dossier

Réglementation : une année mouvementée

MARIANNE DECOIN* - Phytoma - n°678 - novembre 2014 - page 26

Cette année 2014 aura été riche en événements réglementaires qui vont influencer les pratiques phytosanitaires en zones non agricoles ! Flash-back.
Les jardins urbains ouverts au public, s'ils dépendent d'une « personne publique » (commune, établissement public, etc.), sont concernés par les restrictions d'emploi de produits phytos imposées par la loi du 6 février 2014. Photo : M.-F. Delannoy

Les jardins urbains ouverts au public, s'ils dépendent d'une « personne publique » (commune, établissement public, etc.), sont concernés par les restrictions d'emploi de produits phytos imposées par la loi du 6 février 2014. Photo : M.-F. Delannoy

Dans le calendrier, du mois de février 2014 à celui d'octobre, la réglementation des pratiques phytosanitaires en zones non agricoles a vu se succéder une loi spécifique, quelques articles d'une loi dite agricole et, enfin, un amendement à un projet de loi.

Loi de février et produits phytos en ZNA

Objectif prohibition

Le premier texte a été publié au Journal officiel le 8 février 2014. C'est la loi du 6 février 2014, dite « Loi Labbé » du nom du sénateur Joël Labbé, à l'origine du texte.

Cette loi compte quatre articles et concerne strictement les zones non agricoles (ZNA), même si son titre ne le dit pas(1).

Elle vise à prohiber les produits phytos (alias phytosanitaires ou phytopharmaceutiques), sauf certains d'entre eux, de certaines catégories d'espaces en zones non agricoles, le tout sauf dans certaines circonstances et après certains délais.

Produits prohibés, sauf trois catégories : une à confirmer...

Mais quels produits, quels espaces, quelles circonstances, quels délais ?

Côté produits, sont « prohibables » tous les produits phytos sauf ceux de trois catégories. Elles sont citées dans l'article 2 de la loi.

La première est celle des « produits de biocontrôle figurant sur une liste établie par l'autorité administrative »...

Traduction : ce sont, parmi tous les produits a priori de biocontrôle (Encadré 1), ceux qui seront listés par le ministère chargé de l'Agriculture. Ce ministère est en effet « l'autorité administrative » nationale chapeautant la réglementation des produits phytos, même ceux utilisés en ZNA(2).

Un prototype de la liste existe, c'est la liste Nodu vert biocontrôle (Encadré 1). Sa version la plus récente, dite Nodu vert biocontrôle 2013 et publiée fin 2013, porte 114 noms de produits commerciaux. Certains d'entre eux sont utilisables en ZNA, par les jardiniers amateurs et/ou par les professionnels des espaces verts et publics (Encadré 2, p. 28).

Une catégorie vide, pour l'instant...

La deuxième catégorie est... vide ! C'est celle des « produits qualifiés à faible risque conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 ». En effet, pour qu'un produit puisse obtenir cette qualification, il faut que sa substance active soit reconnue à faible risque par l'Union européenne. Or, pour l'instant celle-ci n'en a pas encore reconnu.

Donc la France ne peut pas reconnaître de produits, ni pour l'agriculture ni en ZNA. Mais cela pourrait changer. Des produits autorisés aujourd'hui pourraient demain être officiellement reconnus « à faible risque ».

...et une bien définie

La troisième catégorie épargnée par la loi est celle des « produits dont l'usage est autorisé dans le cadre de l'agriculture biologique », abrégé en UAB (utilisables en agriculture biologique). Leur liste est réactualisée officiellement plusieurs fois par an par les soins de l'Itab, Institut technique de l'agriculture biologique. La dernière mise à jour date du 3 septembre dernier (Encadré 3, p. 30).

Malgré le mot « agriculture », ces produits UAB intéressent aussi les zones non agricoles ! Quand on parcourt leur liste, on y trouve des spécialités autorisées aux jardiniers amateurs et des produits professionnels ayant des usages en espaces verts.

Usages concernés : d'une part les lieux ouverts au public, avec un délai

Revenons à la loi de février. Cette prohibition, ou plutôt cette restriction aux produits UAB et à ceux de biocontrôle listés (et demain ceux « à faible risque ») ne concerne pas l'ensemble des zones et usages non agricoles mais deux catégories.

La première est, citons la loi : « Les espaces verts, forêts et promenades accessibles ou ouverts au public » relevant de « personnes publiques » que sont, en clair, l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que les établissements publics. Et ceci quels que soient les applicateurs de produits : salariés de la « personne publique » ou prestataires de service.

