dossier - Bonnes pratiques, commencer très tôt

Réglementation, à vos calendriers

MARIANNE DECOIN. - Phytoma - n°663 - avril 2013 - page 14

Mise en œuvre des certiphytos avec bientôt les collectivités locales, premiers certificats d'entreprise, dernière année de contrôles obligatoires échelonnés pour les pulvés. Attention aux échéances à respecter !

Depuis un an, la réglementation qui cadre les pratiques phytosanitaires a connu peu de sorties de nouveaux textes. Mais il y a eu le chantier lancé l'année précédente par le décret créant le certiphyto et réformant l'agrément des entreprises.

Et il faut faire le point sur l'application des réglementations en place. Rapport d'étape. Avec les échéances.

Certiphytos individuels

Ce printemps, les collectivités territoriales aussi

Côté certiphyto, il y a du nouveau : les applicateurs des collectivités territoriales peuvent enfin passer leur certificat individuel !

Une note de service ministérielle publiée le 1er février 2013 a donné le feu vert à l'habilitation des organismes de formation pouvant faire passer ce certificat. Elle a ouvert le guichet de candidature. Le 31 mars, plusieurs centres de formation avaient reçu leur habilitation et préparent les formations. D'autres habilitations pourraient suivre.

Ainsi, des formations certiphytos « collectivités territoriales » vont se tenir avant l'été 2013 (ex. celle de l'AFPP les 4 & 5 juin, voir p. 62).

Équivalences, où est la logique ?

Reste un motif de perplexité : elle concerne l'équivalence, ou plutôt la non équivalence, entre les certiphytos « collectivités territoriales » et les autres.

On sait que certaines catégories de certiphyto en incluent d'autres (Tableau 1). Par exemple, le certiphyto « décideur en exploitation agricole » inclut les certificats « opérateur en exploitation agricole » mais aussi « opérateur en travaux et services ». Ou encore, le certificat « conseil à l'utilisation » inclut les certificats « mise en vente, vente » et les certificats d'utilisateurs en exploitation agricole et en travaux et services.

Mais, apparemment, il n'y a aucune passerelle entre les certificats « collectivités territoriales » et les autres. Pourquoi ?

Les municipalités qui ont devancé l'appel et fait preuve d'un beau civisme en envoyant leur personnel passer un certiphyto « travaux et services » doivent se sentir un brin trahies.

Agriculteurs, bilan Vivea 2012

Et du côté des agriculteurs, où en est-on ? En 2012, Vivea, le fonds pour la formation des agriculteurs, annonce avoir financé la formation de précisément 38 746 stagiaires certiphytos en 3 313 formations de 11,70 stagiaires en moyenne par session. À noter : il n'y a en fait « que » 2 963 formations pour les certiphytos « en exploitation agricole », soit 34 000 à 35 000 agriculteurs ayant eu ce certiphyto.

Environ 1 500 d'entre eux ont suivi une des 133 journées de formation supplémentaires pour obtenir le certiphyto « Décideur en travaux et services ». Ce dernier leur permet d'effectuer des traitements facturés en prestation de service (« travail à façon »). Attention, ils doivent obtenir aussi la certification et l'agrément comme ETA, entreprise de travaux agricoles (voir ci-après).

En tout cas, sachant que, selon Vivea, environ 130 000 agriculteurs avaient obtenu leur certiphyto fin 2011, on est donc, début 2013, à 165 000 agriculteurs formés. Moins de la moitié des chefs d'exploitation agricole.

Sondage début mars 2013

Pourtant, un sondage réalisé début mars pour le n° d'avril de la revue « Agrodistribution » fait état de 71 % d'agriculteurs ayant déjà leur certiphyto. Contradiction ? Pas forcément. D'abord, on peut obtenir le certiphyto autrement que via une formation financée par Vivea : autre formation ou reconnaissance d'un diplôme.

Ensuite, l'échantillon de l'enquête est représentatif « des exploitations ayant au moins 50 ha de SAU ». Il y en a 190 000 selon le recensement agricole de 2010. Ce serait donc environ 135 000 des chefs exploitations de 50 ha et plus qui auraient leur certiphyto au 1er mars. Cela suggère que les « plus de 50 ha » auraient constitué le plus gros des effectifs des formations. Et que seuls 30 000 à 40 000 des 300 000 agriculteurs de moins de 50 ha seraient formés.

