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« Le beaujolais nouveau, notre moment phare »

D. B. - La vigne - n°259 - décembre 2013 - page 51

DANS LE BEAUJOLAIS, LE DÉBLOCAGE DES PRIMEURS reste une occasion exceptionnelle pour rencontrer et développer sa clientèle dans une ambiance festive et décontractée. Exemple à la cave coopérative des Vignerons de Bel-Air.
VINCENT FAUVETTE, le responsable du caveau de la cave des Vignerons de Bel-Air, située à Saint-Jean-d'Ardières (Rhône), a en charge l'organisation des journées portes ouvertes. Il veille notamment à l'approvisionnement de la boutique du caveau en libre-service. PHOTOS D. B.

VINCENT FAUVETTE, le responsable du caveau de la cave des Vignerons de Bel-Air, située à Saint-Jean-d'Ardières (Rhône), a en charge l'organisation des journées portes ouvertes. Il veille notamment à l'approvisionnement de la boutique du caveau en libre-service. PHOTOS D. B.

MYLÈNE ET PHILIPPE ont apprécié l'ambiance et les animations. Amateurs de vins nouveaux, ils repartent aussi avec deux bibs de crus.

MYLÈNE ET PHILIPPE ont apprécié l'ambiance et les animations. Amateurs de vins nouveaux, ils repartent aussi avec deux bibs de crus.

JEAN (À GAUCHE), ICI AVEC SON ÉPOUSE MARYSE, n'est pas friand de beaujolais nouveau. Conseillé par Vincent Fauvette, il repart avec du brouilly.

JEAN (À GAUCHE), ICI AVEC SON ÉPOUSE MARYSE, n'est pas friand de beaujolais nouveau. Conseillé par Vincent Fauvette, il repart avec du brouilly.

COMBIEN PÈSE CE PANIER ? C'est la question du jeu concours dont la cave se sert pour enrichir son fichier clients. Il rencontre plus de succès qu'un jeu avec des questions-réponses.

COMBIEN PÈSE CE PANIER ? C'est la question du jeu concours dont la cave se sert pour enrichir son fichier clients. Il rencontre plus de succès qu'un jeu avec des questions-réponses.

Samedi 23 novembre, la coopérative les Vignerons de Bel-Air, à Saint-Jean-d'Ardières (Rhône), est en pleine effervescence. Comme beaucoup d'autres caves, elle organise des portes ouvertes à l'occasion de la sortie des vins primeurs qui a eu lieu le 20 novembre à minuit. Mais ici, les festivités durent quatre jours : du 21 au 24 novembre. Elles se déroulent dans le magasin de vente de la cave située sur la commune de Belleville.

En ce début d'après-midi, ils sont six sur le pont : trois coopérateurs ou anciens coopérateurs et trois permanents. Ils s'attendent à accueillir près de 150 personnes. « C'est un moment phare de notre année », affirme Vincent Fauvette, responsable du caveau de Bel-Air depuis six ans et maître d'oeuvre de ces journées. Un moment phare, mais pas du point de vue du chiffre d'affaires. « Nous produisons entre 25 000 et 30 000 hl de vin par an, dont 6 000 hl de beaujolais nouveau. Les ventes lors des journées portes ouvertes ne représentent que 2 500 bouteilles sur environ 70 000 pour l'année. C'est donc négligeable. »

L'intérêt est ailleurs. « C'est l'occasion de rencontrer nos acheteurs dans une ambiance conviviale et de développer notre fichier clients qui compte environ 13 000 noms. Nous pouvons récolter plusieurs dizaines de nouvelles adresses chaque jour. »

Pour attirer la clientèle, la cave de Bel-Air propose tout le programme de la journée portes ouvertes classique. Elle offre de la charcuterie et des pâtisseries à volonté à ses visiteurs. Le samedi après-midi, un groupe assure une animation musicale avec un répertoire festif. Et nouveauté cette année : la cave a convié Dubouillon, le dessinateur de presse du quotidien local « Le Progrès ». Il signera des dédicaces pendant toute l'après-midi. « Nous lui avions demandé de dessiner l'étiquette de nos bouteilles de vin nouveau cette année. Il a gentiment accepté. »

