Retour

imprimer l'article Imprimer

VENDRE

Au Printemps de Châteauneuf-du-Pape, avec Jean-Marie Royer « Je pars à la conquête du grand public »

CHANTAL SARRAZIN - La vigne - n°286 - mai 2016 - page 53

LE PRINTEMPS DE CHÂTEAUNEUF-DU-PAPE est le seul salon auquel participe Jean-Marie Royer. Son équipe de choc, sa générosité à faire déguster ses vins et son sens du contact lui attirent une foule de clients.
JEAN-MARIE ROYER (à droite), viticulteur, accueille les visiteurs aux Printemps de Châteauneuf-du-Pape. © C. BRISBOIS/ANDIA

JEAN-MARIE ROYER (à droite), viticulteur, accueille les visiteurs aux Printemps de Châteauneuf-du-Pape. © C. BRISBOIS/ANDIA

UN SUÉDOIS, qui se rend chaque année sur le stand de Jean-Marie Royer, vient découvrir les nouvelles cuvées. C. BRISBOIS/ANDIA

UN SUÉDOIS, qui se rend chaque année sur le stand de Jean-Marie Royer, vient découvrir les nouvelles cuvées. C. BRISBOIS/ANDIA

DEUX AMIS FRANÇAIS, qui connaissent déjà le domaine, se décident pour la cuvée Tradition. C. BRISBOIS/ANDIA

DEUX AMIS FRANÇAIS, qui connaissent déjà le domaine, se décident pour la cuvée Tradition. C. BRISBOIS/ANDIA

UN AIXOIS, qui a goûté les vins la veille au cours d'une fête organisée par l'Échansonnerie des Papes, passe commande. C. BRISBOIS/ANDIA

UN AIXOIS, qui a goûté les vins la veille au cours d'une fête organisée par l'Échansonnerie des Papes, passe commande. C. BRISBOIS/ANDIA

TROIS BLOGUEURS, créateurs du site Blind & Taste, viennent déguster la cuvée Les Sables de la Crau. C. BRISBOIS/ANDIA

TROIS BLOGUEURS, créateurs du site Blind & Taste, viennent déguster la cuvée Les Sables de la Crau. C. BRISBOIS/ANDIA

Pour tenir son stand, Jean-Marie Royer (au centre) est secondé par Audrey Mestre (à sa gauche), commerciale dans le secteur de l'emballage, et Rémy Martin (à sa droite), ex-international du XV de France. C. BRISBOIS/ANDIA

Pour tenir son stand, Jean-Marie Royer (au centre) est secondé par Audrey Mestre (à sa gauche), commerciale dans le secteur de l'emballage, et Rémy Martin (à sa droite), ex-international du XV de France. C. BRISBOIS/ANDIA

Le salon accueille le grand public prendant deux jours. C. BRISBOIS/ANDIA

Le salon accueille le grand public prendant deux jours. C. BRISBOIS/ANDIA

LA CUVÉE Les Sables de la Crau est proposée dans plusieurs millésimes aux clients.   C. BRISBOIS/ANDIA

LA CUVÉE Les Sables de la Crau est proposée dans plusieurs millésimes aux clients. C. BRISBOIS/ANDIA

Samedi 2 avril 2016, 11 heures, il commence à y avoir foule au Printemps de Châteauneuf-du-Pape. « Ça démarre », s'enthousiasme Jean-Marie Royer. Tout de jean vêtu, basket aux pieds, le vigneron salue un groupe d'arrivants : son beau-frère accompagné de vignerons suisses. Ils demandent à déguster du châteauneuf-du-pape blanc. Une visite de courtoisie. « Ils ont déjà acheté du vin à ma cave en début de semaine », confie le propriétaire du domaine Jean Royer, 10,5 ha dont 5,5 classés en Châteauneuf-du-Pape, dans le Vaucluse.

Pour recevoir les visiteurs, deux amis lui prêtent main-forte : Audrey Mestre, commerciale dans le secteur de l'emballage du vin, et Rémy Martin, ancien international du XV de France. Amateur de vins, ce dernier connaît bien ceux de Jean-Marie, ex-rugbyman lui aussi. Consciencieux, il s'est fait un mémo où il a inscrit un descriptif de chaque cuvée présentée sur le stand.

Depuis les allées, son 1 m 95 et sa crinière blonde ne passent pas inaperçus. « Il m'amène un peu de clients ! », plaisante Jean-Marie Royer. Pas faux. Dans l'après-midi, une Allemande avouera être venue sur le stand à cause de l'imposante carrure du joueur. Après avoir dégusté des rouges, elle est repartie sourire aux lèvres avec une bouteille de la cuvée Prestige 2013 du domaine à 38 € !