Par exemple, les jardins publics municipaux et les forêts domaniales percées de chemins piétons sont concernés par la loi, mais pas les parcelles forestières mises en défens (engrillagées) pour régénération ni les serres municipales de production de fleurs.

La voirie, les terrains de sport et cimetières ne sont pas concernés non plus... Mais quid d'un cimetière ouvert au public comme lieu touristique et de promenade, comme celui du Père-Lachaise à Paris ? Ou d'un golf municipal qui ne serait pas clairement interdit au public ? Parfois, le diable est dans les détails. Au départ, la loi prévoyait l'application de cette mesure à partir du 1er janvier 2020. Mais cela risque d'advenir plus tôt.

D'autre part les produits pour amateurs, avec un autre délai

Autre prohibition, celle des produits phytos, toujours sauf UAB, de biocontrôle listés et « à faible risque », pour des « usages non professionnels ». Autrement dit, pour l'utilisation par des jardiniers amateurs. Actuellement, ceux-ci ne peuvent utiliser que des produits EAJ (emploi autorisé en jardin d'amateur), une gamme sécurisée par rapport aux produits professionnels. Visiblement, cela n'a pas suffit au législateur.

Ce volet de la loi devra s'appliquer à partir du 1er janvier 2022. Concrètement :

– jusqu'au 31 décembre 2021, tous les produits EAJ restent vendables aux jardiniers et utilisables par eux ;

– dès le 1er janvier 2022, seuls resteront vendables aux amateurs et utilisables par eux les produits à la fois EAJ et, soit UAB, soit de biocontrôle listés, soit reconnus à faible risque (d'ici là, il y en aura peut-être). Les fabricants ont sept ans pour « verdir » leurs gammes.

Les prestataires de service intervenant dans des jardins amateurs garderont, eux, le droit d'utiliser toute la gamme de produits autorisés (« pro » et EAJ) : ce sont des professionnels, donc ils mettent en œuvre des usages professionnels.

L'exception traitements obligatoires

Enfin, toutes ces restrictions tombent en cas de « traitements et mesures nécessaires à la destruction et à la prévention de la propagation des organismes nuisibles mentionnés à l'article L. 251-3, en application de l'article L. 251-8 » (du code rural)...

De quoi s'agit-il ? Pas de tous les organismes qu'un gestionnaire d'espace vert ou un jardinier va considérer comme nuisible ! Seulement des organismes listés comme nuisibles par l'autorité administrative et contre lesquels il existe des arrêtés de lutte obligatoire. Ce sont des arrêtés ministériels ou, en cas d'urgence locale, préfectoraux.

La frontière biocide

Par ailleurs, ces prohibitions et restrictions concernent les produits phytos mais pas les biocides. Ainsi, les traitements collectifs antimoustiques et la vente des insecticides ménagers sont épargnés par la loi.

Plus subtil, un traitement contre la processionnaire du pin sera concerné par la loi s'il est réputé protéger les arbres – pas de panique, des produits UAB et Nodu vert biocontrôle sont autorisés pour cela. Mais s'il s'agit de protéger les populations contre les chenilles allergènes, il pourrait être « classé biocide » et des insecticides chimiques pourraient être utilisés... Pas simple, tout ça !

La Loi d'avenir agricole, des volets pour les ZNA

Publicité : le biocontrôle seul épargné

Passons maintenant à Loi d'avenir agricole, publiée le 14 octobre 2014(3). Elle vise d'abord l'agriculture, et, parmi ses 96 articles, seuls ceux numérotés de 50 à 56 ont à voir avec la protection des plantes. Mais certains éléments de ces articles concernent aussi les ZNA !

Premier point, la publicité commerciale sur les produits phytos (article 50).

Elle ne sera plus possible en tous lieux que sur les produits de biocontrôle listés. Pour tous les autres – même les produits UAB qui ne sont pas aussi listés biocontrôle – la publicité ne sera possible que sur les points de distribution aux professionnels et dans les publications qui leurs sont destinées.

Il y aura donc peu de changement pour les professionnels des ZNA : la publicité de leurs produits se fait déjà sur les lieux de vente et dans les publications professionnelles. Seule nouveauté : il semble que la publicité des produits (sauf de biocontrôle listés) soit désormais interdite dans les salons, même 100 % professionnels.

Par ailleurs, ce sera l'omerta pour les produits amateurs sauf ceux de biocontrôle listés : interdit d'en faire la publicité ! Attention, la loi ne prévoyant ni décret d'application ni délai, cette mesure est d'ores et déjà applicable.

