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LA FILIÈRE AU SIA « Nous voulons investir et exporter »

La vigne - n°295 - mars 2017 - page 8

Le Pavillon des vins a accueilli de nombreux politiques durant le Salon de l'agriculture, dont trois candidats à l'élection présidentielle. Jérôme Despey et Jean-Marie Barillère leur ont exposé les priorités de la filière. Mais aucun candidat n'a pris d'engagement clair.
EMMANUEL MACRON a terminé sa visite du SIA par un long arrêt au Pavillon des vins. Une pause qui a commencé par un montravel blanc.  © D. FRANJUS-GUIGUE/CNIV

EMMANUEL MACRON a terminé sa visite du SIA par un long arrêt au Pavillon des vins. Une pause qui a commencé par un montravel blanc. © D. FRANJUS-GUIGUE/CNIV

BENOÎT HAMON, tout sourire après avoir dégusté un chablis grand cru, a écouté attentivement ses hôtes. ©C. FAIMALI/GFA

BENOÎT HAMON, tout sourire après avoir dégusté un chablis grand cru, a écouté attentivement ses hôtes. ©C. FAIMALI/GFA

MARINE LE PEN déguste un rosé, « un vin de nana », selon elle.  © D. FRANJUS-GUIGUE/CNIV

MARINE LE PEN déguste un rosé, « un vin de nana », selon elle. © D. FRANJUS-GUIGUE/CNIV

Le Pavillon des vins prend ses habitudes. Dans le hall 2 du Parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, il arbore chaque année les mêmes vélos pour que le public s'amuse à faire un tour de France viticole et la même carte de France où ne figurent pas les appellations qui ne cotisent pas aux interprofessions, comme Châteauneuf-du-Pape. Nouveauté cette année : les enfants découvraient la culture de la vigne en réalité augmentée. De jolies têtes blondes se sont sagement assises pour apprendre comment « pousse » le raisin.

Le Pavillon de vins prend aussi du poids. Au-delà de sa fonction de communication vers le grand public, sa vocation politique se confirme. Mis à part François Fillon (voir encadré), tous les politiciens de premier plan s'y sont arrêtés, François Hollande en tête. Année d'élection présidentielle, les candidats à sa succession sont venus rencontrer des responsables professionnels. Marine Le Pen, le 28 février, Emmanuel Macron, le 1er mars, et Benoît Hamon, le 2 mars, ont échangé avec eux après s'être fait mitrailler par les photographes au comptoir de dégustation du Pavillon.

Le duo de choc formé par Jérôme Despey, président du conseil des vins de FranceAgriMer, et Jean-Marie Barillère, président du Cniv, les a tous reçus. « Il faut maintenir une OCM spécifique pour stimuler l'investissement et ouvrir de nouveaux marchés à l'export », ont-ils répété à tous leurs visiteurs. Alors que le viticulteur Jérôme Despey martelait la nécessité de perpétuer l'OCM vitivinicole, le négociant Jean-Marie Barillère plaidait pour des accords de libre-échange, surtout avec la Chine. Il soulignait aussi la fragilité des résultats de la filière à l'export. « C'est une situation en trompe l'oeil. Si l'on supprime le champagne, le cognac et les grands crus bordelais, l'export ne va pas bien », a-t-il expliqué aux candidats.

Jean-Marie Barillère a également évoqué le risque que fait courir le Brexit à la viticulture car la Grande-Bretagne est le deuxième marché d'exportation des vins français. De même, aux États-Unis, Donald Trump menace d'augmenter les taxes sur les produits importés.

Pas un candidat n'a pris d'engagement ferme envers ses hôtes, chacun s'accrochant à son programme général ou agricole pour avancer quelques réponses. Marine Le Pen a réaffirmé que la sortie de l'Europe s'imposait. Elle milite pour la signature d'accords commerciaux bilatéraux. « Je suis convaincue que nous gagnerons davantage en ayant la maîtrise de notre commerce. »

De son côté, Emmanuel Macron s'est longuement attardé au Pavillon des vins. Accompagné d'Audrey Bourolleau, l'actuelle directrice de Vin et Société qui a pensé son programme agricole, le candidat d'En Marche est apparu intraitable sur l'export. « Je n'admets pas la concurrence déloyale », a-t-il affirmé.

De lui-même, il a introduit la question de l'environnement. « La viticulture a des défis importants à relever, notamment les produits phytosanitaires. Elle doit y répondre par l'innovation. » Mais elle ne doit pas tomber dans « le piège du bio comme modèle unique ».

