Suite aux différentes études menées en pépinière sur les champignons associés aux maladies du bois (résultats parus dans Phytoma n°609 et n°621), de nombreux essais menés de concert entre le Sud-Est et le Sud-Ouest de la France ont permis d'évaluer l'efficacité de dix-sept moyens différents de désinfection des plants en pépinière à l'égard des champignons associés à ces maladies. Voici une synthèse des résultats obtenus.
Quel que soit le centre d'études où elles sont testées, les méthodes de désinfection de plants de vigne en pépinières sont généralement mises en œuvre durant la phase de réhydratation. En effet, c'est à ce stade que le matériel végétal est le moins fragile et qu'on peut donc envisager l'utilisation de divers process sans trop de dégâts sur la viabilité du plant.
Les plants traités suivent ensuite un itinéraire de fabrication classique et sont analysés au moment de leur commercialisation. Suivant les modalités, les taux de réussite, la disponibilité du matériel végétal... entre 80 et 300 plants traditionnels ou en pots sont analysés par modalité.
Évaluation de méthodes de désinfection
Les méthodes testées
Sept méthodes ont été testées sur des plants traditionnels stratifiés à l'eau : deux désinfectants bactéricides (hypochlorite de sodium et cryptonol), quatre produits biologiques (deux essences végétales et deux produits à base de champignons du genre Trichoderma) et un moyen physique, le traitement à l'eau chaude. Ce dernier a été testé avec trois modes d'application différents : application sur greffon et porte-greffe, application sur le greffé-soudé ou succession des deux applications.
Sur les plants en pot stratifiés à la sciure, outre les deux désinfectants, le traitement à l'eau chaude et un des deux Trichoderma testés également sur plants traditionnels, l'IFV a testé quatre autres Trichoderma sp., trois fongicides classiques, un engrais foliaire et un micro-organisme et, enfin, un autre traitement physique, l'ozonation.
Leur mode d'évaluation
L'évaluation de l'efficacité du process est basée sur le taux de présence dans le plant du champignon considéré. La méthode d'analyse utilisée est celle de Larignon et Dubos (1997).
Les plants sont découpés sur 6 niveaux (greffon, soudure et 4 niveaux du porte-greffe) comme le montre la figure 1. Les fragments de bois issus de ces niveaux sont mis en culture et la lecture des ensemencements est réalisée un mois plus tard. Les différents champignons associés aux maladies du bois sont recherchés : Phaeomoniella chlamydospora (Pch), Phaeoacremonium aleophilum (Pal), Diplodia seriata (Ds), Neofusicoccum parvum (Np), Phomopsis viticola (Pv) et Neonectria liriodendri (Nl). Lorsque des produits à base de Trichoderma sont testés comme moyen de « désinfection », un milieu inhibant la croissance de ces derniers est utilisé. En effet, ces micro-organismes poussent tellement vite qu'ils peuvent masquer le développement des champignons recherchés.
Les taux de contamination des différentes modalités sont comparés à un témoin constitué de plants issus d'un même lot mais dont l'eau de réhydratation n'a subi aucun traitement.
Résultats
Divers moyens éliminés
Tous les produits testés au fil des années sont répertoriés dans le tableau ci-contre.
Les temps de trempage et les concentrations sont à ajuster pour éviter les effets négatifs sur la viabilité des plants. La principale difficulté est de trouver un juste équilibre entre viabilité des plants et efficacité. La majorité des méthodes testées se sont malheureusement avérées inefficaces et trois d'entre elles affectaient la viabilité des plants.
Deux sortent du lot
Cependant un fongicide semble intéressant : l'association de cyprodinil et de fludioxonyl (Switch), seul produit diminuant fortement le taux de présence de Neofusicoccum parvum dans les plants en pots. Néanmoins ce résultat mérite d'être confirmé sur des niveaux de contaminations plus élevés.
La seule méthode donnant des résultats intéressants depuis plusieurs années est le traitement à l'eau chaude (50 °C pendant 45 mn) car il permet une baisse du taux de présence de D. seriata, P. chlamydospora et Phomopsis viticola. Ce traitement semble plus pertinent et efficace lorsqu'il est réalisé sur les greffés-soudés juste avant leur commercialisation. Le travail s'oriente aujourd'hui vers la recherche d'une méthode capable de diminuer voire l'éliminer N. parvum en complément du traitement à l'eau chaude. Dans cette optique, l'utilisation du Switch semble une piste à suivre.
Le travail continue
En 2009, le Ministère de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Pêche (MAAP) a décidé d'apporter 1,5 million d'euros sur trois ans pour la réalisation de cinq projets de recherche sur les maladies du bois, dans le cadre d'un appel à projets piloté par l'IFV, en collaboration avec le CNIV et l'APCA.
Un projet portant sur la recherche et l'évaluation de procédés permettant la production de plants indemnes de champignons associés aux maladies du bois a été retenu.
En 2010, de nouvelles méthodes de désinfection sont donc en cours d'évaluation dans différents centres de recherche français.
<p>* IFV Pôle Sud-Ouest - V'Innopôle Brames-Aigues. BP 22. 81310 Lisle/Tarn.</p> <p>** IFV Pôle Val-de-Loire - Château de la Frémoire. 44120 Vertou.</p> <p>*** SPBPVV, 384, route de Caderousse, 84100 Orange.</p> <p>**** Chambre d'agriculture du Vaucluse, 2 260, route du Grès. 84100 Orange.</p> <p>***** IFV Pôle Rhône-Méditerranée. Domaine de Donadille. 30230 Rodilhan.</p>