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Magazine - Terroir & tradition

Accros aux tire-bouchons !

MICHÈLE TRÉVOUX - La vigne - n°263 - avril 2014 - page 86

Le Club français du tire-bouchon s'est réuni fin mars à Sète (Hérault). L'occasion de découvrir une foule de passionnés de cet objet incroyablement divers et chargé d'histoire.
LE TIRE-BOUCHON inspire les inventeurs de tout poil : plus de 300 brevets ont été déposés de 1795 à 1950. © T. POIRIER

LE TIRE-BOUCHON inspire les inventeurs de tout poil : plus de 300 brevets ont été déposés de 1795 à 1950. © T. POIRIER

QUATRE-VINGT-CINQ PASSIONNÉS se sont retrouvés à Sète (Hérault) pour vendre, acheter ou échanger des pièces de tous styles. © T. POIRIER

QUATRE-VINGT-CINQ PASSIONNÉS se sont retrouvés à Sète (Hérault) pour vendre, acheter ou échanger des pièces de tous styles. © T. POIRIER

JO PARADI, un Canadien qui possède 4 400 tire-bouchons, est venu spécialement de Toronto. Il a chiné un modèle pour champagne. © M. TRÉVOUX

JO PARADI, un Canadien qui possède 4 400 tire-bouchons, est venu spécialement de Toronto. Il a chiné un modèle pour champagne. © M. TRÉVOUX

On les appelle les helixophiles ou, plus exotique encore, les pomelkophiles. Drôles de noms pour de drôles d'oiseaux ! Ces énergumènes, qui seraient 10 000 à 15 000 sur toute la planète, partagent un même entichement : les tire-bouchons. Une passion qui peut prêter à sourire mais qu'ils pratiquent pourtant avec le plus grand sérieux. Regroupés en club, ils se retrouvent périodiquement pour exposer leurs dernières trouvailles et échanger leurs pièces en double. C'est ainsi que 85 d'entre eux, membres du très sérieux Club français du tire-bouchon (CFTB), se sont retrouvés à Sète (Hérault) les 22 et 23 mars pour leur congrès annuel.

Venus de France en majorité, mais également de Suisse, d'Allemagne, d'Angleterre, d'Italie, du Danemark, de Belgique et même des États-Unis et du Canada, ils affichaient tous le même plaisir à échanger et discuter de leur instrument fétiche.

Une invention anglaise. Joseph Paradi, l'un des plus grands experts mondiaux de cette discipline, avait fait le déplacement depuis Toronto (Canada) pour le plaisir de chiner quelques pièces rares. Depuis trente-cinq ans, cet ex-ingénieur chimiste s'est pris de passion pour cet ustensile à vrille. Il a consacré toute une pièce de sa maison à sa collection riche de 4 400 pièces ! Et ce n'est rien comparé aux 12 000 pièces que détiennent chacun un américain et un roumain !

Le Canadien, révéré par ses pairs, est intarissable sur le sujet. Les premiers tire-bouchons, explique-t-il, font leur apparition à la fin du XVIIe siècle, avec la naissance du verre industriel qui permet de certifier la contenance des bouteilles. L'utilisation des bouchons en liège pour obturer les cols se répand, d'où la nécessité de créer un outil spécifique pour les déboucher. La paternité en revient aux Anglais, qui ont imaginé un appareil dérivé d'un système utilisé pour extraire les balles des fusils. Le premier brevet aurait été déposé en 1795 par Samuel Hensall. Dès lors, l'imagination créatrice des inventeurs en tous genres s'est exprimée et plus de 300 brevets ont été déposés de 1795 à 1950.

Cinq grandes nations dominent l'industrie manufacturière du tire-bouchon : le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, l'Italie et les États-Unis. Cette origine multiculturelle contribue à l'étonnante diversité de cet instrument. Si les premiers sont simples, souvent en forme de T et faisant appel à la force, ils deviennent ensuite plus complexes, avec des systèmes pour faciliter l'extraction du bouchon : cage, ressort, levier, hélice ou ailette, pignon ou crémaillère, coupe-capsule, décapsuleur...

« Le tire-bouchon illustre tous les thèmes de la vie », constate un autre collectionneur. Les animaux, les armes, l'érotisme... les sources d'inspiration se déclinent à l'envi : comme ce modèle américain orné d'une caricature du sénateur Volstead, l'homme qui institua la prohibition aux États-Unis dans les années vingt. « C'est ce qui fait l'intérêt d'une telle collection, témoigne Thierry Poirier, vice-président du CFTB et organisateur du congrès de Sète. Il y a une très grande diversité de pièces. Les dispositifs, les thèmes illustrés et les matériaux utilisés offrent une richesse incroyable pour un amateur », dit-il en s'extasiant devant le modèle qu'il vient de chiner : une pièce à cloche en métal, joliment travaillée.

Cette passion peut s'avérer coûteuse. Lors d'une vente aux enchères en 1999, un tire-bouchon anglais signé Robert Jones & Son, datant de 1842, a atteint un sommet : 28 100 euros !

Plus une pièce est ancienne, plus elle est rare et chère. Parmi les plus coûteuses figurent également des tire-bouchons qui... ne marchent pas ! « Ce sont des modèles rares. Comme ils ne fonctionnent pas, ils ont été fabriqués en peu d'exemplaires et sont très recherchés », indique Joseph Paradi. Quand on vous dit qu'ils sont accros !

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