Quant à Benoît Hamon, il s'est montré très à l'écoute, cherchant à comprendre les enjeux. « Avez-vous fait des études pour comprendre ce que l'on vous reproche à l'export ? Comment évolue le marché du cognac en Chine ? », s'est-il enquis, sans faire de proposition.

Tous les candidats ont également été briefés sur les importations de vins espagnols. Les représentants de la filière ont admis qu'elles sont légitimes. Mais ils demandent que les choses soient claires. Ce sujet a occupé de nombreuses réunions sur le Pavillon des vins. Jérôme Despey a ainsi rencontré, le 2 mars, Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), pour acter la création d'un groupe de travail entre les enseignes et la production (FNSEA, JA, AGPV). Ce groupe de travail sera chargé de mettre un peu d'ordre dans le rayon vins des grandes surfaces. « Le but est de construire une relation permanente avec la grande distribution comme l'ont fait les secteurs des fruits et légumes, du porc ou de la viande bovine », explique Jérôme Despey.

Ainsi, les interprofessions et la FNSEA réclament de pouvoir inscrire une signature tricolore sur les emballages. Verra-t-on apparaître des logos bleu-blanc-rouge sur les bouteilles de vins comme sur la viande française ? C'est en tout cas la volonté de Jean-Marie Barrillère et Jérôme Despey.

François Fillon choisit le Gard

FRANÇOIS FILLON dans les vignes de Bernard Angelras, avec Romain Angelras, fils du propriétaire. © P. GUYOT/AFP

FRANÇOIS FILLON dans les vignes de Bernard Angelras, avec Romain Angelras, fils du propriétaire. © P. GUYOT/AFP

En pleine tourmente, François Fillon a écourté son passage au Salon de l'agriculture, le 1er mars, esquivant le Pavillon des vins. Deux jours plus tard, il s'est rendu dans le Gard, sur l'exploitation de Bernard Angelras, président de l'IFV. Après une courte visite des vignes, il a déjeuné avec des viticulteurs et des responsables agricoles locaux. Au menu des discussions : la concurrence des vins espagnols. « Il estime que la France doit transposer plus simplement les textes européens. Il nous rejoint sur la nécessité d'avoir une même réglementation sur les produits phyto partout en Europe », relate Romain Angelras, le fils de Bernard. Les viticulteurs ont également évoqué le protectionnisme du nouveau président des États-Unis. « Si les USA veulent taxer nos produits, c'est au niveau européen qu'il faut réagir et taxer les produits américains qui entrent en Europe », aurait indiqué François Fillon. Autre sujet : l'environnement. « Il a déclaré qu'avant de fixer des objectifs de réduction de phyto, il faut avoir les moyens de les atteindre », indique Anaïs Amalric, coprésidente des JA du Gard.

Vin et Société défend la prévention

Ce n'est pas Joël Forgeau, président de Vin et Société, qui le dit mais l'OCDE : la France consacre seulement 2 % de son budget santé à la prévention de l'alcoolisme, alors que la moyenne des pays développés se situe à 3 %. Joël Forgeau, vigneron du Muscadet, a rappelé ces chiffres à tous les politiciens et demandé un bilan de la politique de lutte contre l'alcoolisme. « C'est un préalable à toute nouvelle orientation », explique Joël Forgeau. Ce dernier rappelle que la filière française défend le principe des repères de consommation qui a le mérite de la clarté pour le consommateur. Les candidats à la présidentielle ont sagement écouté son message, sans réagir.

Les Vif réclament une nouvelle réserve

Les Vignerons indépendants de France (Vif) ont présenté leurs « 18 propositions pour l'avenir » à tous les politiciens de passage sur leur stand. « Nous abordons la question de l'assurance revenu qu'il faut négocier dans un cadre européen », énonce Thomas Montagne, président des Vif, satisfait de voir l'Europe travailler sur la baisse du seuil de déclenchement de l'assurance récolte de 30 à 20 %. Les Vif souhaitent également la mise en place d'une « réserve de précaution » pour passer le cap des mauvaises années. Ce stock serait défiscalisé. « Il s'agit de permettre aux AOC qui n'atteignent jamais le rendement butoir de créer un stock libérable en cas de problème climatique », précise Thomas Montagne. Une sorte de VCI pour AOC peu productives.

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