Certains prendront leur retraite d'ici octobre 2014, ou n'appliquent pas de phytos (traitements rares, appel à une ETA), mais il faudra accélérer pour que tous les agriculteurs se forment avant l'échéance.

Rappelons que même les agriculteurs biologiques doivent se former : les produits UAB (utilisables en agriculture biologique) sont eux aussi des produits phytos ! Quant à leur usage, il nécessite aussi de bonnes pratiques.

Tendances 2013

Pour 2013, au fait, Vivea a comptabilisé 1 897 formations déjà réalisées, engagées ou prévues, avec 23 785 stagiaires, dont 1 576 formations pour le certiphyto « en exploitation agricole ». Soit environ 20 000 agriculteurs, comme en avril 2012.

On peut tabler sur 35 000 nouveaux certiphytos d'ici fin 2013 via une formation gratuite pour l'agriculteur car financée par Vivea. Attention, au delà, la ligne budgétaire annuelle du fonds sera épuisée et il n'y aura plus de place de formation gratuite !

Certifications d'entreprises et leur agrément

Attention, l'échéance approche

Mais une échéance plus proche concerne d'autres entreprises (Tableau 2). La loi exige que d'ici le 1er octobre prochain (c'est bientôt !), soient certifiées puis agréées :

les entreprises appliquant des produits phytos en prestation de service, en agriculture et en zones non agricoles ;

celles distribuant ces produits aux professionnels ou amateurs (« grand public ») ;

les entités délivrant du conseil (entreprises, chambres d'agriculture, etc.)

Contrat, certificateurs accrédités

De plus, une entreprise voulant se faire agréer devait s'assurer et passer contrat avant le 1er octobre 2012 avec un organisme certificateur lui-même accrédité.

Au 12 de ce mois d'avril, 7 organismes sont accrédités : SGS ICS, Control Union Inspection France, Bureau Veritas Certification France, Certis SAS, Intertek Certification France, Ocacia et Qualisud. Cinq autres (Afnor Certification, Agrocert, Aucert, Biotek Agriculture et Certisud) sont recevables, un contrat avec eux est valable.

Distribution agricole

Côté distribution agricole, tant Coop de France que FNA (Fédération du négoce agricole) estiment que tous leurs adhérents ont passé contrat. Certains ont déjà fait former le personnel concerné et passé l'audit avec l'organisme certificateur. FNA annonce 13 négoces certifiés au 2 avril et Coop de France 17 de ses coopératives adhérentes.

Côté application

Côté entreprises d'application, l'AAPP (Association des applicateurs professionnels phytopharmaceutiques) garantit que tous ses adhérents ont passé contrat, formé leur personnel, ont ou vont passer les audits avant l'été et sont ou seront agréés.

Pour sa part la FNEDT (Fédération nationale des entrepreneurs du territoire, qui représente les entreprises de travaux agricoles, forestiers et ruraux) estimait début 2012 que 40 % des 13 000 ETA seraient concernées par la certification, sans compter les agriculteurs faisant du « travail à façon » d'application de produits phytos. Elle a sensibilisé ses troupes et les accompagne pour le passage de contrat et les formations (avec l'AAPP et le CS3D, site certificationphytosanitaire, voir « Pour en savoir plus »).

De même, l'UNEP (Union nationale des entrepreneurs du paysage) a sensibilisé ses 2 500 adhérents car certains, mais pas tous, appliquent des produits phytos.

Les fédérations n'ont pas le compte des contrats passés et certifications obtenues. Passage de contrat n'implique pas certification. L'application de phytos représente une part minime de l'activité de certaines entreprises : elles peuvent abandonner après un audit révélant qu'il y a trop à faire pour satisfaire aux exigences.

Et la distribution grand public ? Des salariés de grande distribution généraliste ont suivi des formations au certiphyto, nous ont révélé des centres de formation. Mais certaines enseignes n'auraient pas bougé. Vont-elles retirer les produits phytos de leur rayon jardin le 1er octobre prochain ?

Il semble que l'on va vers la spécialisation et la professionnalisation accrue de l'application/ prestation de service et de la distribution aux amateurs. Tant mieux.

