« Ce congrès n'est peut-être pas une totale réussite, mais la démonstration de force que nous avons faite nous permet d'être optimistes pour la suite », résume Stéphane Héraud. Par ces mots, le président de l'Association générale de la production viticole (AGPV) a conclu les quatre heures de travaux du premier Congrès de la viticulture, le 6 juillet, à Bordeaux, réunissant les organisations nationales de la production (Cnaoc, VinIGP, Vif, CCVF et AGPV).
Invité de marque : le commissaire européen à l'Agriculture, Phil Hogan, arrivé la veille pour visiter l'ISVV de Bordeaux. Comme il l'a dit lui-même, il était là « pour faire des discours, mais aussi pour écouter ». Les représentants syndicaux en ont profité pour lui répéter un même message, sans fausse note : il faut préserver le modèle viticole européen.
« Nous sommes fermement attachés aux spécificités viticoles. Sans statut spécifique, on risque de tirer vers le bas la qualité de nos produits », prévient Michel Servage, le président de VinIGP. « Nous ne voulons pas d'aides directes, mais des fonds structurants pour adapter le vignoble et gagner des parts de marché », assène Jérôme Despey, le président du conseil des vins de FranceAgriMer. « On l'a dit au moins 20 fois en deux jours au commissaire européen. Mais ses réactions nous font penser que ce système ne sera pas remis en cause », résume Stéphane Héraud.
La profession veut conserver deux autres spécificités : la réglementation sur l'étiquetage et celle sur les autorisations de plantation. Elle refuse l'étiquetage des calories et des ingrédients. « Le vin est déjà extrêmement encadré et réglementé. Tout est prévu pour garantir au consommateur de hauts niveaux de qualité et de transparence », a martelé Thomas Montagne, président des Vignerons indépendants de France, ajoutant que les touristes venant dans son caveau ne lui ont jamais demandé le détail nutritionnel de ses bouteilles.
Quant aux autorisations de plantation : « Le dispositif a fait ses preuves. Il doit être conforté, amélioré et prolongé au-delà de 2030 », expose Stéphane Héraud.
À l'inverse, l'assurance récolte doit être réformée pour abaisser son seuil de déclenchement et modifier le calcul du rendement de référence. Reste l'inquiétude sur le montant de l'enveloppe nationale après 2018. Car Phil Hogan ne s'est pas avancé : « Je ne peux m'engager que sur le budget actuel. Je ne peux pas prédire l'avenir. Nous avons beaucoup d'incertitudes. Notamment, après le Brexit. »
Boris Calmette, le président de la Confédération des coopératives vinicoles de France (CCVF), récapitule : « Nous sommes rassurés sur l'OCM vin, mais inquiets quant au budget. Il faut se mettre en branle pour le maintenir. » « Nous avons mis une pièce dans la machine, maintenant il faut espérer gagner le gros lot », conclut Stéphane Héraud.
Ouvert aux cépages résistants
La veille du congrès, Phil Hogan s'est prêté à une dégustation à l'aveugle à l'ISVV de Bordeaux. Et c'est à un blanc, issu d'un nouveau cépage résistant au mildiou et à l'oïdium obtenu par l'Inra, qu'il a attribué la meilleure note et le prix le plus élevé. S'agissant de ces cépages, il a déclaré : « Nous devons continuer nos efforts pour moderniser le secteur vinicole européen grâce à l'innovation. Afin de préparer son avenir et se donner tous les moyens pour exploiter les nouvelles opportunités, surtout quand il s'agit des vins de qualité. » « Le commissaire est ouvert aux cépages résistants », traduit Bernard Farges, qui milite pour leur introduction dans les cahiers des charges des AOC.