Tout d'abord, le transfert à l'Anses(1) des décisions d'AMM. Jusqu'ici, l'Anses publiait un avis portant notamment sur l'évaluation des risques. Puis le MAAF donnait ou non l'AMM (ou la retirait), en fonction de cet avis mais aussi d'autres facteurs (ex. : compatibilité avec la réglementation européenne, risques phytosanitaires ou sanitaires combattus par le produit plus lourds que les risques liés à son application, etc.). Le projet de loi prévoit qu'il ne pourra plus le faire.
Ainsi, la séparation de l'évaluation du risque et de sa gestion, principe au nom duquel avait été créée l'Afssa(2), fusionnée ensuite avec l'Anses, ne s'appliquera plus à l'octroi des AMM. Restera-t-il la gestion du risque post-AMM ?
À noter : l'octroi de l'AMM par l'agence de sécurité qui évalue les produits est déjà en vigueur en France pour les médicaments vétérinaires (par l'Anses) et les médicaments (par l'ANSM(3)).
Par ailleurs, la publicité est restreinte. Précisément : encore plus restreinte.
En effet, la loi Grenelle 2 de 2010 interdisait, déjà dans son article 105(4) la publicité des produits phytos sous forme télévisée grand public, radiodiffusée et en affichage extérieur en dehors des points de vente. Restait autorisée (avec des règles de contenu dont notamment l'interdiction de certaines mentions), la PLV ou publicité sur les lieux de vente (affichage extérieur et intérieur), et la publicité sur d'éventuelles chaînes télévisuelles spécialisées, dans la presse papier et sur Internet (titres spécialisés ou grand public).
Le projet de loi interdit désormais « toute publicité commerciale destinée au grand public » (donc y compris en presse papier, Internet, télévision spécialisée et sur les lieux de vente, en plus de l'interdiction radio-télé-affichage), « ainsi que toute publicité en dehors des points de distribution » (sous-entendu professionnels, ex. : coopérative ou négociant, puisque le grand public ne doit pas être touché), « et des médias spécialisés » (papier ou autres… mais ne visant pas le grand public, voir ci-dessus)…
Mais attention, cela ne concerne pas tous les produits.
Car les produits de biocontrôle « figurant sur une liste établie par l'autorité administrative » sont exclus de cette interdiction. La liste est probablement celle du Nodu vert bicontrôle(5).
En clair, cela signifie que la publicité pour ces produits sera autorisée y compris dans les médias grand public (télévision, radio, presse papier, Internet) et par affichage sur et hors les lieux de vente.
La mesure est cohérente avec la volonté d'encourager l'usage des produits de biocontrôle parmi les alternatives à l'usage des autres produits phytos.
De même, l'agrément pour l'application de produits phytos ne serait plus exigé des entreprises pratiquant cette application en prestation de service, sous condition d'appliquer, en matière de produits phytos, seulement des produits de biocontrôle. Nette simplification administrative et encouragement à l'usage de ces produits, donc moindre tentation d'utiliser des produits sans AMM. Là encore, c'est cohérent. Mais attention :
– le projet de loi ne dispense pas de certiphyto (certificat individuel) les salariés applicateurs de ces produits de biocontrôle, pas plus qu'il n'en dispense les autres professionnels applicateurs : agriculteurs, leurs salariés, agents de collectivités territoriales, salariés appliquant hors cadre prestation de service,
– c'est un PROJET de loi ! Pas encore une loi... Aujourd'hui, seule la loi actuelle s'applique.
Or, depuis le 1er octobre, elle oblige les entreprises prestataires de service à être agréées pour pouvoir appliquer tout produit phyto – même de biocontrôle.
Toute entreprise non agréée doit donc arrêter toute application, quitte à réintroduire des applications de produits de biocontrôle dans son offre de prestation une fois la loi présentée, votée, adoptée et rendue applicable (décrets, etc.).
Et de toute façon, il faudra que ses applicateurs aient leur certiphyto.
De plus, les vendeurs dépassant un seuil de vente annuel de produits phytos (là encore, ceux de biocontrôle en seront exclus) seront obligés de « mener des actions permettant d'économiser ces produits ». Le seuil devrait être défini par décret.
Enfin, les certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques (explications p. 9 et 10) pourront être créés par ordonnance. Avec une phase expérimentale envisagée.
À noter que ces économies ne concerneront pas, là encore, les produits de biocontrôle.
<p>(1) Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.</p> <p>(2) Agence française de sécurité sanitaire de l'alimentation.</p> <p>(3) Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.</p> <p>(4) Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010. Voir « Et la protection des plantes, Grenelle ? » dans <i>Phytoma</i> n° 636, août-septembre 2010, p. 8 à 11.</p> <p>(5) Le Nodu vert est arrivé. Phytoma n° 657, octobre 2012, p. 4 et 5.</p>