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PRIMEURS Leur sortie reste une fête

La vigne - n°259 - décembre 2013 - page 6

Les ventes de beaujolais nouveaux se sont stabilisées, tout comme celles de gaillac. Les consommateurs ont salué la qualité du millésime.
LES BARRIQUES DE BEAUJOLAIS NOUVEAU arrivent à Lyon (Rhône) par bateau le troisième jeudi du mois de novembre. La sortie de ce primeur donne lieu à la fête des Sarmentelles, à Beaujeu. © J. PHILIPPON/LE PROGRES/MAXPPP

LES BARRIQUES DE BEAUJOLAIS NOUVEAU arrivent à Lyon (Rhône) par bateau le troisième jeudi du mois de novembre. La sortie de ce primeur donne lieu à la fête des Sarmentelles, à Beaujeu. © J. PHILIPPON/LE PROGRES/MAXPPP

Beaujolais : Regain d'intérêt des cavistes

Les producteurs de beaujolais nouveau voient enfin le bout du tunnel. Cette année, la région a produit entre 200 000 et 240 000 hl de vins primeurs. « Des volumes conformes à ceux de l'an passé », note Anthony Collet, le responsable marketing et communication d'Inter Beaujolais. Avec la récolte tardive, les transactions en vrac se sont effectuées sur une période très courte et à des prix stables par rapport à l'an passé : 220 €/hl en moyenne pour le beaujolais nouveau et 240 €/hl pour le beaujolais villages nouveau. « Tous les marchés ont pu être approvisionnés en temps et en heure », se réjouit Anthony Collet.

L'essentiel des beaujolais nouveaux est vendu en France (53 % en 2012). Les consommateurs ont-ils répondu présents cette année ? Jean-Paul Brun le constate. « Il y a encore un engouement pour le beaujolais primeur, signale ce vigneron à la tête du domaine des Terres dorées, à Charnay (Rhône). Cette année, nous avons produit environ 80 000 bouteilles, comme d'habitude. Nos vins étaient de bonne qualité. Ils se sont bien vendus. Certains de nos clients cavistes en ont même manqué. »

Mêmes échos chez le négociant Boisset-Mommessin, propriétaire de la marque Le Père la Grolle et qui vend 15 à 20 % des beaujolais primeurs. « Nos ventes sont restées stables ; les sorties en grande distribution aussi, malgré le contexte économique morose. Et les retours sont plutôt positifs », souligne Grégory Large, le responsable du pôle beaujolais. Celui-ci précise qu'il y a un regain d'intérêt des cavistes et des restaurateurs pour le beaujolais en général et le primeur en particulier. « Ces vins sont d'un très bon rapport qualité/prix », note-t-il.

Les producteurs misent sur le Japon. Claude Mendler, un caviste alsacien à la tête de cinq petites boutiques situées dans la région strasbourgeoise, confirme : « La sortie du beaujolais nouveau est un événement national qui a souffert d'excès dans le passé. Aujourd'hui, nous retournons vers nos clients avec des beaujolais primeurs sélectionnés auprès de petits producteurs. Nous mettons en avant leur patte, de manière à redonner de la profondeur au beaujolais nouveau pour qu'il ne soit plus considéré uniquement comme un événement marketing. J'ai proposé deux références autour de 5 à 6 euros le col et quasiment tout mon stock est parti en trois jours. Après une baisse des ventes, on sent une stabilisation. »

Mêmes échos d'Olivier Reynal, des Caves du Roussillon, qui détient trois magasins autour de Perpignan, dans les Pyrénées-Orientales. « Cette année, j'ai rentré 800 bouteilles, comme les années précédentes, et proposé deux cuvées de producteurs autour de 8 euros prix public. Le beaujolais marche de mieux en mieux et les clients acceptent de mettre le prix dès lors que la qualité est là. Depuis deux ans, il y a une montée en gamme du beaujolais nouveau. Ce produit sort en même temps que le muscat de Noël, qui a un gros succès. Ce sont deux produits complémentaires. À l'inverse, les primeurs de notre région (vins de pays des côtes catalanes), qui sortent en octobre, s'essoufflent. »

Patrick Jourdain, un caviste qui gère deux magasins, l'un à Cusset, dans l'Allier, et l'autre à Thiers, dans le Puy-de-Dôme, est plus nuancé. « Le beaujolais primeur est sorti le 21 novembre, soit huit jours plus tard que l'an passé. Or, dans notre région, les fins de mois sont difficiles. Nous avons donc rentré un peu moins de beaujolais primeur cette année. Nous avons bien fait, car si nous avons eu autant de clients que l'an passé, le panier moyen a diminué. En revanche, tous ont été surpris par la qualité du millésime. »

« Pour maintenir nos ventes, nous sommes obligés de trouver de nouveaux clients », rapporte Martine Chermette, à la tête du domaine du Vissoux, à Saint-Vérand (Rhône), qui a produit 106 000 bouteilles de beaujolais nouveau cette année, soit un tiers de sa production et autant que l'an dernier.

À l'export, tous les regards sont tournés vers le Japon, « qui représente 60 % des exportations de beaujolais nouveau », précise Anthony Collet. Depuis 2010, ce marché est à la hausse. « Il y a un vrai engouement des Japonais pour le beaujolais nouveau. Ils consomment peu de vin. Pour la plupart d'entre eux, le primeur est le seul vin qu'ils boivent dans l'année. Et ils n'hésitent pas à dépenser de l'argent pour se payer une bouteille. Ils adorent les traditions. Le fait qu'il s'agisse d'un événement annuel les séduit », ajoute le responsable marketing.

