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éditorial

Émoi irrationnel

PAR BERTRAND COLLARD, RÉDACTEUR EN CHEF DE LA VIGNE - La vigne - n°260 - janvier 2014 - page 5

La planète médiatique et maintenant le web et la blogosphère sont toujours prêts à s'enflammer pour les bonnes causes. La Bourgogne vient de leur en donner l'occasion. L'an dernier, le préfet de Côte-d'Or a décrété un traitement insecticide de lutte obligatoire contre la cicadelle de la flavescence dorée. Un vigneron a refusé de le faire. Les services de contrôle le traînent au tribunal. Jusqu'aux États-Unis, la presse et le web saluent un résistant. Comment peut-on tracasser quelqu'un qui refuse de polluer ? s'indignent ces esprits qui veillent sur l'avenir de la planète. Un cortège d'associations s'est joint à ce concert de protestations. Elles demandent que ceux qui refusent la lutte obligatoire puissent « suivre des procédures alternatives ». À plusieurs reprises, nous avons cherché à joindre la Fédération nationale d'agriculture biologique, membre de ce cortège, pour connaître ces procédures alternatives. Nous attendons toujours une réponse.

Dans cette affaire, il n'est venu à l'idée d'aucun média que la lutte obligatoire contre un parasite doit avoir des fondements raisonnables. Car elle n'a pas été décidée pour ennuyer le monde ou pour aider les marchands de pulvérisateurs et de produits à faire des affaires. Elle n'a pas non plus pour but d'éradiquer un insecte, comme certains veulent le faire croire. Elle vise simplement à réduire les populations de cicadelles afin qu'elles ne propagent plus la flavescence dorée, une maladie qui annihile les capacités de production de la vigne. Dans ce vacarme, tous les insecticides sont cloués au pilori, accusés de détruire la faune auxiliaire. Certes, jusqu'à maintenant, aucun de ceux autorisés contre la cicadelle de la flavescence dorée n'était neutre vis-à-vis des typhlodromes.

Mais heureusement, ces derniers s'accommodent mieux des traitements que les éditorialistes américains. Quantité d'observations de terrain le montrent. Il faudrait expliquer tout cela au grand public, qui ne comprend rien à la nécessité de protéger les cultures. Mais personne ne s'en charge. La viticulture préfère entretenir une image vaguement passéiste de ses méthodes.

Il y a quelques années encore, McDonald's était dénoncé comme le grand responsable de la malbouffe. Aujourd'hui, avec son habile communication, il a renversé la vapeur et nous fait avaler que ses sandwichs sortent de nos vertes campagnes. Qui réussira ce retournement dans notre secteur ?

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