Retour

imprimer l'article Imprimer

VENDRE

Le réveil d'une marque

AUDE LUTUN - La vigne - n°276 - juin 2015 - page 61

Quand les ventes baissent, la refonte de votre marque est une solution pour les rebooster. Témoignage d'un parcours réussi en Champagne.
 H. LAPINTE

H. LAPINTE

Véronique et Philippe Glavier ont travaillé avec l'agence Cidéo.  H. LAPINTE

Véronique et Philippe Glavier ont travaillé avec l'agence Cidéo. H. LAPINTE

« Le téléphone ne sonnait presque plus ! » C'est ce constat qui a poussé Véronique et Philippe Glavier, viticulteurs à Cramant (Marne), à prendre contact en 2012 avec l'agence Cidéo, basée à Ay, pour réveiller leur marque de champagne. Le couple produit entre 20 000 et 22 000 bouteilles par an. Première étape de la réflexion, l'agence a commencé par étudier la cohérence de leur gamme. « Nous avons supprimé une cuvée, la seule qui n'était pas un grand cru, témoigne Véronique Glavier. Elle représentait 1 500 bouteilles. C'est Cidéo qui a repéré ce manque d'unité. C'est l'intérêt d'avoir un oeil extérieur qui se pose sur votre travail. »

Adieu les cuvées réserve

L'agence leur a ensuite demandé de raconter leur histoire et celle de leur champagne. « Nous cherchons dans le parcours et la personnalité de nos clients ce qui les différencie des autres, explique Julie Marano, directrice associée de Cidéo. On leur révèle ce qui est latent chez eux. Cela sert ensuite de fil rouge pour définir un positionnement cohérent. »

Chez les Glavier, Cidéo a mis en avant le travail en commun du couple, notamment lors des assemblages. Sur leurs documents commerciaux, la signature devient « Un champagne, deux vignerons ». L'agence a trouvé un autre élément original. « Nous avions un ange sur les anciennes étiquettes, témoigne Véronique Glavier. Nous l'avons épuré et mis davantage en avant. »

L'étape suivante est un travail sur le nom des cuvées. Adieu les cuvées « Réserve », « Prestige », « Millésime », etc. La gamme comprend désormais « Grâce d'Alphaël », « Idylle Céleste », « Génésis », « Mesnil Émotion 2007 » et « Folie de Cramant ». L'habillage des bouteilles a été complètement revu, ainsi que tous les documents commerciaux et le site web.

Ce changement s'est accompagné d'une hausse des prix des bouteilles de 3 € HT en deux à trois ans. Le changement de prix s'est fait en plusieurs étapes. La première année, les clients historiques bénéficiaient des anciens tarifs et les nouveaux clients d'un prix majoré de 2 €. « C'était assez compliqué à gérer, commente Véronique Glavier. Au bout d'un an, nous avons opté pour un tarif unique. »

Avec l'augmentation de leurs tarifs, qui vont maintenant de 18,50 € à 64 € TTC, les Glavier ont perdu 20 % de leur clientèle française. Mais leur nouvelle identité leur a permis de conquérir des marchés à l'étranger. Entre 2012 et 2014, la part de l'exportation est passée de 10 % à 40 % de leurs ventes. « Il ne faut pas avoir peur de changer de clientèle », observe Véronique Glavier.

Des investissements conséquents 30 000 € en 2013 et en 2014, et 20 000 € en 2015 : une enveloppe de 80 000 € a été investie en trois ans. Ce montant inclut les honoraires de l'agence, les nouveaux habillages, le site internet refait, les documents commerciaux traduits en quatre langues et les dossiers de presse ; ainsi que les déplacements et les salons à l'étranger. Cet investissement devrait être rentabilisé en quelques années.

Un nouveau métier

« Nous sommes très satisfaits d'avoir mené cette réflexion. Maintenant, il nous faut pérenniser nos nouveaux marchés, souligne Véronique Glavier, qui parle l'anglais et l'espagnol. Cela représente une grosse charge de travail car nous nous déplaçons souvent à l'étranger. Mais nous ne sommes plus dans l'attente du client. On a l'impression de ne plus faire le même métier. »

Le Point de vue de

L'AVIS DE JULIE MARANO, DIRECTRICE ASSOCIÉE DE L'AGENCE CIDÉO, À AY (MARNE)

« Valoriser de 2 à 5 € la bouteille en trois ans »

« Les viticulteurs viennent nous voir quand leurs ventes diminuent et qu'ils ne savent pas comment rebondir. Notre accompagnement dure généralement deux ans. Nous commençons par établir un diagnostic de l'offre, avec une dégustation de la gamme à l'aveugle par un panel de dégustateurs qui décrit chaque vin et qui voit si la gamme est cohérente. Ensuite, nous écrivons l'histoire de la marque et mettons en avant ce qui différencie notre client des autres viticulteurs. Parfois, nous renommons ses cuvées avec lui pour éviter les termes de "cuvée spéciale" ou de "cuvée prestige", etc. Une fois ce travail réalisé, nous mettons en place une nouvelle identité graphique et un plan de communication. Notre objectif est d'amener le vigneron à augmenter ses bouteilles de deux à cinq euros en quelques années. Une hausse progressive des prix est bien acceptée par les clients historiques si l'on met en lumière des atouts de la marque qu'ils ignoraient. Mais surtout, la nouvelle stratégie permet d'en conquérir de nouveaux. La prise de risque est très mesurée. Il ne faut pas avoir peur du changement. Il faut utiliser le marketing pour faire progresser une marque sans la déstabiliser. Une marque dont les volumes baissent ou dont la valeur stagne doit réagir ! »

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :