Retour

imprimer l'article Imprimer

DOSSIER - Chai gravitaire : le poids de la qualité

Xavier Frouin, maître de chai de la coopérative de Tain-l'Hermitage, dans la Drôme « La gravité pour mes sélections parcellaires »

La vigne - n°288 - juillet 2016 - page 18

Pour vinifier ses très haut de gamme, la cave de Tain s'est offert un chai avec des wagonnets qui transportent les raisins jusque dans les cuves. Un must réservé à 12 % de sa production.
EN TIRANT SUR UNE CORDE, on achemine les wagonnets transportant les raisins vers leur cuve de destination.  J.-F. MARIN

EN TIRANT SUR UNE CORDE, on achemine les wagonnets transportant les raisins vers leur cuve de destination. J.-F. MARIN

UNE FOIS REMPLIS, les wagonnets d'une capacité de 500 kg sont montés à l'étage supérieur par un palan télécommandé. J.-F. MARIN

UNE FOIS REMPLIS, les wagonnets d'une capacité de 500 kg sont montés à l'étage supérieur par un palan télécommandé. J.-F. MARIN

XAVIER FROUIN, maître de chai de la cave de Tain-l'Hermitage.  J.-F. MARIN

XAVIER FROUIN, maître de chai de la cave de Tain-l'Hermitage. J.-F. MARIN

En investissant 10,5 M€ en 2014 dans une nouvelle installation, la cave de Tain-l'Hermitage, dans la Drôme, n'avait qu'un objectif : se doter d'outils performants pour gagner en qualité. « Nous n'avons pas l'ambition de grandir, notre production est stable. Notre choix, c'est de monter en qualité. Il nous fallait pour cela de nouveaux équipements afin d'accroître notre capacité de vinification et de développer nos sélections parcellaires », explique le directeur Xavier Gomart.

Le projet est complexe car la cave est enclavée entre des immeubles et la colline de l'Hermitage. Comme elle dispose de peu d'espace, il fallait démolir une cuverie construite il y a quarante ans, pour pouvoir construire un nouveau chai. « On disposait d'une légère pente, on a donc demandé au bureau d'étude de réfléchir à un système gravitaire, au moins pour nos sélections parcellaires », explique Xavier Frouin, le maître de chai.

Au final, le projet se décompose en deux espaces : un cuvier dit « technique » destiné à la vinification du plus gros des volumes et un cuvier dédié aux sélections parcellaire. Dans le premier espace, la coopérative a choisi une cuverie classique, tout en Inox, de 28 200 hl. Ici, la vendange est réceptionnée dans des conquêts avec vis sans fin, égrappée puis transférée par une pompe en queue-de-cochon jusqu'aux cuves.

Dans le second espace, des wagonnets sur rail acheminent les raisins dans les cuves. La vendange, exclusivement manuelle, est réceptionnée dans un conquêt vibrant qui l'achemine dans un égrappoir (Delta Oscillys de Bucher-Vaslin). Elle passe ensuite sur une table de tri optique (X-Tri, Defranceschi), puis est convoyée par tapis dans des wagonnets d'une capacité de 500 kg. Un fois pleins, ces derniers sont soulevés à l'étage supérieur par un palan télécommandé. À leur arrivée, un ouvrier les déplace le long du rail auquel ils sont suspendus en tirant sur une corde. Il les conduit ainsi au-dessus de la cuve de destination.

Chaque wagonnet est équipé d'une réserve d'air comprimé pour ouvrir et fermer la trappe inférieure en toute autonomie. Le chai dédié aux sélections parcellaires est équipé de 35 cuves en béton non revêtu de 71, 138 et 193 hl. La coopérative a ainsi pu porter de cinq à douze le nombre de ses cuvées en Hermitage.

« Avec ce système par gravité, les raisins arrivent entiers dans la cuve et le jus se libère très doucement. On observe deux évolutions par rapport à notre précédente installation. L'expression du fruit est plus intense. Ceci résulte sans doute des phénomènes de fermentation intracellulaire et de la libération des jus dans un environnement protégé. On gagne également sur la qualité des tanins qui sont plus doux et moins réactifs, tout en étant toujours présents du fait de nos macérations longues (de 22 à 30 jours) », note Xavier Frouin.

Le décuvage est également très doux : les marcs s'écoulent sur des tapis qui les dirigent vers un pressoir vertical. Là encore, l'absence de pompe a des effets notables : « Avec ce pressurage tout en douceur, j'ai fortement accru la proportion de jus de goutte. Avec notre ancien système de décuvage par vis et pressurage pneumatique, j'obtenais 14 % de vins de presse peu qualitatifs. Aujourd'hui, c'est à peine 2 % des vins de presse que je dois retravailler », confie l'oenologue. Autre constat : les vins de goutte comme de presse sont beaucoup moins chargés et moins troubles.

Les wagonnets sont également utilisés pour le décuvage de la cuverie technique. « Nous les plaçons sous les portes des cuves à décuver, puis les tirons avec le palan au-dessus des pressoirs situés à l'étage supérieur. Les jus de goutte comme de presse s'écoulent ensuite par gravité dans la cuverie à l'étage inférieur. Là encore nous avons gagné en qualité : la proportion de vins de presse peu qualitatifs a été ramenée de 17 à 7 % », affirme-t-il.

Le revers de la médaille de cet équipement très qualitatif, ce sont les débits particulièrement faibles. Le goulot d'étranglement se situe au niveau de la trieuse optique, qui est capable de traiter 12 tonnes par heure quand la vendange est très saine, mais seulement 6 t/h quand les raisins sont abîmés.

Le déplacement des wagonnets est également gourmand en main-d'oeuvre. Pour les diriger, il faut au moins trois personnes : une dans la fosse où ils sont remplis et deux au niveau supérieur pour le transvasement dans les cuves. Seuls 12 % de la récolte bénéficient de ce traitement princier. Rien de déraisonnable pour des cuvées valorisées entre 15 et 120 € la bouteille.

Cet article fait partie du dossier Chai gravitaire : le poids de la qualité

Consultez les autres articles du dossier :

Cave de Tain-L'Hermitage

La coopérative

- 100 ha ; 300 adhérents ; 5 millions de cols par an ; 25 M€ de CA en 2015.

Son chai

- Mise en service : 2014

- Coût : 10,5 M€ pour les deux chais (gravitaire et classique) et l'extension du chai à barriques et du caveau de vente.

- Conception : Ingévin.

- Surface : 2 000 m2.

- Capacité : 4 000 hl (12 % du total), réservé aux sélections parcellaires ; 35 cuves de 71, 138 et 193 hl ; débit : 10 à 12 t/jour.

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :