CETTE IMAGE prise à l'occasion d'un repas de vendanges avec les adhérents a été choisie pour illustrer l'étiquette de la cuvée Les Coopains. PHOTOS A. TENDERO PHOTOS A. TENDERO
À Montpeyroux (Hérault), l'économie solidaire et durable, on y croit. Preuve en est, le travail mené l'an dernier par Marie-Ange Lasmenes, oenologue et ethnologue, sur la mémoire sociale de la coopérative. « Nous avons conscience du patrimoine immatériel que constitue une cave coopérative, assure Bernard Pallisé, directeur de la cave. Avec cette enquête menée auprès de tous les acteurs de notre coop, nous avons souhaité le mettre en valeur. Nous voulions aussi interpeller les coopérateurs d'aujourd'hui sur leur responsabilité sociale dans la pérennisation de la démarche militante engagée par leurs aînés. »
Pendant six mois, Marie-Ange Lasmenes a recueilli le témoignage de 78 viticulteurs, retraités ou en activité, qui sont ou ont été adhérents de la coopérative. Chacun a livré une version personnelle de son vécu à la « coopé », dont la création remonte à 1950. L'ensemble couché sur le papier représente deux tomes de trois cents pages.
« La coopérative, c'est ma seconde maison », confie l'un. « Elle aide à passer les moments difficiles », « c'était la richesse du village et ça l'est encore », ajoutent d'autres. « Personne ne rechignait à la tâche. On était tellement content d'aller travailler, car ça nous plaisait », s'enthousiasme la femme d'un coopérateur retraité.
« Je suis né dans les vignes, témoigne un autre. Je me souviens, gamin, quand mon père me donnait les bulletins d'apport. J'ai appris comme ça le nom de toutes nos parcelles, je suivais la production de chacune. » Des témoignages souvent touchants, des points de vue variés, qui illustrent bien l'appropriation de la coopérative par ses adhérents et son identité.
« C'est toute la mémoire sociale de la coopérative que nous avons voulu préserver, car elle se perd avec la disparition des premiers coopérateurs », soutient le président François Poudou.
Parallèlement à ce travail d'enquête, le photographe Alain Tendero a mis en lumière les acteurs de cette grande famille sous forme de portraits ou de scènes de vie de la coopérative. Ces deux missions ont donné lieu à une superbe exposition de photos en noir et blanc, légendées de paroles de viticulteurs, qui habille les murs du tout nouveau caveau de vente inauguré en juin dernier. Deux vidéos de huit et quarante-deux minutes ont également été réalisées, ajoutant l'émotion des voix à la puissance évocatrice de l'image. Enfin, un livre est en cours de réalisation.
Pour célébrer ce travail, la coopérative a réalisé l'an dernier une cuvée collector : Les Coopains. L'étiquette est illustrée d'une des photos de l'exposition. Cette année, cette cuvée sera déclinée en version Coopines, « en hommage à toutes ces femmes qui se sont impliquées dans l'aventure au côté de leurs maris, sans bénéficier d'autre considération que le titre peu flatteur de conjointe d'exploitation », rappelle Bernard Pallisé.
« Nous avons voulu illustrer notre engagement à placer l'humain au coeur de nos préoccupations, renchérit François Poudou. C'est un argument que nous développons avec nos clients. Certains y sont sensibles. C'est également la preuve qu'une économie solidaire et sociale peut être viable et durable. » La cave avait déjà adopté le nom de coopérative artisanale. Elle pourrait désormais rajouter sociale et solidaire, preuves à l'appui.
La cave en chiffres
La cave de Montpeyroux compte 110 adhérents qui exploitent 500 ha de vigne. Elle produit 27 000 hl et vend 1,5 million de cols dont 70 % à l'export. Les ventes au caveau représentent 14 % du chiffre d'affaires. Un pourcentage qui devrait croître avec le nouvel espace de vente ouvert à proximité de Saint-Guilhem-le-Désert et du Pont du Diable.