Jean-Marie Royer n'a raté aucune édition du Printemps de Châteauneuf-du-Pape. « C'est le seul salon auquel je participe, précise-t-il. Il est sur place et bien rodé. » Il y voit aussi un moyen de développer sa clientèle particulière. « Je produis 20 000 cols par an que je commercialise à 80 % à l'export, ajoute-t-il. C'est bien, mais la vente directe est plus rémunératrice. Comme je n'ai pas la notoriété de certaines propriétés de l'appellation, être ici me permet de me faire connaître. »

Quoi qu'il en soit, en ce premier jour de salon, son stand ne désemplit pas. Ils ne sont pas trop de trois derrière la petite table pour assurer le service. Presque arrivés en même temps, un groupe de Suédois, un couple de Britanniques et deux amis français tendent leurs verres. « How are you ? », lance l'un des Suédois. Jean-Marie lui répond dans un anglais impeccable. Il a appris la langue sur « le tas » lors de ses tournées rugbystiques en Afrique du Sud et en Australie. « Ils viennent chaque année », nous glisse-t-il à propos de ces derniers.

Les deux Français connaissent eux aussi déjà le domaine, l'un est de Grenoble, l'autre de Saint-Paul-Trois-Châteaux, à une cinquantaine de kilomètres au nord. Ils lui ont déjà acheté des châteauneuf-du-pape rouges l'an passé sur les conseils de l'oenologue Philippe Cambie. Cette fois, ils veulent déguster les blancs de l'appellation. « Je bois de plus en plus de vins blancs, avoue le Grenoblois. Les bourgognes sont hors de prix. À qualité quasi égale, les châteauneuf valent le coup ! »

Jean-Marie leur fait d'abord goûter Petite Reine 2015, un vin de France qu'il vend 10 €. « Il provient d'une parcelle cultivée à Courthézon (Vaucluse), explique-t-il. C'est un assemblage de grenache, bourboulenc et clairette. On l'ouvre quand on a envie ! » Les deux amis poursuivent avec le châteauneuf-du-pape blanc 2015 du domaine, à 23 €. Ils sont conquis.

Puis, Jean-Marie leur propose de déguster ses trois châteauneuf-du-pape rouges de 2014. « C'est le dernier millésime que nous venons d'embouteiller. Nous avons fait un énorme travail d'effeuillage à la vigne pour que les raisins profitent au maximum de l'ensoleillement. Avant les vendanges, nous avons effectué un tri sévère pour ne conserver que les belles grappes. » Le 2014 n'a pas bonne presse. Jean-Marie tient à montrer que les vins sont malgré tout de belle facture. Il termine son tour d'horizon avec le Petit Roy 2015, un vin de France rouge. « Un vin de plaisir que l'on peut ouvrir sans se poser de questions. Il est vendu au carton au même prix unitaire que le blanc Petite Reine. »

L'un des deux amis se décide. « Je vais prendre deux cartons, un de châteauneuf blanc, l'autre de Petite Reine. » Il hésite au sujet des rouges. « Vous avez de quoi garder le vin ? », lui demande Jean-Marie. « Oui », répond-il. « Dans ce cas, je vous suggère de repartir avec du 2014. » Il fait mouche. Le jeune homme lui achète trois bouteilles de sa cuvée Tradition. « J'en boirai une tout de suite et je conserverai les deux autres », explique-t-il. Son ami opte pour six Petite Reine, six Petit Roy, six Tradition 2014, un châteauneuf-du-pape blanc 2015 et un Sables de la Crau 2014. Rémy Martin prépare la commande et glisse les cartons sous la table. Ils reviendront les chercher plus tard.

Deux autres amis se postent devant le stand, des volleyeurs qui ont connu Jean-Marie par l'intermédiaire d'un ami sportif. L'un vient de Montpellier, l'autre de Lille. Tous deux lui ont déjà acheté du vin l'an dernier. Cette fois, ils désirent déguster les rouges 2014. Le vigneron leur décrit ses trois cuvées Tradition, Prestige et Sable de la Crau. La première est un assemblage de différents terroirs composé pour 85 % de grenache et pour 5 % de syrah, cinsault et mourvèdre. La deuxième provient des galets roulés tout au sud de l'appellation. « C'est un vin plus solaire à dominante de grenache avec 20 % de mourvèdre », souligne Jean-Marie. Enfin, les Sables de la Crau, issue d'une parcelle de 1 ha de sable uniquement, exposée au nord. « C'est un pur grenache, précise le vigneron. Les sables et l'exposition lui apportent beaucoup de finesse et de fraîcheur. Cette cuvée a presque un côté bourguignon. J'en produis seulement 1 800 à 3 000 bouteilles par an. » Les deux visiteurs tendent l'oreille pour ne pas perdre une miette de ce discours. Ils ne reviendront que plus tard dans l'après-midi passer commande.

