. Ils les ont revendus au verre. Cela leur a permis d'engranger des bénéfices supplémentaires », détaille Roland.
Une belle soirée d'été. Les enfants jouaient dans la cour. Une banda assurait l'animation. Il y avait tant de monde que la fête dé bordait dans la rue. Ces moments partagés ont créé des liens. « Depuis, nous avons des nouvelles de Gabyn et d'Eulaly par notre salarié, car sa petite fille est dans leur classe, ajoute Isabelle. Et nous avons eu le plaisir de les voir avec leurs parents à notre journée portes ouvertes le 12 octobre. »
AUDE : Les Vignerons du Narbonnais perpétuent les Vendanges du cœur Jean-Jacques Goldman, Pascal Obispo, Patrick Bruel, Francis Cabrel, Patricia Kaas… Depuis dix-neuf ans, les plus grandes stars de la chanson française se produisent dans la cour des Vignerons du Narbonnais, la cave coopérative d'Ouveillan, dans l'Aude. Le 17 juillet dernier, c'était au tour de Christophe Maé de chanter pour le bénéfice des Restos du cœur. L'idée a germé suite à une rencontre fortuite avec Jean-Jacques Goldman, de passage en terre audoise en 1994. « Nous n'avions pas d'idée précise. Jean-Jacques Goldman nous a dit : "Faites ce que vous savez faire. Moi, je viendrai chanter" », se souvient Bernard Pitié, directeur de la coopérative. De cette première discussion est née une incroyable aventure. « Peu après cette rencontre, il est revenu avec ses techniciens pour repérer les lieux. Et l'été suivant, il était à l'affiche de notre premier concert », poursuit le directeur. C'était en août 1995. Chaque année depuis, l'événement débute en fin d'après-midi par la vente aux enchères d'une trentaine de barriques de la coopérative suivie d'un repas de l'amitié pour les acheteurs en présence des représentants de la cave. Le spectacle commence à la nuit tombée. Il se joue chaque année à guichets fermés et attire 4 000 personnes. Un repas de clôture réunit ensuite les bénévoles de la cave et les membres de l'équipe de l'artiste. Cuvée spéciale. « À l'exception du montage du gradin, confié à un prestataire agréé depuis le drame de Furiani (en Corse, où des gradins s'étaient effondrés pendant un match de football en 1992, causant de nombreuses victimes, NDLR), nous prenons en charge toute l'organisation, y compris la préparation et le service des 350 repas consommés dans la soirée », précise Bernard Pitié. Quatre-vingts coopérateurs s'investissent bénévolement pendant une semaine pour préparer l'événement, une implication qui crée des liens. Une cuvée Vendanges du cœur, dont l'étiquette est au nom de l'artiste venu chanter, célèbre l'événement. « Nous n'avons jamais cherché à tirer profit de cette opération. Ce n'est pas l'esprit. C'est sans doute la raison pour laquelle nous durons depuis dix-neuf ans, en étant le seul concert, avec celui des Enfoirés, à conserver le soutien de Véronique Colucci », confie le directeur. En tant d'années, la cave d'Ouveillan a reversé un million d'euros aux Restos du cœur. CHAMPAGNE : Nicolas Feuillatte soutient la Banque alimentaire Depuis quatre ans, l'union de coopératives champenoises Nicolas Feuillatte organise une collecte de denrées alimentaires auprès de ses salariés au profit de la Banque alimentaire. En 2012, elle a ainsi offert plus d'une tonne de nourriture à l'organisme de charité. « Cela a débuté de manière très simple, commente Dominique Pierre, directeur général de Nicolas Feuillatte. Un de nos collaborateurs nous a proposé d'effectuer une collecte et les collègues ont tout de suite adhéré. La Banque alimentaire nous a fourni une liste des produits dont elle avait besoin. Nous avons donc effectué nos dons dans le cadre de cet inventaire. » Puis l'idée d'aller plus loin est venue. Et le 21 novembre 2012, le centre vinicole organisait son premier dîner de gala au profit de la Banque alimentaire. « Aux États-Unis, ces dîners pour soutenir des associations caritatives sont très courants, poursuit Dominique Pierre. Ils commencent à se développer en France. Nous nous en sommes inspirés. » Soixante convives ont assisté à cette soirée de charité. Le chef Arnaud Lallement avait imaginé le menu. Pour l'occasion, Nicolas Feuillatte avait débouché de vieux millésimes : 1996, 1997, 1998 et 1999. Après cette grande première, la coopérative a pu remettre un chèque de 10 000 euros au président de la Banque alimentaire de la Marne, Gérard Signoret. Cette année, le dîner de gala s'est tenu le 30 octobre, avec une centaine de participants. C'est Dominique Giraudeau, le chef du restaurant Le Grand cerf, à Montchenot (Marne), qui a conçu et réalisé le repas. Au menu, entre autres : homard juste