dossier - Espaces verts et jardins

Santé et nutrition dans les jardins et espaces publics : une année mouvementée

QUENTIN PROTSENKO* - Phytoma - n°675 - juin 2014 - page 36

Pour les fabricants des produits concernés, les marchés sont en baisse et l'évolution du cadre réglementaire pose question. Il y a des actions, notamment autour du biocontrôle, des produits naturels et du diagnostic. Bilan.
Stand « Clinique des Plantes » en 2012. De plus, actuellement, la Clinique est sur le net.      L'UP J, son organisateur, regroupe les fabricants de produits phytos pour le marché professionnel « espaces verts » et les fabricants de produits phytos, biocides et de nutrition pour les jardins privés (marché amateur), que ces produits soient d'origine chimique, minérale ou biologique. Photo : M. Decoin

Stand « Clinique des Plantes » en 2012. De plus, actuellement, la Clinique est sur le net. L'UP J, son organisateur, regroupe les fabricants de produits phytos pour le marché professionnel « espaces verts » et les fabricants de produits phytos, biocides et de nutrition pour les jardins privés (marché amateur), que ces produits soient d'origine chimique, minérale ou biologique. Photo : M. Decoin

Lors de son assemblée générale du 17 juin 2014, l'UPJ a publié les chiffres 2013 des marchés des produits de nutrition et de protection des végétaux et espaces en zones non agricoles (ZNA).

Le syndicat a aussi fait le point sur ses activités, dans un contexte difficile rappelant son engagement d'information sur les bonnes pratiques et prônant la complémentarité des méthodes chimiques et biologiques.

Les marchés « phytos » espaces verts et jardin en 2013 : chiffres clés

Phytos pros : la tendance à la baisse est confirmée

La baisse structurelle du marché phytosanitaire espaces verts observée depuis 2008 se confirme (Figure 1). Le chiffre d'affaires des produits phytos passe de 37,94 millions d'euros en 2012 à 34,75 millions d'euros pour 2013, soit une baisse de 8,38 %.

Ceci s'explique en majeure partie par la pression sociétale (Ecophyto, etc.) poussant de nombreuses collectivités à mettre en place des plans de désherbage, démocratisant ainsi les méthodes alternatives. En effet, la plus grande baisse a eu lieu sur les désherbants d'allées de parcs, jardins et trottoirs (PJT), affichant une baisse de 37 % entre 2012 et 2013. On observe à l'inverse une hausse des produits fongicides (+ 8,44 %), les insecticides restant stables (+ 0,79 %).

Le marché amateur structurellement stable avec des fluctuations

Le marché du jardin amateur se porte mieux que celui des espaces verts, bien qu'affichant une baisse de 4,7 % sur la totalité de l'activité. Produits de protection (phytosanitaires plus biocides) et de nutrition confondus, le chiffre d'affaires 2013 est de 226,16 millions d'euros, contre 237,31 en 2012.

Concernant la protection (Figure 1), le marché retrouve le niveau de 2010 après les hausses observées en 2011 et 2012. Le marché amateur fluctue annuellement selon le climat mais reste structurellement stable en valeur (il baisse en tonnage). Les produits phytos affichent la plus forte baisse, de 9,54 % par rapport à l'an dernier, suivis des biocides en baisse de 5,35 %.

Du côté de la réglementation

Vote de la loi « Labbé »

L'adoption de la loi 2014-110, dite « Labbé », le 23 janvier dernier, visant à interdire l'usage des produits phytopharmaceutiques d'ici à 2020 dans les espaces verts ouverts au public et 2022 dans les jardins amateurs, à l'exception des produits UAB et de biocontrôle, est un coup dur pour la profession. En effet, l'UPJ a toujours été un partenaire volontaire des pouvoirs publics dans l'encadrement et la diminution de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques.

Cette loi, prohibitive et votée « à la va-vite », a rompu le dialogue constructif qui avait permis de réduire de 40 % ces quatre dernières années les tonnages des produits amateurs et de 26 % ceux des produits espaces verts.

Réactions de l'UPJ

Dans ce contexte, l'UPJ a dénoncé les accords cadres volontaires signés sur les zones non agricoles en 2012 et s'est retirée des instances « Ecophyto », dont le mot d'ordre était « réduire et améliorer l'utilisation des phytos » et non les prohiber de façon pure et simple.

Par ailleurs, l'UPJ a déposé une plainte au niveau de la Commission européenne, dénonçant une entrave au principe de libre circulation des marchandises ainsi qu'un manquement à la directive 98/34 qui oblige les États membres à notifier à la Commission tout projet de règle technique relative aux produits trois mois avant son adoption dans le droit national. En effet, la notification a été faite le jour de l'adoption de la loi. Que la plainte aboutisse ou non, la notification n'a pas été faite dans les temps, ce qui rendrait la loi non opposable.