Donc, en attendant le 1er janvier 2022, tous les produits EAJ restent autorisés à la vente aux amateurs, mais on ne peut faire la publicité vers les amateurs que sur les produits listés biocontrôle.

Interdiction, sauf les « non classés tox » dans certains lieux

Le deuxième point est dans l'article 53. Il interdit dans certains lieux l'usage des produits phytos, sauf ceux de deux catégories :

– ceux reconnus « à faible risque » (catégorie encore officiellement vide, voir plus haut) ;

– ceux, citons la loi, « dont le classement ne présente que certaines phases de risque déterminées par l'autorité administrative ».

Les lieux concernés sont :

« les cours de récréation et espaces habituellement fréquentés par les élèves dans l'enceinte des établissements scolaires » ;

« les espaces habituellement fréquentés par les enfants dans l'enceinte des crèches, haltes garderies et centres de loisir » ;

– les aires de jeux pour enfants dans les parcs, jardins et espaces verts ouverts au public (que ces lieux appartiennent à des « personnes publiques » ou non).

En pratique, cela n'est pas nouveau ! En effet, un arrêté de 2011 dit « Arrêté lieux public » et que Phytoma avait présenté(4), interdisait déjà, dans les lieux listés ci-dessus, tous les produits phytos sauf ceux dispensés de classement toxicologique. Seules les phrases de risque physique ou écotoxicologique y étaient tolérées(5).

Il s'agissait bien de « produits ne présentant que certaines phrases de risque déterminées par l'autorité administrative » qui était rédactrice de cet arrêté...

Cette mesure est donc désormais confirmée par la loi.

Du nouveau sur l'application « à proximité » de certains lieux

Le troisième point est aussi dans l'article 53 : il impose des conditions pour l'application de produits phytos « à proximité » de ces lieux ainsi que ceux accueillant d'autres personnes vulnérables (maisons de retraite, hôpitaux et autres centres de soins et d'accueil de malades, handicapés, etc.). Certains de ces établissements sont en milieu rural, donc cela s'imposera aux agriculteurs voisins. Mais il en existe en milieu urbain. Les exigences ne concernent pas le choix des produits mais celui des aménagements de l'espace et des pratiques d'application.

Désormais, il faudra qu'il existe des « mesures de protection adaptées, telles que des haies, des équipements pour le traitement [on pense aux buses et autres matériels antidérive] ou des dates ou horaires de traitement permettant d'éviter la présence de personnes vulnérables lors du traitement ».

En l'absence de tout cela, l'autorité administrative (ministère ou, localement, préfecture) pourra fixer une distance minimale en deçà de laquelle tout traitement sera interdit.

Rappelons que l'arrêté de 2011 limitait les traitements phytos aux produits « non classés tox », non seulement dans les lieux accueillant des enfants ou élèves, mais encore dans un rayon de 50 mètres autour des bâtiments accueillant les publics vulnérables à l'intérieur de l'enceinte de ces établissements. Cette exigence est maintenue mais, en plus, il faut prendre des précautions hors de l'enceinte, à proximité de celle-ci. Au fait, à quelle distance doit-on considérer que l'on est « à proximité » ? La loi ne le dit pas... Voilà qui promet de beaux débats d'interprétation. À noter : tout comme celle de février, cette loi d'octobre restreint les produits et traitements phytos, mais elle ne restreint pas les biocides.

Certiphyto, date reportée

Décision de calendrier, la date limite pour obtenir les certiphytos pour les applicateurs salariés des collectivités territoriales a été reportée en même temps que pour les certiphytos des agriculteurs et de leurs salariés.

C'était le 1er octobre 2014, c'est désormais le 26 novembre 2015.

En revanche, la Loi d'avenir ne change pas les délais pour les entreprises prestataires de service ! Depuis le 1er octobre 2013, leurs salariés applicateurs de produits phytos doivent avoir leur certiphyto, dans le cadre de l'agrément de l'entreprise, lui aussi obligatoire depuis le 1er octobre 2013.

Agrément : assouplissements pour les petits et le biocontrôle

Autre assouplissement : un prestataire de service appliquant uniquement « des produits de biocontrôle mentionnés au premier alinéa de l'article L. 253-5 » pourra être dispensé d'agrément. Mais, attention ! Ses applicateurs devront quand même avoir leur certiphyto...

