Cet arrêté traduit en droit français certaines recommandations de la directive européenne n° 2009/128/CE, dite « Utilisation durable » (sous-entendu « des pesticides », encore plus sous-entendu « à usage phytosanitaire »). Il s'inscrit, aussi, dans le cadre français du plan Ecophyto 2018. Il interdit les produits les plus dangereux et oblige à une sécurisation générale des pratiques.
Côté pratiques : afficher, baliser, vider
Voyons d'abord les pratiques. Pour pouvoir utiliser un produit phyto quel qu'il soit, même le plus doux et le plus « bio » qui soit, il faut désormais :
– informer le public par affichage au moins 24 heures avant le début de l'application, en indiquant « la date de traitement, le produit utilisé et la durée d'éviction du public » ;
– baliser les zones à traiter avant de commencer ;
– réaliser l'« éviction du public » (vider les lieux de toute personne autre que celle(s) réalisant le traitement), pendant le traitement lui-même puis le délai de rentrée légal qui, pour les produits pulvérisés ou poudrés sur la végétation en place, varie de 6 heures à 48 heures ;
– laisser le balisage et l'affichage jusqu'à la fin de la durée d'éviction du public.
Côté produits : dans les lieux « à personnes vulnérables »...
Côté produits, l'arrêté interdit presque tout dans les lieux fréquentés intensément par les personnes estimées les plus vulnérables. Il s'agit des enfants quel que soit leur état de santé et des personnes malades, convalescentes, handicapées et âgées. La liste des lieux concernés, des crèches aux hôpitaux et des cours de récré aux maisons de retraite, est donnée en annexe de l'arrêté (Tableau ci-joint, notes 1 et 2).
Il reste quand même des produits utilisables, ce sont ceux dispensés de tout classement ou affectés d'un classement seulement écotoxicologique mais pas toxicologique (Tableau). Leur liste est courte mais pas vide. Souhaitons qu'elle s'allonge !
En attendant, cela encourage les applicateurs à utiliser de tels produits phytos à l'innocuité garantie après avoir été testée, plutôt que :
– d'autres produits phytos plus dangereux ;
– des produits pas autorisés comme phyto donc pas testés comme tels et dont l'innocuité n'est de ce fait pas garantie.
... dans le reste des espaces verts publics
Pour le reste des parcs, jardins et espaces verts publics (sauf les aires de jeux pour enfants), ainsi que les terrains de sport et de loisirs ouverts au public, il y a trois catégories de produits (Tableau ci-contre) :
– ceux totalement interdits car contenant des substances toxiques à court ou à long termes ; la liste est bien plus courte que celle des produits interdits dans les lieux « à personnes vulnérables » ; mais en réalité, il existe très peu de produits phytos autorisés aujourd'hui en France qui entrent dans ces catégories ;
– ceux autorisés à la condition nécessaire de garder les lieux vides de tout public pendant au moins 12 heures après le traitement (en plus des exigences générales à respecter d'« afficher, baliser, vider » que l'on a déjà citées plus haut) ;
– ceux qui sont autorisés aux conditions générales « afficher, baliser, vider » ; leur liste est limitée mais plus longue que celle des produits utilisables dans les lieux « à personnes vulnérables ».
Quatre limites à signaler
Précisons que cet arrêté a quatre limites.
D'abord, il ne s'applique pas aux lieux qu'il ne cite pas, notamment la voirie.
Par ailleurs, les restrictions sur le choix des produits ne s'appliquent pas aux traitements de lutte obligatoire avec arrêtés (ministériels, préfectoraux, etc.) à la clé ; en effet, dans certains cas il n'existe pas de produits non classés (pour les lieux « à personnes vulnérables ») ou à classement bénin (pour les autres lieux concernés) autorisés contre la cible visée alors que la lutte s'impose.
Ensuite, l'interdiction « à moins de 50 m des bâtiments abritant des personnes vulnérables » ne s'applique pas au delà de « la limite foncière » de ces établissements, droit de propriété oblige.
Enfin, toutes ces interdictions visant à limiter l'usage des pesticides les plus dangereux ne s'appliquent qu'aux produits phytos titulaires d'AMM et destinés à des usages phytos liés à la santé végétale. Mais pas aux autres pesticides (soins vétérinaires, désinsectisation, dératisation, désinfection, démoustication, etc.)
Mais chut ! Là on touche à une limite générale du plan Écophyto 2018.