UPJ et biocontrôle

Promotion du biocontrôle

Malgré son retrait des accords cadres et de facto de leurs avenants biocontrôle d'avril 2013, l'UPJ continue son action de communication et de promotion des produits de biocontrôle tant au niveau des fabricants, du grand public que des utilisateurs professionnels.

Le syndicat a la particularité de regrouper des producteurs de produits phytosanitaires, qu'ils soient d'origine chimique ou biologique, tous destinés aux professionnels et amateurs des ZNA.

L'UPJ est aussi membre de l'Académie du biocontrôle qui œuvre pour la diffusion des connaissances théoriques et pratiques sur toutes les solutions de biocontrôle existantes. Le syndicat est de ce fait l'interlocuteur incontournable concernant le biocontrôle dans les ZNA.

Complémentarité des méthodes

Sa position a toujours été de prôner la complémentarité de ces méthodes avec les méthodes chimiques, ainsi que leur utilisation raisonnée.

En effet, malgré les efforts constants des producteurs dans le développement de nouveaux produits toujours plus respectueux de l'environnement et de la santé de l'utilisateur (produits à base de substances de base ou à faible risque, PNPP, biostimulants, pièges à phéromones...), il n'existe pas forcément de solution alternative à tous les problèmes, et le chimique doit pouvoir rester la solution de dernier recours.

Certificats autour des produits de protection

Certiphyto : une question d'échéances

Le certiphyto mis en place depuis 2011 a atteint sa phase de croisière, avec plus de 300 000 professionnels certifiés.

Mais il reste des collectivités et des professionnels qui ne sont pas encore formés. À la suite de ce constat, le projet de loi d'avenir pour l'agriculture prévoit de repousser la date limite à novembre 2015 pour les utilisateurs professionnels.

Pour les titulaires d'un certiphyto expérimental délivré en 2009-2011, il faudra penser à le repasser : le certificat étant valable 5 ans, l'échéance approche à grands pas !

Certibiocides : formation et équivalences

L'arrêté du 9 octobre 2013 rend l'obtention d'un certibiocide obligatoire à compter du 1er juillet 2015 pour les utilisateurs et distributeurs de certains produits uniquement destinés aux professionnels.

Ce certificat sera délivré par le ministère de l'Environnement et peut être obtenu après une formation de trois jours, indépendante du certiphyto. Cette formation est réduite à un jour pour les titulaires de l'un des certiphytos suivants ou équivalents :

– pour l'activité « utilisation à titre professionnel des produits phytopharmaceutiques » : les certiphytos « décideur en travaux et services », « opérateur en travaux et services » ; « applicateur » ou « applicateur opérationnel » en collectivités territoriales ;

– pour l'activité « mise en vente, vente des produits phytos » le certiphyto « distribution de produits professionnels ».

Clinique des plantes

Sur le terrain...

La Clinique des plantes de l'UPJ est présente sur diverses manifestations, animée par ses médecins des plantes bénévoles afin d'apporter conseils et diagnostics aux jardiniers accompagnés de photographies ou d'échantillons de leurs plantes malades. Ces cliniques ont eu lieu en région parisienne lors des fêtes des plantes de Saint-Jean-de-Beauregard à l'automne et au printemps derniers, et dans le Morbihan lors de « Plantes en fête », à Sainte-Anne-d'Auray.

Que le problème soit lié à des « bioagresseurs » (ravageurs ou maladies) ou « abiotique » (lié à l'arrosage, à la nutrition, etc.), chacun repart avec un diagnostic et des conseils sur les bonnes pratiques et solutions adaptées au problème. Prochaines Cliniques du 26 au 28 septembre à Saint-Jean-de-Beauregard et les 4 et 5 octobre à Auray.

...et aussi sur internet

Fort de son succès sur les manifestations, l'UPJ dématérialise sa Clinique des plantes. Le site internet www.cliniquedesplantes.fr met en ligne un outil de diagnostic simple, didactique et gratuit à disposition des jardiniers amateurs.

L'internaute, par questions-réponses, obtient rapidement un diagnostic et des solutions adaptées à son problème. Particularité : le diagnostic est possible même sans connaître le nom de sa plante ! Il y a aussi des conseils sur les pratiques culturales et la prophylaxie afin d'anticiper l'attaque d'un ravageur ou le développement de pathogènes.

Sur le terrain, la majorité des difficultés rencontrées par les jardiniers sont d'ordre abiotique. Cet outil en ligne a la particularité d'intégrer aussi les symptômes liés aux mauvaises pratiques d'arrosage ou de nutrition des plantes.

La tendance se confirme en ligne : les principales fiches visitées sont celles liées aux carences et à l'arrosage. Ainsi, le diagnostic est un excellent moyen d'éviter des traitements inutiles.

En constante évolution, le site répertorie actuellement 500 pathologies pour 40 espèces végétales et s'illustre progressivement afin de faciliter le diagnostic par photographies des symptômes caractéristiques des maladies et ravageurs. Si l'internaute désire obtenir un complément d'information ou poser une question très pointue, il peut contacter un médecin des plantes par l'intermédiaire d'un questionnaire détaillé.

Nous avons plus de 200 visites quotidiennes, signe de l'étroite relation entre le jardinier amateur et ses plantes et de son besoin d'information et conseils adaptés.

Fig. 1 : Chiffres d'affaires, tendance à la baisse

Évolution des chiffres d'affaires des produits de protection vendus par les adhérents de l'UPJ. Les MFSC pour amateurs ne sont donc pas pris en compte.

*« Autres produits de protection jardins d'amateurs » : avant 2012, cette catégorie regroupait les produits phytos de jardin autres qu'herbicides (fongicides, insecticides contre ravageurs des plantes et produits mixtes) et les biocides de jardins (rodenticides, taupicides, molluscicides, antimousse surface dure, antitermite, rampants, mouches, moustiques... bref, les produits de protection au jardin qui ne sont pas appliqués sur des plantes).

À côté des phytos, MFSC et biocides

MFSC : la marque Produit Naturel est un réel succès

La marque Produit Naturel concerne pour l'instant les amendements organiques et supports de culture, qui sont des MFSC, matières fertilisantes et supports de culture. Les produits marqués Produit Naturel sont certifiés 100 % naturels par Bureau Veritas Certification.

Ils ont le vent en poupe, reflet d'une attente forte des consommateurs.

En effet, 375 attestations sont actuellement délivrées pour cette marque contre 250 l'année dernière.

Le référentiel est en évolution afin d'y intégrer les produits de paillage et les biostimulants naturels.

Commission permanente MFSC

À l'instar de ses commissions permanentes phytos et biocides, l'UPJ a créé cette année une commission permanente MFSC afin de permettre à ses adhérents de suivre au plus près l'actualité réglementaire dans ce domaine.

Nous participons par notre expertise technique à l'élaboration des normes MFSC ainsi qu'aux différentes commissions du ministère de l'Agriculture pour la refonte de la réglementation nationale en harmonisation avec les textes européens.

Guide biocide

L'activité biocide n'est pas en reste, avec la publication du Guide des bonnes pratiques de l'utilisation des produits biocides à destination des utilisateurs professionnels. Gratuit, disponible sur le site UPJ (www.upj.fr), ce guide par le biais de 18 fiches permet de décrypter la réglementation des produits biocides et détaille leurs bonnes pratiques d'utilisation. Ce document pratique peut être utilisé quotidiennement par les applicateurs professionnels de produits biocides.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - L'assemblée générale de l'UPJ, le 17 juin, est l'occasion d'un point sur l'évolution du marché de la protection des jardins et espaces verts, son contexte réglementaire et les actions de l'union.

MARCHÉS - Le marché phytosanitaire espaces verts (professionnel) est en baisse continue de chiffre d'affaires depuis 2008 (après stabilité depuis 2005, chiffres donnés) et en tonnage.

Le marché jardins d'amateurs (phyto + biocide + MFSC) baisse entre 2012 et 2013. Il est structurellement stable en valeur et en baisse pour les tonnages phytos.

RÉGLEMENTATION - L'événement marquant début 2013 est la loi Labbé (n° 2014-110) prohibant les produits phytos, sauf UAB et de biocontrôle, dès 2020 en espaces verts et 2022 en jardins d'amateurs. L'UPJ critique cette loi (arguments dans l'article).

ACTIONS - L'UPJ s'est donc retirée des instances d'Ecophyto et a dénoncé les accords cadres qu'elle avait signés avec les pouvoirs publics, y compris sur le biocontrôle, mais continue à promouvoir ce type de moyens de protection.

Elle suit la mise en œuvre du certiphyto et la mise en place du certibiocide.

Elle étend la Clinique des plantes, outil de diagnostic, sur internet.

La marque Produit Naturel se développe pour les amendements et supports de culture, avec en projet le paillage et les biostimulants.

MOTS-CLÉS - ZNA (zones non agricoles), espaces verts, jardins, UPJ (Union des entreprises pour la protection des jardins et des espaces publics), chiffre d'affaires, tonnage, produits phytopharmaceutiques (phytos), biocides, MFSC (matières fertilisantes et supports de culture), réglementation, UAB (utilisable en agriculture biologique), biocontrôle, Clinique des plantes, marque Produit Naturel.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEUR : *Q. PROTSENKO, responsable des affaires techniques et réglementaires UPJ.

CONTACT : quentinprotsenko@upj.fr

LIENS UTILES : www.upj.fr

www.cliniquedesplantes.fr

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