fumé, bouillon de coco de Paimpol aux huîtres, volaille de la « Cour d'Armoise » au champagne et risotto de céleris au parmesan. La soirée a rapporté 18 250 euros. « L'humain est au cœur de nos décisions, conclut Dominique Pierre. Cela se traduit par une forte implication pour le développement durable et l'ergonomie au travail. Notre soutien à la Banque alimentaire est en phase avec les valeurs de solidarité et de partage portées par la coopération. » GIGONDAS : Une cuvée pour des œuvres de Montmartre Décembre 2012. À Paris, lors d'un dîner, Franck Alexandre, le président de l'appellation Gigondas, fait la connaissance de Brigitte Houdinière. La présidente du Comité des fêtes et d'actions sociales (CFAS) de Montmartre lui confie son désespoir. À cause du printemps calamiteux, les vignes de la célèbre butte n'ont donné que 10 % d'une récolte normale. L'association n'en a tiré que 700 flacons de 50 ml. Un vrai coup dur. Car le bénéfice des ventes de ces bouteilles – prévue en octobre 2013 – revient aux œuvres sociales du quartier. Dès son retour à Gigondas, Franck Alexandre convainc son conseil d'administration de venir en aide à Brigitte Houdinière. « Nous avons lancé un appel à nos adhérents, expose-t-il. Nous leur avons demandé de donner au moins 20 litres de vin en vrac du millésime 2011. » Une trentaine de caves particulières, ainsi que la cave coopérative, ont participé au don. Chaîne de solidarité. Louis Barruol, vigneron et négociant de l'appellation, a assemblé, filtré et embouteillé les vins. Il a ainsi tiré 1 700 bouteilles de 50 cl dénommées pour l'occasion Cuvée du cœur. Les fraudes ont aidé les instigateurs du projet à élaborer une étiquette dans les règles. L'AOC Gigondas devait figurer, de même que la mention « mise en bouteilles au négoce ». « Nous avons par ailleurs créé une chaîne de solidarité », continue Franck Alexandre. Le verrier Rossi a offert les bouteilles et les cartons d'expédition. Le liégeur Cardoso, les bouchons. Technicolor, les étiquettes. La presse parisienne a relayé l'initiative dans ses colonnes. La vente des bouteilles de Gigondas et des vignes du clos a eu lieu les 12 et 13 octobre derniers, lors de la 80e édition de la fête des vendanges de Montmartre, parrainée par les chanteurs Nolwenn Leroy et Thomas Dutronc. À cette occasion, cinquante bouteilles ont trouvé preneur. Le reste sera vendu pendant l'année. Quelques semaines avant la manifestation, des collectionneurs avaient déjà réservé les trois quarts des flacons. Pour 20 euros, ils se sont offert un gigondas collector. GIRONDE : Château Villegorge au secours de la forêt des Landes 46 750 euros récoltés en avril 2013. C'est un record pour le Fouquet's, à Paris, et Marie-Laure Lurton, qui organisent depuis cinq millésimes une vente aux enchères de vins au profit du reboisement des Landes dévastées par la tempête Klaus de 2009. Pour cette dernière vente, la viticultrice bordelaise a cédé 2 526 bouteilles de son Château Villegeorge 2012, un cru bourgeois du Médoc situé à Avensan (Gironde). Les organisateurs avaient également collecté d'autres lots de vins et de champagnes. Marie-Laure Lurton relate les débuts du projet : « J'ai rencontré Christian Rossi, directeur des achats de l'hôtel Fouquet's Barrière à Vinexpo en 1999. Puis il est venu visiter nos propriétés. Nous souhaitions avoir un projet commun tourné vers le développement durable. L'idée de faire une cuvée spéciale au profit de la forêt des Landes et de la recherche sur la biodiversité a fait son chemin. » Les premiers arbres ont été plantés en novembre 2011. Depuis, tous les ans, la viticultrice organise une demi-journée pour vendanger cette cuvée spéciale. « Nous offrons du temps, de la main-d'œuvre et de l'organisation. Nous cédons notre cuvée à un prix qui ne couvre pas les frais », dévoile-t-elle. Ses vingt salariés sont là, rémunérés en heures supplémentaires. Depuis quatre ans, des partenaires se sont joints à l'opération. Ainsi, Trescases offre les bouchons, Veralia les bouteilles et TBD la mise en bouteilles. Les vendanges et la vente de charité suscitent des articles dans la presse. « Au travers de cette opération, c'est une image que nous véhiculons, indique Marie-Laure Lurton. Ce partenariat valorise mes équipes. Mes salariés sont très heureux de ces moments partagés. C'est une fierté pour eux et cela aide à la cohésion d'équipe. » Marie-Laure Lurton ne s'arrête pas là. Elle fait des dons à la Banque alimentaire, au Lions club de sa région ainsi qu'à des rencontres sportives, comme dernièrement « Toutes les femmes courent à Margaux », au bénéfice des enfants en difficulté.