« Vous n'avez pas plus ancien que 2014 ? », s'inquiète un visiteur accompagné de son épouse. Arrivés de Cambray, ils sont à la retraite. « Bien sûr !, lui répond Jean-Marie. J'ai apporté ma cuvée Tradition dans quatre millésimes depuis 2010 et ma cuvée Prestige depuis le millésime 2011. Tout dépend de ce que vous souhaitez. Il y a des vins à garder et d'autres à boire dans la foulée. » Il remplit les verres du couple d'un Tradition 2010. « C'est une année dont le potentiel de garde est exceptionnel », poursuit le vigneron. Puis, il leur sert le Tradition 2011. « Voyez la différence : il est très agréable dès à présent bien qu'il soit plus jeune que celui de 2010. D'ailleurs, on a envie de finir le verre ! » Le couple opine du chef. « Malheureusement, notre coffre est plein, s'excuse le monsieur. Nous avons vu des commentaires sur vos vins dans la RVF. Nous voulions les tester. Nous reviendrons l'année prochaine. » Jean-Marie prend soin de noter leurs coordonnées. Il les convie à venir à son domaine. « Prévenez-moi avant car je n'ai pas de magasin. »

Il est 14 heures. Jean-Marie n'a plus de voix. Il part déjeuner laissant Audrey et Rémy sur le stand.

Trois blogueurs créateurs du site Blind & Taste veulent déguster Les Sables de la Crau qu'ils ont découvert l'an dernier. Rémy reprend à la lettre les explications de Jean-Marie sur la cuvée. « Toujours aussi bon ! », déclarent les trois amateurs. Ils en profitent pour faire un cliché du rugbyman et qui illustrera l'avis qu'ils publieront sur leur page Facebook : « Domaine Jean Royer : des vins toujours au top, avec en prime un accueil VIP par Rémy Martin ! » Ils repartent avec un carton du blanc Petite Reine. « Nous organisons des soirées pour des amateurs, nous la ferons goûter à cette occasion. »

15 heures, Jean-Marie est de retour. Audrey et Rémy s'en vont déjeuner à leur tour. Le flot de visiteurs continue. « Je vais vous prendre trois bouteilles de Prestige 2012 », hèle un monsieur qui a apprécié ce vin le matin.

Préparer les commandes, encaisser, commenter la dégustation auprès des visiteurs qu'il a en face de lui... Jean-Marie doit tout faire en même temps ! Il tient la cadence. La veille du salon, il a également participé à la fête de la confrérie l'Échansonnerie des Papes au cours de laquelle le prince Albert de Monaco a été intronisé. Ses vins étaient présents sur les tables des convives. Ils ont plu à un couple d'Aix-en-Provence. Les voilà qui arrivent sur son stand. « Nous avons décidé de rester une journée supplémentaire pour venir au Printemps », expliquent-ils à Jean-Marie. Ils repartent avec trois bouteilles de Prestige et un Sables de la Crau 2013. Madame a fondu pour cette cuvée.

Un salon, deux publics

Le Printemps de Châteauneuf-du-Pape dure trois jours. Les deux premiers sont ouverts au public, le dernier est réservé aux professionnels. Ce jour-là, les producteurs ne sont pas présents. Leurs échantillons sont regroupés sur une grande table. Les professionnels dégustent les vins sans personne en face d'eux. Cette année, le salon a accueilli 3 638 visiteurs particuliers et professionnels du 2 au 4 avril, soit 7 % de hausse par rapport à l'an passé. Le coût du stand s'élève à 565 € par vigneron. C'est le comité des jeunes vignerons de l'appellation qui a lancé ce salon en 2009.

Un bilan positif

Au cours des deux jours ouverts au grand public, les 2 et 3 avril, Jean-Marie Royer a engrangé 4 000 euros de recette. « La première année, en 2009, nous avions réalisé 400 € environ, souligne-t-il. C'était surtout des achats de copains. Depuis deux ou trois ans, j'ai affaire à des clients qui m'ont connu sur le salon et qui reviennent d'une année sur l'autre. Ils m'envoient leurs amis. Le bouche-à-oreille joue à plein. » Le viticulteur souhaite développer la vente aux particuliers. « Nous avons encore des efforts à faire. Nous avions prévu de noter les adresses des clients acheteurs, mais nous avons été débordés. Nous n'en avons récupéré que quelques-unes. »

RÉUSSIR UN SALON GRAND PUBLIC QUAND ON A PEU DE CLIENTS PARTICULIERS

- Communiquer sur les réseaux sociaux. Son fichier de clients particuliers étant peu étoffé, Jean-Marie Royer n'a adressé ni mailing, ni invitation à ses clients. En revanche, il a activement communiqué sur Facebook où il a un compte à son nom et un autre au nom de son domaine. Les deux pages sont animées par une agence spécialisée qui a invité la communauté d'amis du vigneron à venir lui rendre visite sur le salon.

- Présenter plusieurs millésimes. Cela permet de montrer l'antériorité du domaine et la constance qualitative de sa production. « Quand on n'est pas connu, on a besoin de faire déguster », estime Jean-Marie.

- Se faire épauler par des amis. Cela permet de répartir les tâches - la dégustation, la préparation des commandes, l'encaissement, etc. - sans faire attendre les clients devant le stand. Sinon, ils passent au stand suivant.

- Parler anglais. Le Printemps de Châteauneuf-du-Pape attire de nombreux étrangers : Américains, Danois, Allemands, Scandinaves... qui maîtrisent uniquement l'anglais. Mieux vaut connaître un minimum de vocabulaire pour pouvoir entamer la conversation avec eux.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :