Un loft modulable

À Douzens, dans les Corbières, la famille Alias accueille ses visiteurs dans un vaste loft où les petits comités trouvent leurs marques comme les groupes de 300 personnes.

Au domaine Sainte-Marie-des-Crozes, à Douzens (Aude), le caveau de vente a changé du tout au tout. Installé jusqu'en 2015 dans l'ambiance intimiste du chai à barriques, il a déménagé pour un loft spacieux privilégiant les matériaux bruts, très en vogue aujourd'hui. Une métamorphose voulue par Bernard et Dominique Alias.

C'est en 1997 que le couple reprend cette propriété familiale. À l'époque, toute la production est vendue en vrac. Le couple se fixe pour but de tout vendre en bouteilles. Ils investissent d'abord dans le vignoble et en cave pour accroître la qualité des vins. Puis, une fois qu'ils ont cinq cuvées à proposer, ils démarrent l'accueil au domaine, installant un espace de dégustation dans le chai.

« Cet espace est devenu trop petit pour accueillir des groupes. Aussi, quand nous avons eu l'opportunité d'acheter cette vieille bâtisse de 1900, juste à côté de notre cave, nous n'avons pas hésité », raconte Dominique Alias.

Tout est à refaire dans cet ancien chai de 450 m2 sur deux niveaux. D'emblée, les vignerons envisagent l'espace de dégustation et de vente à l'étage pour profiter de la magnifique vue offerte par une immense baie vitrée sur la montagne noire et les toits du village. Ils dédient le rez-de-chaussée au bureau et au stockage des vins finis et des matières sèches. Les clients sont accueillis dans le bureau, puis accompagnés à l'étage.

C'est là que Dominique Alias imagine un immense loft de 250 m2 agencé en plusieurs espaces pour répondre à toutes les demandes : un coin intime avec fauteuils et canapé pour les petits groupes, une grande table pour les groupes importants, un bar - un vrai comptoir de bistrot - et un espace destiné aux enfants avec jeu d'échecs, coloriages, etc. Le tout agrémenté de barriques mange-debout, peintes avec le visuel des différentes cuvées.

« Cet espace fonctionne que l'on soit trois cents ou deux-trois personnes », assure la vigneronne, qui a toujours été férue d'aménagement et de décoration.

Pour respecter l'esprit de la bâtisse, et sa belle charpente d'époque, elle choisit un style brut, mariant bois et métal. Pour la convivialité, elle décore le lieu avec des objets chinés, comme d'anciens chapeaux qu'elle a accrochés au mur ou une collection de tire-bouchons exposée dans une vitrine.

Les travaux ont duré moins d'un an. Les six premiers mois, toute l'infrastructure intérieure est refaite. Les deux mois suivants sont consacrés à la rénovation extérieure : toiture, isolation, climatisation... Puis c'est au tour des aménagements intérieurs et de la décoration. Un ami architecte a aidé Dominique Alias pour les calculs très pointus des charges sur les planchers. C'est elle ensuite qui a géré le chantier en direct avec les artisans locaux.

Le domaine n'a pas bénéficié des aides de FranceAgriMer : « Je ne pouvais pas être subventionnée si je supervisais moi-même les travaux », regrette la vigneronne. L'investissement total s'élève à 300 000 €. Outre l'aménagement du caveau, cette somme inclut l'achat de la bâtisse (15 000 €), la réalisation du stockage au rez-de-chaussée, la création de bureaux et d'un espace traiteur, à l'étage, dans le prolongement de la salle de dégustation. « C'est un investissement lourd. Nous l'avons fait pour notre fille, Christelle, qui nous a rejoints en 2012. Nous souhaitons lui céder un outil qui lui permette de vivre correctement. »

Depuis l'ouverture du caveau en juin 2015, les ventes ont grimpé en flèche. Anecdotique avant 2015, la vente au caveau représente aujourd'hui 15 à 20 % du chiffre d'affaires du domaine. Durant les vacances, le caveau n'a pas de mal à faire le plein. Situé au coeur du village, près de deux sorties d'autoroute, il est bien indiqué sur la route des vins mise en place par l'AOC Corbières.

Pour développer la clientèle, la jeune Christelle organise des séances de dégustation qui rompent avec les codes traditionnels. « Je suis une pipelette. Je partagerai avec vous une vision décomplexée, créative et marrante du vin », promet-elle sur le site, avec deux formules un rien provocatrices : « Entre filles ! » et « Mesdames, amenez-moi votre mari ! ». Pendant deux heures, elle explique à la gent féminine comment trouver son style de vin et aux couples, comment s'accorder sur le vin.

Avec 100 000 cols commercialisés par an, la famille Alias a presque atteint son objectif de tout vendre en bouteilles. Après deux petites récoltes, la pénurie se profile. « Tout est vendu ou réservé. Nous manquons de vin. » La rançon du succès.