1- Les racines des faits, rappel historique

Une bonne part de la réglementation entourant les pratiques phytosanitaires aujourd'hui provient de textes réglementaires plus anciens.

L'arrêté du 12 septembre 2006 a été publié au JORF(1) le 21 septembre. Dit « sur l'utilisation des phytos », il fonde la reconnaissance officielle des outils de réduction de dérive (voir p. 32 à 37) et celle des procédés de traitement des effluents phytos (voir p. 44 à 49), tout en encadrant globalement la gestion de ces effluents (voir p. 38 à 43). Pour mémoire, il avait aussi harmonisé les ZNT et délais de rentrée, et interdit de pulvériser par vent dépassant force 3.

La Loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA) n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 a été publiée le 31. Elle a instauré le contrôle obligatoire des pulvérisateurs à partir de 2009. Ses décrets d'application du 1er décembre 2008 (n° 2008-1254 et 2008-1255) sont parus le 3, suivis de leurs arrêtés du 18 publiés le 26, toujours de décembre 2008. Pour l'application en 2012 et les échéances aujourd'hui, voir l'encadré 2 et le tableau 3 pages suivantes.

La directive Utilisation durable (en fait, relative à une « utilisation des pesticides compatible avec le développement durable ») n° 2009/128/CE du 21 octobre 2009 est parue au JOUE(2) du 24 novembre. Sa phase de préparation a inspiré le plan Ecophyto lancé en 2008 suite au Grenelle de l'Environnement de 2007. Cette directive est le cadre européen des articles sur la protection des plantes dans la loi Grenelle 2 (Loi n° 210-788 du 12 juillet 2010 publiée au JORF du 13 juillet).

Le décret du 18 octobre 2011, publié le 20, applique l'article 94 de Grenelle 2 réformant l'agrément des entreprises et créant le certificat individuel, dit Certiphyto.

Ses arrêtés du 21 octobre 2011 publiés le 22 concernent 7 des 9 catégories de certiphytos. L'arrêté du 7 février 2012 concerne les deux catégories restantes, celles des collectivités territoriales.

Diverses notes de service ont permis de démarrer les opérations évoquées dans cet article. Elles concernent :

pour la certification d'entreprise, l'acréditation des organismes certificateurs.

pour les certiphytos, l'habilitation de centres de formation continue, la liste des diplômes de formation initiale, les référentiels de formation, etc.

La note sur les certiphytos collectivités territoriales, identifiée DGER/SDPOFE/N2013- 2014 et datée du 30/01/2013, est sortie au BO du MAAF(3) le 1er février 2013.

(1) Journal officiel de la République française.

(2) Journal officiel de l'Union européenne.

(3) Bulletin officiel du ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt.

Tableau 1 : Certiphytos (= certificats individuels), équivalences et « non-cumuls »

2 - Contrôle des pulvérisateurs : où en est-on ?

La réglementation sur le contrôle obligatoire des pulvérisateurs est applicable depuis début 2009 (voir encadré 1). Elle est en gros stabilisée.

La seule évolution réglementaire est celle de la liste des organismes agréés pour pratiquer ce contrôle. La dernière version, datée du 25 janvier 2013, comprend 97 noms d'organismes de 19 régions et qui rayonnent dans les voisines.

Quant aux échéances, on en a déjà parlé… Mais il faut refaire le point.

En effet, jusqu'à maintenant, l'échéance pouvait dépendre davantage du n° SIREN de l'exploitation que de l'âge de l'appareil ou de la date du dernier contrôle. En 2013, c'est fini :

si l'appareil date de 2008 ou avant et qu'on ne l'a pas fait contrôler depuis 2008, il faut le faire en 2013 ;

s'il est plus récent ou a été contrôlé, cela dépend de la date de sortie d'usine ou du dernier contrôle (voir Tableau 3).

Nombre de contrôles ? 22 600 appareils y sont passés en 2012. Bilan : 75 000 appareils contrôlés de 2010 à 2012 inclus, et autour de 20 000 en 2008 (contrôle volontaire). Moins de la moitié des appareils seraient en règle parmi ceux de plus de cinq ans (il y en aurait de 200 000 à 250 000).

Par ailleurs, selon une enquête réalisée en février pour La lettre de Machinisme & Réseaux d'avril, 69 % des agriculteurs ayant un pulvérisateur de plus de 5 ans l'ont fait contrôler. Contradiction ?