La cave propose aussi un jeu à ses clients. Il faut deviner le poids d'un panier gourmand qui comporte trois bouteilles, des terrines et des produits du terroir. À gagner : des entrées dans un zoo, des repas chez des restaurateurs... L'important réside dans le bon de participation. « Il nous permet de récupérer de nouvelles adresses, indique Vincent Fauvette. Mais il faut imaginer un jeu très simple, sinon des gens se peuvent se sentir exclus. »

Mais la bonne recette pour attirer le public dans une région où les initiatives de ce type foisonnent ne peut se résumer à un programme convivial. « Nous commençons par envoyer un courrier à tous nos clients juste après les vendanges, puis une relance par courriel avant les portes ouvertes avec le programme. Enfin, nous faisons de la publicité dans toute la presse régionale dans les jours qui précèdent. »

C'est un investissement de 2 500 euros en publicités et de 500 euros pour les cadeaux du concours. À cela, il faut ajouter 150 bouteilles de vin nouveau et une cinquantaine de bouteilles dans les autres appellations de la cave pour les quatre jours de dégustation.

Dès 15 heures, Vincent Fauvette se partage entre l'accueil, le conseil, le service et le réapprovisionnement du magasin. Entièrement rénové voilà deux ans, le caveau arbore des couleurs chaudes, chocolat et gris souris, un bar et des tables hautes avec tabourets qui permettent aux clients de choisir leur façon de consommer. « Nous l'avons voulu très chaleureux », résume le directeur de la cave, Jean-Paul Civeyrac.

Les appellations sont présentées en bouteilles et en bibs dans des box en libre accès. Au bar, trois coopérateurs servent les visiteurs alors que la secrétaire de la cave tient la caisse.

Première impression : la sortie du beaujolais nouveau a conservé son caractère festif. « C'est vraiment une fête », confirment Claudine et Raymond, venus de l'Ain tout proche et fidèles depuis plus de dix ans. Mais, s'ils boivent un petit verre de primeur, ils veulent également déguster une autre production de la cave, du brouilly en l'occurrence.

Même son de cloche chez Mylène et Philippe, venus du Jura. « Le beaujolais nouveau, c'est une tradition que nous avons toujours fêtée. Nous nous sommes arrêtés ici parce que nous apprécions l'esprit coopératif. Et nous sommes bien tombés : l'ambiance est très sympa avec l'animation musicale. Nous en profitons pour effectuer nos achats de l'année en beaujolais. »

Ils repartent avec un bib de 10 l de côtes-de-brouilly et un bib de 5 l de chiroubles, ainsi que deux bouteilles de primeur, pour faire goûter à leurs amis. Vincent Fauvette commente : « Il faut s'adapter à la demande de la clientèle : auparavant, nous vendions nos bouteilles par pack de trois, minimum. Puis, commercialement, c'est devenu un frein. Aujourd'hui, nous proposons des assortiments de différentes bouteilles. »

Beaucoup d'étrangers fréquentent également ces journées portes ouvertes, comme ce couple d'Italiens, qui vient chaque année depuis vingt ans à la cave de Bel-Air. « Je vous reconnais », lance d'ailleurs Vincent, qui ravitaille le couple pour l'année en prélevant des cartons sur une large palette de crus.

« Le beaujolais nouveau, désormais, c'est une mise en bouche », affirment Alain Berger et Thierry Martin, deux des coopérateurs qui assurent le service cet après-midi. « Les gens veulent rapidement goûter autre chose, alors qu'il y a dix ans encore, on ne buvait que du nouveau à cette occasion. »

La cave de Bel-Air produit les douze appellations du Beaujolais en rouge, du beaujolais rosé, du blanc et du crémant de Bourgogne. « Le brouilly, le morgon et le chiroubles sont les vins les plus demandés, mais nous essayons de faire découvrir autre chose aux visiteurs, car certains crus du Beaujolais sont assez méconnus, expliquent les deux coopérateurs. Ce n'est pas facile, il faut très vite estimer quels types de vins nous pouvons proposer à un client en fonction de ce qu'il demande. » Si le consommateur aime, par exemple, un vin structuré comme le fleurie, ils lui proposent un morgon, un vin structuré également.

