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La Pologne n'a pas de tradition viticole et importe la quasi totalité des vins qu'elle consomme, soit plus d'un million d'hectolitres en 2013. Lorsqu'elle faisait partie du bloc soviétique, les seuls vins auxquels les Polonais avaient accès étaient bulgares, pas forcément de très bonne qualité.
Mais les choses changent. Depuis l'adhésion du pays à l'Union européenne il y a dix ans, le commerce a bien évolué. Beaucoup d'importateurs se sont lancés sur ce marché dynamique, certains petits et régionaux, d'autres plus importants, qui se regroupent pour former des entreprises de poids.
Côté revente aux consommateurs, les réseaux se diversifient rapidement. Les hypermarchés aux rayons en pagaille, où il est difficile de se retrouver, sont rejoints par de nouvelles chaînes de boutiques plus petites, spécialisées dans le vin et parfois l'épicerie fine, comme M&P Alkohole i Wina wiata, Kondrat Wina Wybrane, Mielzynski ou Dom Wina.
Des places à prendre. « Les Italiens ont déjà trouvé leurs marques dans ces nouveaux magasins. Mais il y a encore des places à prendre, assure Igor Michalski, conseiller export du bureau d'Ubifrance à Varsovie. Les responsables de ces points de vente sont souvent plus ouverts aux messages des vignerons que les chefs de rayon des grandes surfaces. Il est important de travailler avec ces petits réseaux. »
« Attention aux impayés..., prévient toutefois François Philippe, à la tête de la société Impresja, importateur à Borsuki, tout à l'est de la Pologne. Le marché polonais est difficile. Il faut du temps et de la patience pour s'y installer durablement. Le problème réside souvent dans l'ignorance ou le manque d'intérêt des professionnels vis-à-vis du vin. Il faut en effet choisir un partenaire qui ne soit pas uniquement intéressé par le prix, mais qui soit aussi un prescripteur et s'engage à faire découvrir les vins français à ses clients. »
Le marché du vin en Pologne est encore jeune et immature, mais il fait preuve d'une croissance de plus de 10 % par an. Et il est loin d'être saturé. Le pays compte 38 millions d'habitants et la consommation annuelle se situe entre trois à quatre litres de vin par personne, ce qui est encore faible. La France, avec 107 000 hl exportés en 2013, est le cinquième fournisseur de vins, derrière l'Allemagne, la Bulgarie, l'Italie et l'Espagne.
Les vins français progressent plus vite que la moyenne. Ils ont enregistré 12 % de croissance en volume et 16 % en valeur en 2012, puis 11 % en volume et près de 19 % en valeur en 2013.
2014 a démarré sur le même rythme (+11 % en volume, +13 % en valeur de janvier à mars). Cette croissance exceptionnelle devrait donc se poursuivre cette année. Ces chiffres montrent que la demande augmente, mais aussi que les produits sont de mieux en mieux valorisés.
« La consommation polonaise évolue et passe d'un marché bas de gamme avec des vins de table saturés en sucre et au goût prononcé de fruit, à un marché plus qualitatif de vins plus secs », confirme Igor Michalski. Parmi les vins français, les AOC, qui représentent 33 % des volumes de vins tranquilles en 2013, ont progressé de 22,5 % entre 2012 et 2013, les IGP (27 %) affichent + 15 % et les vins sans IG (40 % des ventes) n'ont enregistré que 0,6 % de hausse.
Pendant la même période, le champagne a fait un bon de 33 % et les vins mousseux de 51 %, alors que les vins pétillants reculaient de 90 %.
Mathieu Billod est responsable export vers les pays de l'Est aux Domaines Paul Mas, qui ont commercialisé 60 000 bouteilles en Pologne en 2013. Il confirme que le gros de ses ventes se fait en IGP Pays d'Oc, mais que la demande se développe en AOC. « Nous travaillons avec deux gros importateurs qui cherchent des producteurs leaders pouvant leur proposer des gammes complètes, mais aussi avec plusieurs petites entreprises, indique-t-il. Nous leur vendons nos bouteilles entre 2,50 et 3,50 euros. Elles sont essentiellement revendues aux cavistes et aux restaurateurs et mises sur le marché entre 7,50 et 10,50 euros. »
Des rouges corpulents et alcoolisés. « Sur le marché polonais, le segment premier prix est très disputé, complète François Philippe. Pour ma part, je n'y suis pas. Je privilégie toujours la qualité, ce qui me place automatiquement sur le segment moyen-haut de gamme où il y a moins de concurrence. J'importe uniquement des vins français que j'achète à des vignerons indépendants. Je réalise 100 000 euros de chiffre d'affaires avec ces importations qui progressent d'environ 10 % par an. Comme je suis champenois, je développe aussi une spécialité autour des champagnes, qui constituent plus de 20 % de mon activité. »
Les vins français exportés vers la Pologne sont à 70 % des rouges et des rosés, et pour 30 % des blancs. L'hiver étant très long et les Polonais habitués aux spiritueux fabriqués dans le pays, ils consomment plutôt des rouges corpulents et forts en alcool. Mais il existe aussi un marché pour des vins plus faciles à boire pendant la courte saison estivale. Un importateur pourrait se démarquer s'il avait une bonne gamme de rosés et de blancs.
Une banderole fiscale à cheval sur le col
L'importateur polonais doit s'acquitter d'un droit d'accises (taxe fiscale) de 0,28 euro par bouteille, matérialisé par une banderole qui doit être placée à cheval sur la capsule de surbouchage. Il envoie ces banderoles sous pli scellé à l'embouteilleur qui est chargé de les mettre en place dans le pays d'origine du vin. Ce travail se fait le plus souvent manuellement, même si des machines peuvent être utilisées pour de grandes commandes. La banderole doit être visible, bien collée et doit être détruite lorsqu'on ouvre la bouteille afin qu'on ne puisse pas la réutiliser. Tout cela a un coût non négligeable qui se rajoute au prix export.