Non. L'enquête portait sur des exploitations d'au moins 50 ha. Or il y en a environ 190 000. 60 % des sondés ayant un pulvérisateur à faire contrôler, cela fait 114 000 appareils. Les 69 % contrôlés représenteraient 78 000 unités. Resteraient seulement 17 000 appareils contrôlés dans les exploitations de moins de 50 ha.

En général, les contrôlés sont satisfaits. 40 % des défauts constatés (petites fuites, manomètre ou buses à remplacer) sont réparés le jour-même.

Tableau 2 : Certiphyto individuel, certification et agrément d'entreprise, les échéances

(1) C'est-à-dire faisant appel à ses salariés pour appliquer des produits phytos sur son emprise. Ex. ministère, hôpital, club de golf ou de tennis, hôtel de tourisme ou tout autre structure touristique avec jardin ouvert aux clients, gestionnaire d'autoroute (pour les aires de repos, talus et bas-côté), d'aéroport, port, SNCF, toute entreprise ayant un « jardin de la cafétéria du siège social » et/ou des surfaces à désherber, et même particulier assez fortuné pour employer directement des jardiniers professionnels.

(2) Ex. ETA (entreprise de travaux agricoles), agriculteur travaillant à façon, entreprise du paysage, applicateur AAPP, prestataire de service en expérimentation phytosanitaire.

Tableau 3 : Contrôles des pulvérisateurs, les échéances.

Vous avez un pulvérisateur « de type agricole(1) », quand devez-vous le faire contrôler ?

(1) Que vous soyez agriculteur ou pas (ex. : entreprise du paysage, gestionnaire d'espace vert ou même particulier).

(2) Date de 1re mise sur le marché de l'appareil, pas forcément de votre achat.

(3) Même s'il a subi un contrôle volontaire en 2007

(4) Si votre n° SIREN est compris entre 00 et 79 inclus ou si vous n'avez pas de n° SIREN, vous auriez dû faire contrôler votre appareil avant ; faites-le le plus tôt possible.

RÉSUMÉ

- CONTEXTE : Concernant les obligations réglementaires en lien avec les pratiques phytosanitaires publiées les années précédentes, il y a eu depuis un an des évolutions réglementaires (nouveaux textes sur le certiphyto) et l'avancement de leur application (pour le certiphyto, la certification et l'agrément d'entreprise ainsi que pour le contrôle des pulvérisateurs).

- CERTIPHYTO : Le dernier texte manquant pour pouvoir démarrer les formations menant aux certiphytos pour l'utilisation des produits phytos en collectivités territoriales a été publiés en février 2013. Il donne le feu vert à l'habilitation des organismes de formation. Celles-ci vont pouvoir démarrer avant l'été.

Les échéances sont rappelées : 1er octobre 2013 ou 2014 selon la catégorie de certiphyto.

Le point est fait sur l'avancement du certiphyto pour les agriculteurs.

- CERTIFICATION D'ENTREPRISE : Pour les entreprises devant être certifiées, les échéances sont proches (1er octobre 2013). La liste des organismes certificateurs accrédités est donnée.

Des éléments sont donnés sur l'avancement des certifications selon les familles d'entreprise (distribution agricole coopérative et privée, entreprises de service en agriculture et ZNA, distribution grand public)

- CONTRÔLE DES PULVÉRISATEURS : Par ailleurs, les échéances concernant le contrôle des pulvérisateurs sont données. Le point est fait sur la réalisation de ces contrôles.

- MOTS-CLÉS : bonnes pratiques phytosanitaires, réglementation, produits phytopharmaceutiques (= phytos), certiphyto, collectivités territoriales, certification d'entreprise, agrément, échéances, contrats, contrôle des pulvérisateurs.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEUR : *M. DECOIN, Phytoma.

CONTACT : m.decoin@gfa.fr

LIENS UTILES :

http://e-agre.agriculture.gouv.fr (info MAAF/agrément)

www.vivea.fr

https://gippulves.cemagref.fr, bientôt www.gippulves.fr

www.aapp-asso.com

www.fnedt.org (et www.certificationphytosanitaire.fr)

www.entreprisesdupaysage.org

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