En revanche, aux États-Unis, les exportations ont chuté de 12 % l'an passé après avoir progressé en 2009, 2010 et 2011. « Cette baisse résulte de la petite récolte de 2012 », assure Anthony Collet. Elle ne serait donc pas due à un désintérêt des clients. Qu'en est-il cette année ? Début décembre, Grégory Large affirmait : « Nous n'avons aucun retour négatif. Le marché est stable. »

Gaillac : Sur la route du Primeur bus tour

Chaque 21 novembre, à l'occasion de la sortie des vins primeurs, l'agence Gaillac Visit organise un Primeur bus tour. Les participants apprécient le côté festif de l'opération et le fait de pouvoir déguster sans prendre de risque sur la route. Cette année, ils étaient 24. « Nous avons des adeptes qui reviennent d'une année sur l'autre, confie Fanny Lacassagne, la responsable de l'agence. Nous suivons les petites routes au milieu des coteaux. Nous racontons l'histoire du vignoble et commentons le patrimoine. Nous nous arrêtons chez trois ou quatre vignerons qui font déguster leurs vins. Nous choisissons de préférence ceux qui mettent sur pied des animations, comme un marché artisanal. Les visiteurs peuvent acheter du vin et le stocker dans le bus. »

Un millésime agréable et fruité. Le prix moyen du gaillac primeur à la propriété est de 5 euros TTC la bouteille. Le marché est majoritairement détenu par les vignerons, qui produisent environ 700 000 cols par an. Un volume stable depuis 2010, mais qui est monté à 900 000 bouteilles en 2000. Très peu de vrac s'est échangé, à peine 200 hl cette année. « Les amateurs avaient une appréhension car ils savaient que l'année avait été difficile, indique Carole Fontanier, chargée du marketing à l'interprofession. Mais à la dégustation, ils ont jugé le millésime 2013 agréable, fruité et idéal pour l'apéritif. »

Volumes en baisse dans les côtes du Rhône

Fin novembre dans les côtes du Rhône, 10 117 hl de vins primeurs s'étaient échangés en vrac, soit 10 % de moins que l'an passé. En revanche, le cours moyen a progressé de 12 €/hl pour atteindre 123 €/hl de moyenne. « C'est un segment qui stagne, observe un analyste. Il ne suscite pas le même engouement qu'autrefois. La grande distribution n'en propose quasiment pas, hormis en région. » « Nous avons divisé notre volume de côtes-du-rhône primeur par deux, annonce ainsi Bernard Roustan, directeur de la cave Costebelle, à Tulette (Drôme). Nous n'avons produit que 1 500 hl. Cette année, il n'y avait pas la demande pour absorber les 3 000 hl que nous mettons habituellement sur le marché. » Comme ses confrères, outre le peu d'enthousiasme du marché, il a dû composer avec la récolte petite et tardive. « Les vendanges ont démarré avec trois semaines de retard, poursuit-il. Nous n'avons pu préparer les vins que début novembre. Cela n'a pas été facile qu'ils soient disponibles le jour de la libération des primeurs. »

Touraine primeur : l'affaire de quelques spécialistes

Cédric et Marina Chollet. © I. PROUST

Cédric et Marina Chollet. © I. PROUST

La vendange a été maigre cette année en AOC Touraine. Et la production de Touraine primeur s'en ressent. Selon InterLoire, environ 140 000 cols ont été mis en marché. Bien loin des 255 000 produits en 2011. « Des récoltes déficitaires ne motivent pas les viticulteurs à produire du primeur. Cette année, une petite trentaine en propose. C'est devenu l'affaire de quelques spécialistes », constate Alain Godeau, président de l'ODG Touraine. À Onzain (Loir-et-Cher), Cédric et Marina Chollet font partie de ces vignerons fidèles au touraine primeur. « Nous en avons toujours produit, et mon père aussi. Ce vin est un challenge au niveau technique et c'est un produit festif, une accroche originale en prospection, explique Cédric. Nous le vendons essentiellement en vente directe, à 5 euros le col. Nos clients l'ont beaucoup apprécié cette année pour son côté léger, fruité, son petit goût de "reviens-y". » Pour Gilles Bac, directeur de la coopérative le Cellier du Beaujardin, « une partie des consommateurs attend le touraine primeur. Il y a toujours un engouement juste après son lancement. Un magasin de Tours (Indre-et-Loire) en a écoulé 1 200 cols en un week-end ! » Côté prix, il a vendu ses bouteilles de primeur en grande distribution « entre 20 et 35 centimes de plus qu'un touraine rouge. En rayon, elles sont autour de 4 euros ». Mais face au beaujolais nouveau, le touraine primeur peine à s'imposer sur ses propres terres. « Les vignerons sont trop timides et les acheteurs ne jouent pas assez le jeu du produit local », lâche Alain Godeau. Quant aux achats du négoce, ils sont en baisse depuis plusieurs années, mais le cours du vrac est à la hausse : 150 €/hl cette année, contre 144 euros l'an dernier et 107 euros en 2011.

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