Enfin, les obligations pourront être assouplies pour les « microdistributeurs de produits destinés à un usage non professionnel ou lorsque [les ventes] concernent uniquement soit des préparations naturelles peu préoccupantes constituées exclusivement d'une ou plusieurs substances de base, soit des produits à faible risque ». Cela reste à préciser.

Loi de transition énergétique

L'amendement qui raccourcit de trois ans

Reste un texte non encore promulgué mais qui risque d'influencer les pratiques d'utilisation des produits phytos en ZNA : c'est la loi de transition énergétique. Elle a été votée par l'Assemblée nationale le 14 octobre 2014 mais doit encore passer au Sénat.

Un amendement ajoute un article au projet de loi. Dûment adopté par l'Assemblée, il prévoit d'avancer la date d'interdiction dans les lieux ouverts au public (interdiction des produits phytos sauf de biocontrôle, à faible risque et UAB).

Ce ne serait plus le 1er janvier 2020 comme annoncé par la loi du 6 février 2014, mais le 31 décembre 2016. Le délai pour se préparer à la mesure raccourcirait ainsi de trois ans et un jour...

Quelles seraient les conséquences, en pratique ? Elles sont évoquées, entre autres, dans l'article suivant de ce dossier !

<p>(1) « <i>Loi n° 2014-110 du 6 février 2014</i> visant à mieux encadrer l'utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national », publiée au JORF (Journal officiel de la République française) le 8 février.</p> <p>(2) Mais pas les produits biocides type insecticides ménagers, dont la loi du 6 février ne s'occupe pas et dont <i>« l'autorité administrative »</i> est le ministère chargé de l'Environnement.</p> <p>(3) Loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.</p> <p>(4) Arrêté du 27 juin 2011, publié au JORF le 28 juillet. Voir Réglementation, l'État met le(s) paquet(s). <i>Phytoma</i> n° 648, novembre 2011, p. 20 à 23.</p> <p>(5) Pour s'y retrouver dans les classements, lire l'article en p. 34 à 38 de ce numéro.</p>

1 – Produits de biocontrôle : ce que disent les lois ici présentées

Les produits de biocontrôle « en général » se déclinent en quatre catégories. Phytoma les a déjà citées mais, la Loi d'avenir l'ayant fait dans son article 50, c'est donc désormais gravé dans le marbre législatif. Ces quatre catégories sont :

– les « macro-organismes auxiliaires », insectes, acariens ou nématodes prédateurs (ils consomment les organismes nuisibles) ou parasitoïdes (ils parasitent) ;

– les « micro-organismes » : virus, bactéries, champignons microscopiques, dont les levures) ;

– les « médiateurs chimiques » ; substances impliquées dans les interactions entre individus à l'intérieur d'une espèce (phéromones) ou entre espèces (kairomones) ;

– les « substances naturelles », d'origine minérale, végétale ou animale, utilisées (extrait naturel ou parfois copie conforme) comme insecticides, fongicides, bactéricides et/ou herbicides.

Les « produits de biocontrôle figurant sur une liste établie par l'autorité administrative », cités par la Loi d'avenir dans ses articles 50 et 53 et par la loi Labbé dans son article 2 sont, parmi les produits phytos de biocontrôle (micro-organismes, phéromones, substances naturelles( 1)), ceux qui répondent à certains critères d'innocuité.

La « liste Nodu vert biocontrôle » préfigure cette liste. Pour l'instant, elle est établie annuellement par le ministère chargé de l'Agriculture (qui est l'autorité administrative) pour calculer les nodu (nombre de doses unités) et IFT (indice de fréquence de traitement), dans le cadre du plan Ecophyto. Un des objectifs du plan est de diminuer les nodu et IFT des produits phytos, sauf ceux listés Nodu vert.

La première liste, dite « Nodu vert 2012 », a été fixée en 2012 pour calculer en 2013 les nodu de 2012(2). La liste « Nodu vert 2013 » a été établie fin 2013(3), puis consolidée(4) pour calculer en 2014 les nodu de 2013.

Elle comporte 114 noms de spécialités. Cela fait 102 produits différents car une même formulation peut être vendue sous plusieurs noms de marque avec le même numéro d'AMM (autorisation de mise sur le marché). On y trouve 56 substances actives différentes car une même substance peut être utilisée dans des produits différents (ex. : une formulation solide et une liquide, une formulation pure et une mélangée à une autre substance, etc.).

On attend pour tout début 2015 la liste Nodu vert 2014.

(1) Les macro-organismes auxiliaires ne sont pas, légalement parlant, des produits phytopharmaceutiques (= phytos). Les micro-organismes, médiateurs chimiques et substances naturelles sont des produits phytos.

(2) Phytoma n° 657, octobre 2012, p. 4.

(3) Voir « Biocontrôle – La liste Nodu vert 2013 est parue » dans Phytoma n° 670, janvier 2014, p. 4.

(4) Voir « Sur le site du MAAF – Liste Nodu vert 2013 revue » dans Phytoma n° 671, février 2014, p. 5.

2 – Produits épargnés par la loi de février : que va-t-il rester ?

Pour les jardins d'amateurs, 26 des 114 spécialités de la liste Nodu vert biocontrôle 2013 (en fait, 23 produits différents) ont la mention EAJ (emploi autorisé en jardins d'amateurs). On y trouve 14 substances actives différentes :

– quatre micro-organismes, soit deux souches différentes de Bacillus thuringiensis, une du virus de la granulose et une de Bacillus subtilis ;

– neuf substances naturelles, soit le kaolin, l'huile de colza pure ou mélangée avec des pyréthrines, l'huile minérale paraffinique, le phosphate ferrique, l'acide pélargonique pur ou mélangé à l'hydrazide maléique, le bicarbonate de potassium et la laminarine ; – la codlémone (phéromone).

Les professionnels des espaces verts ont le droit d'utiliser ces produits amateurs (à l'inverse, les produits professionnels sont interdits aux amateurs). De plus, on peut utiliser en ZNA certains produits Nodu vert professionnels. Ils sont à base de 29 substances actives différentes. On y trouve les 14 déjà citées à propos des amateurs, plus :

– six micro-organismes, soit une souche de Beauveria bassiana sur palmier d'ornement (citée p. 16 à 19) et des souches de Metarhizium anisopliae, Verticillium lecanii, Paecilomyces fumosoroseus, Ampelomyces quisqualis et Gliocladium catenulatum, autorisées sur rosier, cultures florales et/ou arbres et arbustes d'ornement ;

– le soufre trituré sur rosier ;

– sept substances répulsives pour protéger les végétaux ligneux contre les vertébrés ;

– une phéromone d'agrégation pour piéger le bostryche typographe en forêt.

Et côté UAB ? De nombreux produits UAB sont utilisables en ZNA. Une bonne part des produits Nodu vert qui viennent d'être cités sont également UAB, mais il y en existe davantage :

– de nombreux fongicides à base de cuivre, sous forme de sulfate (« bouillies bordelaises »), d'hydroxyde, d'oxychlorure ou d'oxyde cuivreux ; 34 de ces produits sont EAJ, et d'autres sont professionnels ;

– de très nombreux fongicides à base de soufre simple, sublimé, trituré, trituré-ventilé, micronisé ; toutes les formes, sauf la sublimée, sont disponibles dans des produits EAJ (26 produits) ; et toutes le sont dans des produits professionnels avec des usages rosiers, par exemple ;

– l'huile essentielle d'orange douce, à la fois insecticide et fongicide, disponible pour les professionnels seulement, sur rosier et cultures florales ;

– des insecticides à base de pyréthrines seules, d'huile paraffinique, d'huiles blanches de pétrole et d'huile de vaseline (produits EAJ et produits professionnels), de spinosad (pour les professionnels seulement, sur rosier, cultures florales, arbres et arbustes d'ornement) et de savon mou (produits EAJ) ;

– des mastics de cicatrisation des plaies d'arbres à base de cire d'abeille, tous EAJ.

On compte environ 120 spécialités UAB utilisables en jardins d'amateurs ; même si la moitié d'entre elles ne proposent que deux substances actives différentes (cuivre et soufre), cela fait quand même une vraie offre de produits. À noter : en comparant les listes, nous avons repéré pas moins de 94 noms de spécialités qui sont à la fois UAB et listées Nodu vert biocontrôle 2013. De plus, parmi les produits UAB autorisés courant 2014, certains devraient logiquement se trouver sur la liste Nodu vert 2014.

Mais les listes ne vont pas fusionner pour autant. D'abord, 20 spécialités Nodu vert ne sont pas UAB. Parmi elles, des herbicides à base d'acide pélargonique et d'hydrazide maléique (or le règlement bio ne reconnaît pas les herbicides), ainsi que des répulsifs vertébrés et la phéromone du typographe dont l'usage n'existe pas en agriculture.

Ensuite, certains produits UAB ne remplissent pas les critères de la liste Nodu vert biocontrôle, qui exclut des produits sur la base de leur toxicité et écotoxicité.

3 – Produits UAB : de quoi s'agit-il ?

Les produits utilisables en agriculture biologique (UAB) sont cités par la loi du 6 février. Ces produits ont une définition réglementaire en droit français, appliquant la réglementation européenne(1) qui a fixé des critères et publie une liste.

En particulier, la substance active d'un produit UAB doit à la fois être approuvée comme une substance phyto dans le cadre du règlement phyto européen( 2) et être :

– soit un micro-organisme vivant et naturel (pas d'OGM !) ; tous sont « UAB d'office » ;

– soit une substance inerte d'origine naturelle (minérale ou biologique, c'est-à-dire végétale, animale ou issue de micro-organisme) sans appel à la chimie de synthèse pour son élaboration(3) ; l'inscription européenne en « bio » n'est pas automatique, il y a examen européen ; la copie d'une substance naturelle (ex. : phéromone) est acceptable après examen ;

– soit, dans de rares cas et par dérogation, une autre substance (ex. : un antilimace semi-synthétique avait été UAB en agriculture et ZNA en l'attente du lancement d'un autre plus naturel).

On retrouve les micro-organismes, produits naturels et phéromones déjà évoqués à propos du biocontrôle. De fait, la quasi-totalité des produits UAB sont de type biocontrôle selon les critères généraux. Mais beaucoup ne sont pas listés Nodu vert biocontrôle. Par ailleurs, certains produits Nodu vert biocontrôle ne sont pas UAB (voir Encadré 2).

La liste des produits UAB arrêtée au 3 septembre 2014 est sur les sites de l'Inao et de l'Itab(4).

(1) Règlements n° 834/2007 et n° 889/2008. La liste des substances UAB est publiée en annexe II du règlement 889/2008.

(2) Règlement n° 1107/2009.

(3) Ainsi les spécialités de type bouillie bordelaise sont UAB : il s'agit du sulfate de cuivre qui est d'origine minérale, neutralisé à la chaux éteinte d'origine minérale également. Le spinosad, d'origine bactérienne donc biologique, et élaboré strictement par des procédés biologiques et/ou physiques, est également UAB – mais pas le spinetoram, malgré son origine bactérienne très proche du spinosad car son élaboration comporte une étape de synthèse chimique. Aucun de ces produits n'est Nodu vert biocontrôle.

(4) Institut national des appellations d'origine et contrôlées (le label AB du « bio » est une des appellations gérées par cet institut) et Institut technique de l'agriculture biologique. Sites dans « Pour en savoir plus », ci-dessus.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - Des lois françaises parues ou discutées en 2014 influencent les pratiques phytosanitaires en ZNA, notamment le choix des produits et les précautions à prendre.

LOI 2014-110 - La loi du 6 février 2014 a pour objet principal de prohiber une partie des produits phytos d'une partie des ZNA. Cette prohibition épargne les produits UAB et certains de biocontrôle (définis dans l'article) actuellement présents sur le marché français. L'article évoque les espaces concernés et les dates d'application prévues à l'origine.

LOI 2014-1170 - Parmi les 96 articles de la Loi d'avenir agricole du 13 octobre 2014, des mesures concernent la protection des végétaux en ZNA dans les articles 50, 51 et 53 :

– la publicité pour les produits phytos voit ses restrictions augmentées, sauf pour certains produits de biocontrôle ;

– le choix des produits phytos est très restreint dans les lieux accueillant des enfants et personnes vulnérables (confirmation d'un arrêté de 2011) ;

– l'application de produits à proximité de ces lieux est soumise à des exigences (aménagements, équipements, horaires) ;

– la date limite d'obtention des certiphytos en collectivités territoriales est repoussée ;

– des assouplissements concernent la vente à petite échelle et l'application, mais seulement de certains produits de biocontrôle.

LOI EN COURS - Un amendement au projet de Loi de transition énergétique avance la date de prohibition des produits en espaces publics.

MOTS-CLÉS - ZNA (zones non agricoles), bonnes pratiques en ZNA, réglementation, loi n° 2014-110 du 6 février 2014, loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014, Loi de transition énergétique, amendement, date limite, produits phytos (pharmaceutiques), produits professionnels, lieux publics, produits amateurs, biocontrôle, UAB (utilisable en agriculture biologique).

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEUR : *M. DECOIN, Phytoma.

CONTACT : m.decoin@gfa.fr

LIENS UTILES : www.journal-officiel.gouv.fr

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