Sans cesse remettre l'ouvrage sur le métier. Sans cesse rappeler aux élus l'importance économique et culturelle de la viticulture pour la France. C'est à ce prix-là que la filière desserrera l'étau de la loi Évin. On l'a vu une nouvelle fois à l'occasion du débat parlementaire sur la loi de santé publique. L' Anpaa avait soufflé à quelques députés un amendement autorisant l'administration à renforcer comme bon lui semble le message sanitaire. On pouvait craindre de voir apparaître « L'alcool est dangereux pour la santé » sur les publicités. Et non plus « l'abus d'alcool ». Vin et Société et la Cnaoc ont alerté les députés des régions viticoles. Ceux-ci ont balayé cette perspective.
Le 1er avril, à l'Assemblée nationale, pendant près de deux heures, vingt d'entre eux se sont succédé pour défendre leurs vignobles. Ils ont affirmé que la France doit être fière de ses vins et de ses vignerons.
Ils ont rappelé que le vin est un produit de convivialité dont il fallait être libre de parler à condition que ce soit de façon responsable. Ils ont demandé aux pouvoirs publics de combattre les abus et non les produits comprenant de l'alcool. Presque tous étaient de l'opposition. Mais ils ont parlé au nom de leurs confrères de la majorité à qui le gouvernement avait demandé de se taire, ce dont certains se sont excusés discrètement. Après ces plaidoiries, l'Assemblée nationale a rejeté l'amendement.
Puis les députés des régions viticoles ont défendu la nécessité de revoir la définition de la publicité pour les boissons alcoolisées afin que les journaux ne soient plus condamnés lorsqu'ils titrent « Le triomphe du champagne ». Le Parisien a subi ce sort pour cet article qui célébrait une année de record de vente pour le plus prestigieux de nos effervescents. Car, pour la justice, toute évocation et tout acte en faveur d'une boisson alcoolisée sont de la publicité. À ce compte-là, « exposer une nature morte de Cézanne avec des bouteilles entre dans le champ de la loi Évin », a expliqué Denys Robiliard. Ce député du Loir-et-Cher est à l'origine d'un amendement ramenant la publicité à un acte intéressé. Les députés ne l'ont pas voté. Mais ce n'est que partie remise. Durant cette soirée du 1er avril, l'opposition a obtenu du gouvernement la création d'un groupe de travail sur le sujet.
Reste à remettre l'ouvrage sur le métier pour que ce groupe se réunisse au plus vite. Une porte est entrouverte. Il faudra de l'énergie et de l'obstination pour qu'elle ne se referme pas sous le poids de calculs politiciens et la charge des hygiénistes.