Pour certains visiteurs, l'intérêt de ces portes ouvertes est même assez déconnecté du beaujolais nouveau, comme pour Jean, venu du Mâconnais voisin. « Je viens pour acheter un bib de beaujolais générique », dit-il à Vincent Fauvette. Mais le stock de 2012 est épuisé et le 2013 n'est pas encore disponible. Le coopérateur lui propose une dégustation de beaujolais primeur générique. Jean accepte. Moue. « Il a plus de nez que de palais », estime-t-il. Vincent lui suggère alors de goûter le beaujolais villages primeur. Jean l'apprécie plus. « C'est plus structuré comme appellation », atteste Vincent. Finalement, Jean, qui ne veut pas repartir les mains vides, se décide pour un bib de 5 l de brouilly. « Commercialement, pour nous, c'est plus intéressant qu'un beaujolais nouveau », se félicite Vincent.

Jacques et Marie-Élisabeth viennent de Lyon (Rhône). Pour eux, ces journées portes ouvertes sont une occasion de « refaire leurs stocks », selon un plan bien établi. « Nous tournons dans tout le Beaujolais puisque nous sommes sûrs de trouver des caves ouvertes aujourd'hui. Nous goûtons, puis nous rentrons chez nous. Nous faisons le point sur ce qui nous a plu et nous revenons plus tard pour acheter. Quant au nouveau, il est conforme à ce qu'il doit être. »

En fond sonore, le groupe alterne pauses et animations d'une demi-heure. Le public apprécie certains morceaux au point de chanter en choeur. Avec l'inconvénient qu'il se détourne de son verre pour écouter le groupe.

17 h 30. L'après-midi a été bien remplie, mais, alors qu'un pic d'affluence était attendu à l'heure de l'apéritif, la fréquentation décline peu à peu jusque vers 18 h 30. La météo, notamment la neige dans les environs, a peut-être empêché certains clients de venir. Désormais, les coopérateurs et leurs familles arrivent et remplacent les clients. « Ils aiment bien venir voir comment ça s'est passé », note Vincent.

À l'heure du bilan, Vincent Fauvette constate que 2013 marque un arrêt de l'érosion des ventes de vins nouveau. « Nous entendons peu ou pas de remarques négatives au sujet du millésime. Comparé aux années précédentes, les ventes de vins nouveaux se sont rééquilibrées par rapport aux crus. Après le week-end, nous avons continué à vendre des vins nouveaux et nous serons bientôt en rupture sur le beaujolais nouveau en bouteilles, il ne restera plus que du villages. »

Les Vignerons de Bel-Air ont écoulé 1 600 bouteilles de beaujolais nouveau, 450 bouteilles de beaujolais villages nouveau et 300 bouteilles de beaujolais nouveau rosé. Les ventes de ces journées montrent aussi l'importance du Bag-in-box : 43 bibs de 10 l et 65 de 5 l de beaujolais nouveaux vendus. Pour les crus, 45 bibs de 10 l, 36 de 5 l et 550 bouteilles ont trouvé preneur.

Début décembre, il ne restait plus à Vincent qu'à éplucher les noms et adresses des nouveaux clients enregistrés pendant ces quatre journées. Une tâche de longue haleine.

TRANSFORMER LE VISITEUR EN CLIENT

- « Il faut très vite estimer les goûts de la personne qui est en face de vous en rebondissant sur le type de vins qu'elle semble aimer », indique Vincent Fauvette, des Vignerons de Bel-Air. Ainsi, lorsqu'il sent qu'il a affaire à un amateur de vins structurés, il lui propose toujours d'en déguster d'autres de sa gamme afin de l'intéresser à des produits que son interlocuteur ne connaît pas.

- Les animations sont appréciées dans un cadre festif comme celui de la sortie des primeurs. Mais elles ne stimulent pas forcément les achats. Attention aux animations musicales trop fortes ou mal placées qui peuvent empêcher les gens de s'entendre.

- Le passage en caisse est un moment primordial lors d'une journée portes ouvertes, car c'est là que l'on vérifie si l'acheteur est déjà client ou non. Dans ce dernier cas, il faut lui demander ses coordonnées afin de pouvoir lui envoyer vos offres par la suite. Les Vignerons de Bel-Air utilisent le logiciel Viticaisse.

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